On a tellement eu du mal à se faire à l'idée que Disappears avait disparu (elle est facile, je sais) que la présence de FACS - le groupe né des cendres de ce dernier - a été plus ou moins ignorée pendant de nombreuses années à la rédaction. Jusqu'au jour où l'on s'est dit que ce serait quand même bien de rattraper le temps perdu et de vous en parler un jour à l'occasion de la sortie d'un album. Ça tombe bien car le trio de Chicago mené par Brian Case (aussi ex-90 Day Men et The Ponys) sort régulièrement des disques. Il suffisait donc d'attendre ce super nouvel et cinquième LP studio, Still life in decay, pour (enfin) franchir le pas de la première chronique de ce groupe de rock américain qui sort un peu des sentiers battus.
Still life in decay est une œuvre hantée. En parcourant ce disque d'une oreille attentive, on le vit avec cette étrange sensation qu'une ombre sonore y plane constamment, comme un fantôme ténébreux prêt à vous jeter un mauvais sort. Cet effet frissonnant, fort bien exécuté, tient de plusieurs éléments se manifestant souvent en même temps. D'abord, il y a ce son pénétrant, bien aidé par une basse à la fois profonde, craquetante et saturée, et par des guitares aux effets étranges, sans parler de l'instabilité de la voix. Ensuite, la musique de FACS a la particularité d'être intense et d'hypnotiser, rendant ainsi notre esprit perméable assez aisément si on la prend un tantinet au sérieux. Réglée au poil rythmiquement et sans grande exubérance, elle produit une sensation de lenteur et de langueur à la fois, comme si Brian Case tentait de se sortir de l'affliction qui le ronge. À moins qu'il ne s'agisse simplement de l'expression de ce mal-être ?
Et pourtant, tout n'est pas 100% noir dans Still life in decay. Quelques rares éclaircies apparaissent dans ce maelström, la plus évidente se trouvant dans "Still life", ce qui n'est pas étonnant si on s'en tient au titre. Il n'en reste pas moins que cet album brille justement par son obscurité, et par la force d'un style unique mêlant noise-rock, krautrock et post-punk venimeux. Si tu as aimé Disappears, jette toi vite sur ce dernier album de FACS, si ce n'est pas déjà fait.
Publié dans le Mag #59