Késako ? Les 20 ans de l'Usine ? Une fiesta placée sous le logo du Folklore de la Zone Mondiale ? Des concerts, des perfs, des vidéos ? Des activités gratuites et une série de 15 concerts pour 8 euros ?
Eh oui, c'était bel et bien le programme de cette Fiesta de la Zone Mondiale 2009... Bien que peu de groupes y participant soient chroniqués dans nos colonnes, la tenue d'une telle Fiesta, pas très loin de mon nid, ne pouvait me laisser de marbre. Punk-rock, rockabilly, hip-hop, trance electro-punk ou traditionnels punko-bretons, garnis d'une conscience politique tendant vers une convergence des luttes, étaient au rendez-vous le 24 octobre 2009 à deux pas du centre de Genève...
"Formez des groupes de rock... libres !" scandait François à l'issue de l'ultime concert de Bérurier Noir à Paris en novembre 1989. Quasiment en même temps et à plusieurs centaines de kilomètres de là, voyait le jour un espace autogéré qui deviendra rapidement un haut-lieu de contre-culture : l'Usine. 20 ans plus tard, c'est dans cette même Usine (rassemblant studios d'enregistrement -dont les Forces Motrices-, local de répétition, bars, salles de concerts, de cinéma et de théâtre, shop, atelier de graphisme, ...), située à deux pas du centre de Genève, qu'avait lieu une nouvelle Fiesta de la Zone Mondiale, après Cambrai (2007) et Brest (2008). La sortie étant prévue de longue date, c'est l'occasion d'effectuer le déplacement en compagnie d'ancêtres et illustres camarades : Marie, Anne-Sophie et Romain. Genève a beau ne pas être loin "à vol d'oiseau" de nos terriers respectifs, il nous faudra exécuter quelques dizaines de virages et des centaines de mètres de dénivelé pour atteindre les abords du Rhône après avoir traversé le bassin mollassique... Qu'importe, à peine débarqués sur le parvis du bâtiment (imposant s'il en est) et les yeux posés à la fois sur des dégaines les plus improbables les unes que les autres et sur le travail (à la tronçonneuse ! d'ailleurs ne dit-on pas "le prolo se tue à la tache, le patron se tue à la hache" ?) de Roland Cros, qu'on se prend à rêver en voyant l'annotation "1989 - 2009 : on est encore là !!" sur chacune des branches de la croix bérurière qu'est en train de peindre DDD : et si les Bérus remettaient ça ? En quatimini, en guise d'énorme bonus-surprise au lever du jour... Mais non, même si de malins esprits ont relayé la rumeur pendant la soirée... Si Loran, une moitié historique du duo, est de la partie avec Les Ramoneurs de Menhirs, François semble avoir (définitivement ?) décroché et, inutile de s'appesantir outre mesure : l'inattendu n'aura pas lieu.
Collectif Mary Read - La Zone Mondiale à l'Usine
Mais pour reprendre le cours "normal" (je déteste cette notion) des évènements, il n'est encore pas 17 heures que nous saluons Paria, tête pensante du Folklore de la Zone Mondiale et instigateur de la Fiesta. Le temps de s'immiscer rapidement dans le labyrinthe de l'Usine (et de ne plus savoir où poser la vue entre flyers et graffs en tout genre, sans compter sur l'achitecture-même de l'endroit) puis de faire le tour de la bâtisse et, enfin, de s'interroger longuement devant les diverses poubelles publiques suisses que le cinéma ouvre ses portes. Les quelques dizaines de places du Spoutnik (la salle de cinéma) trouvent rapidement un fessier pour les occuper (les autres se réfugieront par terre) et après quelques images muettes d'un film de guerre (reconstitution, parodie, ... ?), c'est Marsu du label Crash Disques (Ludwig Von 88, Dead Pop Club, Brigada Flores Magon, Servo, Homeboys, ...) qui présente cette séance un peu particulière. Marsu avertit l'assistance d'éventuels problèmes techniques ou changements au sein d'un programme qui évolue en temps réel... Tout en acquiesçant, la salle ricane devant l'improvisation qui règne alors... Personne n'ayant oublié qu'il s'agit d'une projection se déroulant dans les règles de l'art... punk ! En premier lieu, c'est un court métrage "fait avec des pinces à linge il y a plus de 30 ans" qui est projeté. On suit alors les aventures de Otto évoluant dans un univers plus qu'étrange où les "amputations" sont reines. S'ensuit la fameuse intervention de Gogol Premier, François Hadji-Lazaro (Garçons Bouchers) et les Bérurier Noir sur le plateau de "Ciel mon mardi" (animé par Christophe Dechavanne) qui reste encore d'actualité comme le soulignera Marsu à l'issue de son visionnage. Une séquence télévisée qui possède l'autre avantage d'offrir la possibilité de se bidonner à peu de frais face aux déconnades des musiciens ou des arguments de leurs contradicteurs, et ce, sans compter sur les inepties des deux "spécialistes". Pour compléter la mise en jambe de cette soirée, c'est une salve de clips qui est offerte aux spectateurs. De ceux tombés dans l'oubli, Les Maîtres (dont deux membres feront partie des Négresses Vertes plus tard - merci Marsu-la-science pour l'info) aux légendaires Bérurier Noir et Ludwig Von 88 en passant par l'indie-rock des Thugs, le rock arty et sous acide de Lucrate Milk, la noise intense de Portobello Bones sans oublier les Young Gods (au travail salutaire depuis si longtemps) ou Les Garçons Bouchers qui avaient invité Christophe Salengro (actuel Président de Groland) sur la vidéo de "Carnivore". Il reste "Justice pour Hakim", un documentaire élaboré par le collectif "Regarde à Vue" au sommaire, mais nous quittons le Spoutnik pour rejoindre les concerts (il faut sortir du bâtiment pour re-rentrer) et il y a déjà un maximum de monde !
