La Féline - Tarbes Découvert à La Ferme Électrique l'été dernier en ayant la surprise d'y trouver une telle artiste dans ce festival à l'univers habituellement plutôt punk, anticonformiste et déjanté, La Féline cultive une pop fragile et intimiste, mais non dénuée d'un vrai sens d'écriture et d'une recherche de la mélodie. C'est d'ailleurs ce qui fait une différence notable avec pas mal de formations ou de chanteurs/euses baignant dans les mêmes eaux : très souvent, on s'ennuie et l'impression d'entendre à chaque fois le même disque nous dévore. À l'image de Maud Lübeck, Keren Ann, ou même Jeanne Added (pour rester dans la pop française féminine aux univers singuliers), le projet musical de la philosophe-journaliste-auteure Agnès Gayraud a ce petit quelque chose d'unique. Est-ce dû à ses textes/histoires touchantes ? Son envie de varier les ambiances ? À son expérience ? Sa sensibilité ? C'est un peu tout ça à la fois.

Son dernier album porte le nom de sa ville de naissance et l'endroit où elle a grandi : Tarbes. 13 titres qui font appel à ses souvenirs d'ado dans cette ville moyenne post-industrielle qu'elle a voulu fuir assez rapidement. Cette cité qui a bien changé et dans laquelle elle revient de temps à autres pour y voir ses parents. Sa mémoire, à la fois orale (en musique), écrite et visuelle (avec des textes et photos sur le livret qui accompagne ce CD sorti chez Kwaidan Records), nous embarque avec un brin de nostalgie. On pourrait tout à fait en faire un parallèle avec notre propre existence, si bien que les textes d'Agnès attirent notre attention un peu plus que la moyenne des albums qu'on reçoit. L'introduction, sorte de berceuse en violoning avec une mise en avant de la voix et des sublimes chœurs, illustre parfaitement le propos. La sensibilité de l'artiste est sublimée par des arrangements aussi beaux que les Pyrénées, qui peuvent rendre certains de ses morceaux proches des travaux d'Alain Bashung ("Le garçon sur le toit"), d'Halo Maud ("Jeanne d'Albret") ou bien encore de Julien Gasc ("Va pas sur les quais de l'Adour").

Si Tarbes possède majoritairement de belles pépites pop/chanson française, bizarrement (ou pas), ce sont les chansons électro, les plus rythmées et dansantes, qui me touchent le moins. Bien que "Je dansais allongée" et "Dancing" soient une forme de respiration au sein de l'album, ce canevas-là réussit moins bien à Agnès (même l'effet des voix sur la fin de la première citée est de mauvais goût) et fait tâche au milieu des autres. Je préfère largement des titres qui sortent un peu du lot comme "Fum", chanson à base d'accordéon et de chorale reprenant un poème en langue d'oc de Loïza Paulin, extrait de "Sorgas" (1940), ou les morceaux plus subtils dessinés par les rythmes et percussions de François Virot (de Clara Clara, Sathönay, Brutal Vainqueur, Reveille (le groupe français)) comme "Place de Verdun" ou "La panthère des Pyrénées". Dans tous les cas, La Féline a réussi son pari.