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Biographie > Eels' Angels

Eels Eels est un groupe de rock alternatif US dont l'homme de base est Mark Oliver Everett, auteur, compositeur, interprète et multi instrumentiste également connu sous le pseudonyme de "E". Celui-ci a également la particularité de choisir les musiciens qui l'entourent en fonction des besoins du moment, le seul point fixe devant être le batteur Jonathan "Butch" Norton. Ce qui a pour conséquence directe un line-up à géométrie variable et le fait que Eels soit presque autant un projet solo qu'un véritable groupe au sens le plus pur du terme. Produit marketé ou véritable formation de rock à l'espérance de vie réelle, la question s'est souvent posé depuis la sortie du premier album du groupe en 1996 (Beautiful freak). Des singles qui cartonnent et tournent en boucle sur les radios US, des clips nommés au MTV Awards, Eels avait tout pour être LE groupe à kids/ midinettes taillé pour bêtement enthousiasmer les foules dans des stades archi-bondés, mais sans personnalité.

Et pourtant, entre 1997 et 1998, suite à une série de drames familiaux (le suicide de sa soeur Elizabeth et le cancer du poumon qui emporta sa mère) Everett écrit puis enregistre Electro-Shock Blues qui évoque ces événements particulièrement difficiles. L'album ne sera pas à la hauteur des attentes commerciales du label, mais le groupe se rachète une crédibilité. Suivront alors Daisies of the Galaxy où le groupe affirme sa personnalité tout en continuant à draîner un public toujours très présent, puis Souljacker en 2001. Plus radical, ce nouvel album déroute les fans et la critique, mais encore une fois, Eels parvient à se démarquer de toutes ces vagues successives de combo rock radiophoniques qui déferlent en massent sur les USA. Et surtout, quoiqu'on en dise, "E" continue de faire ce que bon lui semble. Après un album de blues relativement calme et posé (Shootenanny, 2003) sort le double album Blinking lights and other revelations en 2005. Un disque au succès incontestable dont la tournée qui le suit fera l'objet d'un CD/ DVD live intitulé Eels With String Live At Town Hall. Et finalement, toujours à la croisée des chemins entre majors et circuits indé, Eels poursuit sa route, en outsider doué, parfois sous-estimé, mais qu'on aurait tort d'enterrer trop rapidement.

Eels / Chronique LP > Wonderful, glorious

Eels - Wonderful, glorious Un peu éreinté artistiquement après son épisode de boulimie créative ayant marqué le terme de la première décennies des années 2000, Eels et son omnipotent leader Mark Oliver Everett, qui avait entre 2009 et 2010 sorti pas moins de trois albums en à peu près six mois, a cette fois pris un peu son temps pour sortir son dixième opus long-format. Et s'est offert une liberté artistique nouvelle après avoir pressé son inspiration comme un citron, afin de passer cette fois à l'orange avec ce Wonderful, glorious aussi hétérogène que racé, paradoxalement collectif comme jamais (il a été composé à dix mains) et pourtant très "personnel" dans le songwriting. Malheureusement, ce n'est pas avec ce disque là qu'Eels va définitivement quitter le costume du groupe le plus mésestimé de la scène indie nord-américaine. Tant mieux?

La question mérite d'être posée. Parce que le statut d'outsider, en fait, il sied parfaitement à ce groupe capable d'ouvrir un album avec un titre du calibre de "Bombs away", ténébreux et chargé en nostalgie brisée en même temps qu'en intensité électrique. Difficile de ne pas se laisser tenter par les charmes vénéneux d'un morceau inaugural lesté en émotions brutes avant que le plus léger "Kinda fuzzy" ne vienne lui répondre avec une décontraction non feinte. On sent alors Eels capable de changer de tonalité comme de chemise, de registre aussi... comme de niveau de qualité. Quitte à devoir se farcir un "Accident prone" neurasthénique et franchement somnifère pour voir les enceintes subir les coups de reins et la fougue indie-rock fracassante de "Peach blossom" quelques instant plus tard. L'avantage, c'est de pouvoir être surpris agréablement, l'inconvénient, d'être inversement déçu et ce, sans prévenir. Mais au final, cela permet de retrouver le groupe en grande forme au moment où on l'attend le moins.