Après un passage dans l'entonnoir de l'entrée puis au guichet, nous découvrons le Kab, principale scène ouverte ce soir (accompagnée d'une inévitable buvette), où Junior Cony semble en avoir terminé. Je quitte alors mes compagnons de Fiesta pour partir dans une découverte plus approfondie des lieux. A l'étage, se répartissent le Moloko, un bar-couloir au bout duquel se tient une mini-scène, le Zoo, la scène de taille moyenne placée sous une toiture verrée, ainsi que quelques stands (sandwichs et brochures à prix libres, couscous végétarien, disques et buvettes à prix directs). Voilà le périmètre dans lequel vont évoluer les centaines de punks présents, toutes tendances confondues, des quelques apolitiques aux skinheads les plus radicaux ("skinheads" et pas "boneheads" !) et la quinzaine de groupes invités pour l'occasion. On s'aperçoit rapidement qu'il sera difficile de se frayer une place au Moloko mais on peut néanmoins gouter le temps de quelques titres aux Angry Cats, nouveau projet de Fred Alpi (ex-Brigada Flores Magon). Trio qui me fait penser à une version allégée des Hellbats le temps que je reste en sa compagnie, les chats sont bel et bien énervés, même en tout début de soirée. Ca balance des rythmes efficaces et ça swingue diablement, le rockab' de Fred échauffe joyeusement l'atmosphère mais je ne tarde pas à rejoindre l'autre scène de l'étage : le Zoo. Et pour cause, puisqu'il s'agit du Collectif Mary Read qui ne va pas tarder à donner de la voix. "Ni dieu ni maître" qu'on dit mais je dois avouer que la présence de ce collectif hip-hop réunissant Mina, Nergal et Calavera me rend plus qu'impatient à force d'écouter (et ré-écouter) les productions des uns et des autres sur disques ou via MP3. Bien que s'exprimant sur des instrus déjà préparées (pas de DJ aux platines, seul le trio abat son flow), je mets néanmoins très rapidement aux oubliettes mes craintes quant à la pertinence du groupe en live. Les lyrics frappent de toutes leurs forces, chaque protagoniste se met en avant à tour de rôle et les attaques groupées font mouche : pas de doute, le Collectif Mary Read est très bien en place et la véracité des textes n'en est que soutenue. Ce n'est que du bonheur lorsque une partie du public entonne en compagnie du trio les refrains de "5 000 ans d'erreurs" ou "Sous contrôle" et je n'en crois pas mes oreilles lorsque "On joue aux missiles", "Antifasciste" ou "Grenade incendiaire" de Calavera sont envoyés en compagnie de Mina et Nergal ! Quelques titres plus calmes sont donnés pour temporiser mais force est de constater que les gros beats qui claquent remportent les suffrages auprès qu'une assistance bien plus emballée que je ne l'aurais pensé. Après une petite dernière "vite fait, mal fait" selon Nergal, je fais l'impasse sur Guerilla Poubelle du grand kangourou (au Kab) et me rassasie avant de prendre deux ou trois litres, pardon, titres de Lexomyl.
