artwork el cielo Lorsque l'on commence à parler de rock indé à tendance émotionnelle, difficile de faire en sorte que Dredg et son second opus, El cielo, ne reviennent pas sans cesse dans la conversation tant cet album du combo américain est considéré par nombre de mélomanes comme une sinon LA référence incontournable du genre. A tel point qu'il est une preuve de bon goût (et alors ?) que d'être un amateur de la formation emmenée par Gavin Hayes. En un mot comme en cent, Dredg est hype, selon le terme en vogue.
Certains diront que c'est bien joli tout ça, mais qu'au final, ça ne nous avance pas à grand-chose. Sauf à comprendre le contexte dans lequel va être décortiqué, décrypté et analysé l'émo-rock poétique du combo originaire de Los Gatos. Enfin, à condition d'être à la hauteur de cette chronique, ce qui n'est pas encore gagné, loin de là.
Accessible de par la grâce évidente des mélodies et du chant de Gavin Hayes, la musique de Dredg, bien que parfois un peu autocomplaisante, ne laisse que très difficilement indifférent. Si les quelques circonvolutions soniques à tendance expérimentales qui concluent le précédent album du groupe et ouvrent celui-ci peuvent être déroutantes, le groupe montre avec des titres, tels que les sublimes "Same ol' road", "Sanzen", "A triangle" et "Of the room", d'un talent évident pour l'émo-rock intense et les mélodies pop épurées.
Album au concept assez flou, El cielo se distingue par la fluidité de son tracklisting et la qualité de la production confiée à un homme qui ne fait pas vraiment ses premières armes avec cet album, puisqu'il s'agit de Ron St-Germain (Tool). On est frappé par l'absence de limite qui caractérise la musique de Dredg mais également par cette mélancolie douce ("Sorry but It's over", "18 people living in harmony") qui se dégage des 16 titres qu'il recèle. Des morceaux fouillés et aboutis, aux structures qui laissent une grande liberté d'exploration sonore au groupe, lequel ne s'en prive pas et livre ainsi un album qui navigue à vue entre les sonorités légèrement métalliques digne d'un A Perfect Circle et les mélodies pop de Radiohead, en s'offrant le luxe d'un petit détour par l'univers de Lisa Gerrard et Dead Can Dance ("An elephant in the delta waves"). Entre rock émotionnel intense, pop douce et mélodieuse et ambiant légèrement atmosphérique, Dredg livre quelques petites perles incontournables tels que la ballade romantique néo-classique pour piano et violon "A walk in the park" ou le déchirant "Whoa is me", titre pour lequel le groupe se permet quelques incursions jazzy saxophoniques. Emouvant et intemporel.
Parce que même El cielo doit avoir une fin, Dredg nous gratifie d'une dernière offrande avec le modèle d'orfèvrerie qu'est "The canyon behind her". Une dernière respiration, un ultime soupir et ce morceau termine l'album dans un écho en prolongeant un peu plus le rêve éveillé dans lequel les natifs de Los Gatos nous avaient plongés. Entre subtilité, fébrilité et intensité mélodique rarement égalée, Dredg livre avec El cielo un album organique, envoûtant et métaphorique, d'une pureté et d'une beauté incomparable. Touché par la grâce. Certainement l'un des meilleurs albums émo-rock jamais composé.