Par exemple avec un "On the ropes" chaleureux ou sur le très beau "The turnaround", quand Eels se fait le chantre d'un folk habité, parfois à la limite du crépusculaire mais constamment d'une classe folle ; avant de prendre d'assaut les enceintes en envoyant du gros rock bien cinglant dont les riffs ardents giclent sur la platine comme des geysers brûlants ("New alphabet"). Quand il s'agit de se payer une petite dose de gimmick-rock song bien pêchue ("Stick together"), Eels assure, quand vient le moment de faire succomber la plus glaciales des âmes congelées, les californiens font des miracles (le sublime "True original"). Sous-estimés les natifs de la Cité des Anges? Certainement, mais cela ne les empêche pas de savoir tout faire, comme servir un "Open my present" sauvagement bluesy porté par un groove de cramé, un "You're my friend" anecdotique ou de terminer un peu facilement en roue libre sur une note très lumineuse ("I am building a shrine", "Wonderful, glorious"). Mais on ne leur en veut pas vraiment parce qu'au fond, on sait bien que les vrais bons groupes ne sont pas toujours ceux que l'on veut nous faire croire. Et que ceux-là, ne déçoivent jamais.

Eels / Chronique LP > Blinking lights and other revelations

eels_blinking.jpg Je doute de l'impact, voire de la nécessité d'écrire des chroniques des albums de Eels. En effet, depuis le deuxième album (Electro-Shock Blues), l'évolution du groupe n'est plus suivi que par une poignée de fidèles dont, bien évidemment, je fais partie.
Lâchés par une partie de leur audience après le premier album et ensuite par leur maison de disque après le quatrième, personne n'aurait pu croire qu'ils pourraient quand même s'en sortir et poursuivre une carrière déjà fortement compromise. Je dis "ils" mais il serait plus juste de dire "il" puisqu'Eels c'est avant tout l'oeuvre d'un homme, ou je dirais plutôt d'un génie. E porte en effet à bouts de bras son groupe dont le line up est différent pour chaque cycle album/tournée. Sa musique se nourrit quasi-exclusivement de son "difficile" parcours personnel : soeur suicidée, mère décédée dans la foulée, père répondant aux abonnés absents... Tous ces ingrédients auraient pu donner naissance à une musique geignarde ou agaçante. Mais, et c'est là que réside tout l'intérêt de ce "groupe", c'est que sa musique, même dans les moment les plus durs, reste toujours d'une beauté, d'une simplicité saisissantes. Au fil des albums, E livre son désespoir, ses doutes, mais aussi les quelques instants de bonheur qu'il a pu partager avec sa "défunte famille".
Blinking lights and other revelations, sa dernière oeuvre, constitue quelques pages de plus de son journal intime musical. E a cette fois choisi de prendre son temps pour l'écriture, et nous livre un double album. Mais ne craignez rien, il ne s'agit pas ici d'un concept album lourdingue comme savent si bien le faire les champions du prog rock. L'album n'a pas réellement d'unité, d'ailleurs il compile des titres datant d'époques très différentes dans la vie du groupe. Je conseille aux plus impatients d'entre vous de commencer par les perles du disque("Blinking lights", "Suicide life", "Hey man", "Last time we spoke", "If you see Natalie") pour ensuite explorer les coins et recoins de l'oeuvre. Même si l'on entrevoit un peu de lumière au sein de tant de désespoir (certains textes pourront choquer par leur "sincérité"), l'album est à déconseiller aux dépressifs chroniques. Ou alors, ces derniers devront poursuivre leur écoute jusqu'au dernier titre, "Things the grandparents should know". Il s'agit d'un confession troublante de sincérité signée E dans laquelle il tente de justifier, ou du moins d'expliquer, que malgré tout il ne garde ni regret ni amertume devant toutes ces épreuves qui se sont dressées devant lui.
Ames sensibles ne pas s'abstenir.