Witch Hunt - La Zone Mondiale à l'Usine
Punk-rock limitatif et sur la brèche, flirtant avec une noïse burnée, Lexomyl joue une carte à la fois bruitiste et dérangée. Dommage de ne pas en voir plus mais la bande-son proposée par le quatuor n'est pas pour me déplaire et les premiers rangs du Moloko semblent apprécier la dose administrée. Je ne quitte décidément pas ce sympathique premier étage puisque, dans la foulée, je retourne au Zoo. Dans le cadre de leur tournée européenne de près de deux mois, les anarchopunks américains de Witch Hunt profitent de cette Fiesta pour effectuer une première escale en Suisse. Deux filles, deux mecs et autant le dire d'emblée, ça castagne sec ! Le punk à tendance hardcore (et inversement) parfois revêtu d'intentions émotionnelles trouve rapidement écho auprès du public et le brasse sérieusement. C'est donc l'occasion pour le groupe de présenter son nouvel album, sorti via Alternative Tentacles, le label de Jello Biafra (ex-Dead Kennedys), et bien sûr de piocher dans son répertoire antérieur (on trouvera quelques titres de Blood-red states). L'alternance du chant féminin/masculin permet au groupe de se diversifier un tantinet sur des compos aussi brûlantes que corrosives. Lorsque le gang en termine, non sans avoir essoré une partie du public, direction le rez-de-chaussée où c'est la trance chamano-punk de Ethnopaire qui est en marche. Musique ethnique passée à la sauce punk, séquences électros ajoutant une dose hypnotisme, l'univers (pas seulement visuel) de Ethnopaire est un cas à part... Soutenu par des projections vidéos et de la peinture en temps réel, le show du groupe est à la hauteur de sa réputation : keupon et technoïde, intense et psychédélique, de quoi faire une rencontre épicée avec son territoire "Casunistanais". Mon dernier passage au Moloko se fait (rapidement) en compagnie de Trouble Juice (groupe emmené par Mistiti) qui reprend du rock crasseux à en faire pâlir un Gui De Champi mais me laisse quelque peu sur ma faim... Il en faut pour tous les goûts. Sur la deuxième scène de l'étage (Zoo) flotte comme une petite ambiance latine car c'est à Guarapita de monter sur les planches. Et c'est de la dynamite ! A force de concerts et d'années d'existence, le groupe s'est imposé sur la scène ska-punk indépendante. Le concert de ce soir ne dérogera pas à la règle. Engagement intégral pour la formation qui fera slammer plus que de raison le public. Et il faut avouer qu'il est bien difficile de résister à cette juxtaposition de punk direct avec une fièvre latine suant de grosses gouttes de ska. Des bonds de plus en plus généreux de la part des guitaristes, "El pueblo unido jamás será vencido" pour fédérer les Zonards Mondiaux, des pointes dub produisant leur effet et Guarapita a fait carton plein sans jamais se désunir ! Ayant vu La Fraction il y a quelques semaines en première partie de Jello Biafra & The Guantanamo School of Medicine, je fais donc l'impasse sur la prestation du groupe ce soir. En revanche, en lisant au jour d'aujourd'hui le planning de la soirée, je ne comprends pas comment j'ai pû éviter Arsène Lupunk... C'est sans compter mes collègues qui, eux, se sont bels et bien rendus au Moloko, et trouveront sympathiques les reprises à la sauce acoustique de standards punks par le trio. Référence de la scène DIY au milieu des 90's mais ayant débranché les amplis depuis une dizaine d'années, Heyoka est de retour. Et c'est un euphémisme de dire que le groupe est attendu au tournant. Ne connaissant encore pas Heyoka, je peine à accrocher au chant mais les compos rentrent dans la peau comme dans du beurre. Le groupe a beau avoir été mis entre parenthèse durant des années, ses membres n'ont pas perdu leur rage et leur savoir-faire. Sous la toiture verrée du Zoo et les projections vidéos estampillées FZM les spectateurs sont comblés, et une fois n'est pas coutume, nombre d'entre eux scandent les refrains en compagnie du groupe qui se fendra d'un petit "Guns of Brixton", pour la route. Autre (re)formation, celle de Division Bolchoï qui n'est autre que l'union (le temps de cette soirée) d'ex-membres de Division d'Honneur et de Bolchoï pour un téméraire revival streetpunk. Encore sous le coup de Heyoka, tout comme l'assistance, je peine à être en phase avec les vétérans keupons et ce n'est qu'en fin de set (et après un titre-hommage aux Bérus) qu'ils parviendront à agiter sérieusement le Kab. Pour la dernière montée d'escalier de la nuit (pour se rendre au Zoo), c'est une excellente surprise qui m'attend en la personne de René Binamé. Derrière sa batterie en peau de léopard et flanqué d'un duo de guitaristes (le trio évoluant en ligne), René Binamé débite des chansonnettes noires et cruelles sur un son massif et compact. Le groupe venant de Belgique, je songe à un Didier Super gonflé à bloc mais plus allégorique dans le propos ("le travail tue, le travail paie, le temps s'achète au supermarché"). Pourtant charmé par l'univers de René Binamé, j'aurais du mal à dire plus sur son compte... Disons que je ne saurais combien conseiller de se pencher sur cette "noïse poétique" extrêmement bien ficelée.
