Si nous n'avions pas reçu ce People who aren't there anymore, septième album de Future Islands, nous aurions été tentés de chroniquer Singles dans le cadre de notre rubrique des "disques oubliés", tant ce dernier - qui nous a permis de faire la connaissance en 2014 de la bande de Samuel Thomson Herring - nous avait profondément marqué par son style assez singulier. Bizarrement, depuis Singles, nous n'avons pas cherché plus que ça à suivre leurs aventures, jusqu'à la sortie de ce nouvel album en janvier, disponible via leur label 4AD. Nous avons pu constater par ailleurs que le quatuor de Baltimore dans le Maryland, a toujours autant de succès en Europe. Preuve en est avec leur concert parisien de septembre de l'année dernière dans la nef du 104, bien remplie pour l'occasion. C'est lors de cette soirée qu'on a pu découvrir en avant-première trois morceaux de People who aren't there anymore. Et un show agréablement mené par son frontman...
Pour celles et ceux qui n'ont jamais entendu parler de ce groupe de pop-rock sans guitare, Future Islands est connu, entre autres, pour la personnalité fantasque de son chanteur. Samuel T. Herring, c'est un petit gars toxicomane un peu trop habité par son rôle de frontman qui a été sujet à maintes reprises de moqueries pour ses pas de danse peu conventionnels, ses ponctuations de vers accompagnés d'étranges gesticulations et expressions faciales, et son crooning défiant par moments les limites du possible lorsqu'il pousse de surprenants grognements impromptus. La meilleure démonstration de tout ça est devenue culte, lors d'un passage télé chez Letterman, quand le groupe est venu jouer en 2014 leur tube à succès "Seasons (Waiting on you)". Ce que l'on sait moins, c'est qu'Herring est aussi un rappeur depuis l'âge de 14 ans. Ayant pris le blaze d'Hemlock Ernst, il a collaboré avec talent avec pas mal d'artistes recommandables tels que Busdriver, Curse Ov Dialect et JPEGMafia. À côté de ce type haut en couleurs (qui a fait ses débuts de comédien en 2023 avec la série "The changeling"), se trouvent dans Future Islands des musiciens totalement autistes, quasi immobiles et froids, qui créer une profonde disparité, visuellement parlant.
Et la musique dans tout ça ? Eh bien, cette mixité de personnages propose une musique qu'on pourrait qualifier paresseusement de synth-pop, puisque le synthé remplace la guitare, et qu'il est le seul maître à bord mis en lumière en terme mélodiques (hormis bien sûr la signature vocale du chanteur). Et l'on connaît le niveau d'autorité qu'ont les mélodies dans la pop music. En réalité, Future Islands, c'est bien plus que de la "synthpop". C'est un mélange parfait entre, d'un côté, des morceaux dansant et énergiques souvent cadencés façon disco-pop ("King of Sweden", "The tower", "Say goodbye"), et de l'autre, des ballades à l'eau de rose au sein desquelles le chant de Samuel démontre un charme fou ("Deep in the night", "Corner of my eye").
People who aren't there anymore est un album réussi, touchant même. Mais rien n'est surprenant au moment de faire le bilan de ce septième album, venant d'un groupe qui a su porter depuis longtemps une signature sonore unique, bien que nous soyons tout de même plus exaltés par la qualité des chansons de sa première moitié que de la deuxième.
Publié dans le Mag #60