Eepocampe - When things get abstract A l'heure où les sphères de la mouvance post-rock connaissent un engorgement certain depuis maintenant quelques années, on ne compte plus les excellents groupes tentant avec plus ou moins de réussite de s'affranchir d'une étiquette devenue par voie de conséquence un peu encombrante. Ou alors, de rester dans une ligne d'expression respectant à la virgule près les dogmes d'un genre assez codifié, pour mieux en repousser les limites artistiques. Les nordistes d'Eepocampe, leur truc c'est de faire avec ce nouvel album, les deux à la fois, que ce soit avec l'inaugural "Lions & elephant" ou le très beau "Heart of volunteer". Le premier est une intro orchestrée par une volée de sample et quelques mélodies rock alternatif du plus belle effet, le second un single de post-rock ascensionnel en puissance.

En deux titres, le trio a démontré qu'il avait tout compris, en plus de faire l'étalage d'une classe peu commune à ce niveau. "Odyssey" vient alors confirmer que ces musiciens savent à peu près tout faire en livrant un titre qui renvoie invariablement à un mélange Deftones/Team Sleep en mode frenchy. Sous influence certes, mais divinement bien fait, Eepocampe démontre que l'on peut encore s'approprier une approche d'écriture sans pour autant livrer une pâle copie de ce qui a déjà été fait, surtout quand le final du morceau emmène l'auditeur sur des cimes post-rock évanescentes et s'offre un climax tout en onirisme délicat et décharge émotionnelle panoramique. Savoir maîtriser le dosage des genres, manier les styles, le groupe assure et s'offre donc un morceau éponyme dépassant les 9 minutes d'une "odyssée" ambient/post-rock classieuse bien qu'un peu inaboutie avant de lâcher les décibels sur "Indecisive mind", assurément l'un des sommets de l'album.

Une mise sur orbite géo-synchrone pop ("Polaroid fades"), un chant en osmose avec la trame narrative choisie et des envolées flirtant avec les sphères musicales des débuts et un travail de songwriting qui porte clairement ses fruits, "Soliloquies of a further death" poursuit le cheminement du groupe sur ce When things get abstract, avec des partis-pris étonnant (notamment cette touche rock alternatif californienne), mais parfaitement assumés d'autant que le rendu final sonne en parfaite conhérence avec le reste, ce avant un final en élégante apothéose et un modèle de post-rock enchanteur au crescendo tellurique : "Neumonal realm". Un ultime tour de passe-passe stylistique et la confirmation d'un talent pas si commun que ça. Classe.

NB : l'objet, livré dans un élégant digipack agrémenté d'un artwork de toute beauté, est indispensable pour les collectionneurs... et les autres. Que cela soit dit.