Ramoneurs de Menhirs - La Zone Mondiale à l'Usine
"Last but not least", placés en ultime position aux alentours de 2 heures du matin, ce sont les Ramoneurs de Menhirs qui occupent la "tête d'affiche" de cette Fiesta de la Zone Mondiale. Des Ramoneurs pour qui presque tout le monde est venu et auxquels un chapitre entier devrait être consacré tant il y a matière... Le groupe assurant la plupart des dates dans le grand Ouest (français), sa venue si loin de son Q.G. assure une affluence massive de spectateurs et la présence d'un ex-Bérurier Noir en la personne de Loran, ne doit pas non plus y être étrangère. Avec leur détonante association de punk-rock et de musique (traditionnelle) bretonne, Les Ramoneurs de Menhirs, menés par Maurice au chant (et en pantoufles !) retournent le Kab à l'aide de "Yawha yaw ha yaw", "K.A." et, un peu plus tard, de "BellARB", terrible version punko-celtisante du chant contestataire "Bella ciao". Bombardes, biniou et guitare en avant, le quatuor enchaîne ses brûlots, souvent ponctués des spéciales dédicaces de Loran. L'ancien compère de François s'apparente de plus en plus à un hybride homme/animal avec sa chevelure évoquant des cornes de caprins... la corne à boire est bien à la ceinture, elle ! Les Bérus repris sur le premier album des Ramoneurs de Menhir il fallait s'attendre à ce qu'une bonne ration soit servie sur scène. Et c'est ce qui constituera l'essentiel de la deuxième partie d'un concert qui durera près de 2h30 au total ! Entre des titres de Dans an diaoul (et peut-être même certains du deuxième album en préparation), les keupons les plus celtes de cette nuit-là envoient quelques "traditionnels béruriers" lorsque ce n'est pas Loran, seul (mais chaleureusement aidé par le public à l'image des "la la la lalalalaaaaa" de "Vivre libre ou mourir") qui part à l'assaut en assurant guitare et chant. Les visages déjà ravis s'illuminent d'avantage sur "Captain Kirk", "Petit agité", "Maknovtchina", "Scarabée" et c'est de la folie lorsqu'un cracheur de feu intervient dans le public, à quelques mètres de nous seulement, au moment de "Vive le feu" ! Cerise sur la gâteau, Violette (Ethnopaire) fait son apparition sur scène (et au micro) à plusieurs reprises. Le Ramoneurs n'en peuvent plus, des membres du public montent sur scène, Loran est éreinté mais il y a de l'espoir tant qu'il n'a pas posé sa gratte... Et devant autant de sollicitations, le couvert est remis pour servir "Hélène et le sang" à presque 4h30 du matin. Loran donne rendez-vous "autour d'une bonne fondue", les fêtards de la zone mondiale quittent au compte-goutte l'Usine et avec un peu d'imagination, on verrait presque un Lac Léman en feu...
La tête pleine d'images fortes et le coeur remplis d'émotions intenses, nous faisons route inverse vers nos tanières non sans une conduite quelque peu keuponne de ma part dans les rues de Genève, avec à notre arrivée le choix d'aller roupiller ou d'entamer une nouvelle journée même si les pendules et horloges en tous genres ont "reculé" d'une heure de ce coté-ci de la frontière, changement d'heure oblige...
- 24octobre2009.fzm.fr: site officiel (203 hits)
20 ans et toutes ses dents, l'Usine (bondée ce soir-là) a accueilli une nouvelle édition de la Fiesta de la Zone Mondiale qui s'est déroulée sans anicroche. Un bol d'air et de musiques libres, une utopie en action, cette soirée a permis à chacun de ses participants, selon ses affinités, d'en garder d'excellents souvenirs.
Merci à Paria
Coucous à Marie, Anne-Sophie et Romain
Photos : Rémi
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Conseil : Si vous voulez la lire, IMPRIMEZ LA ! ^
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Terrier : Là-bas.
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Qui veut de moi et des miettes de mon hublot ?
Rémiii
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