Rock Rock > dEUS

Biographie > De us de couette

Le groupe se forme à Anvers en 1991. Le premier line-up comprend Tom Barman (chant, guitare), Steff Kamil Carlens (basse), Julle De Borgher (batterie), Klaas Janzoons (violon) et Rudy Trouvé (guitare). La formation se produit alors dans les petits clubs belges avec des reprises acoustiques du Velvet Underground, des Pixies, ou encore Neil Young. Il signe un maxi intitulé Zea en 1993 et commence à se produire à Londres en première partie de Girls Against Boys. Il décroche un contrat avec Island Records et enregistre en 1994 son premier album Worst case scenario. Le groupe rencontre alors un succès colossal en Belgique.

L'année suivante, dEUS signe My sister, my clock. Alors que Stef Kamil Carlens a déjà quitté le groupe pour s'occuper à plein temps de Zita Swoon, peu après la sortie de ce disque, Rudy Trouvé fait également ses bagages. Ils sont remplacés par Craig Ward à la guitare et par Danny "Cool Rocket" Mommens à la basse. dEUS repart en studio et enregistre In a bar, under the sea (1996), certainement l'album le plus expérimental du groupe. Suit, en 1999, l'album The ideal crash. En 2001, une compilation des plus grands titres de dEUS voit le jour, No more loud lusic.

En septembre 2005, après six longues années d'absence, et l'arrivée de Stéphane Misseghers (Soulwax, Vive La Fête!), Alan Gevaert (A Noh Rodeo, Charles And The White Trash European Blues Connection) et Mauro Pawlowski (Evil Superstars, Kiss My Jazz), les Belges sortent Pocket revolution et ne nous font pas patienter trop longtemps puisque Vantage point, album enregistré à la maison, débarque au printemps 2008. En septembre 2011, dEUS sort Keep you close, un disque marqué par la participation entière du groupe à la composition contrairement à avant où Tom Barman avait les cartes en mains.

Review Concert : dEUS, dEUS à l'Élysée Montmartre (mars 2023)

Exposition photos : dEUS, Federica Agamennoni (oct. 2009)

Interview : dEUS, Interview avec Stefan Misseghers (fév. 2023)

Interview : dEUS, Ted vs Tom (avril 2008)

dEUS / Chronique LP > How to replace it

dEUS-How to replace it Neuf. C'est le nombre d'albums que compte l'un des plus emblématiques groupes de rock belge, j'ai nommé dEUS. Neuf albums depuis 1994, année marquant la sortie de ce toujours aussi bon Worst case scenario, dont on fêtera les 30 ans l'année prochaine. Que le temps passe vite ! Comme cette absence de sortie discographique de onze ans, depuis un certain Following sea, LP surprise à l'époque (devenu disque d'or en Belgique) apparu des mois après un Keep your close mi-figue, mi-raisin, ayant eu pour seul but de s'excuser auprès des fans de n'avoir "livré que 9 titres en deux ans". La quantité ne fait pas toujours la qualité, les fans de la première heure de dEUS sont, il me semble, bien placés pour le savoir. Car l'après Pocket revolution, excellent album témoin d'une période plutôt trouble pour les Belges, n'a pas toujours répondu aux attentes. La faute à des choix divers déjà relatés plusieurs fois sur nos pages, comme la volonté de surproduire les morceaux (notamment sur Vantage point), ou ce manque de flamboyance d'antan, d'inspirations, de ces étincelles électriques qui rendaient dEUS si unique et jouissif. Pourtant, certains artistes vous diront : "Mais tu ne peux pas t'imaginer à quel point il est difficile de ne pas se répéter". Ils n'ont sans doute pas tort.

How to replace it et le retour de la bande de Tom Barman est donc l'un des évènements musicaux le plus attendu de l'année. Pendant ces onze années, le groupe n'a pourtant pas vraiment chômé. Un best-of, Selected Songs : 1994-2014, est venu garnir leur discographie, plusieurs tournées réussies dont le Soft Electric Tour et celle des vingt ans de leur album culte Ideal crash, des sides projects (une expo photo et le projet jazz de Tom, TaxiWars, la carrière de producteur de Stéphane), le départ en 2017 puis le retour inattendu du guitariste Mauro Pawlowski, etc... Et puis, des évènements éprouvants plus personnels comme les divorces de Tom et Klass. Le chanteur-guitariste reconnait d'ailleurs que les traces laissées par son divorce et certains soucis traversés dans sa vie privée ont nourri l'écriture de How to replace it. Cela donne souvent de beaux résultats, soit dit en passant. L'ambition de dEUS avant de réaliser ce nouvel album n'était pas de faire table rase du passé mais de lui donner de la légèreté, du rythme, de la lumière de la spontanéité. Au départ, on a eu du mal à les croire, la durée du disque n'étant pas loin d'égaler l'heure avec ses douze titres, on s'attendait à quelque chose de dense voire répétitif. Puis, en le découvrant, en creusant un peu tout ça, on a commencé à avoir des clés de compréhension sur leurs envies initiales, et dans le même temps, s'est confirmé quelques craintes qu'on avait sur le quintet.

dEUS n'a pas perdu son inclination à donner du volume à ses compositions. Dès l'introductive "How to replace it", battant la mesure avec ses timbales reprises au thème "Aujourd'hui c'est toi" de la B.O d'"Un homme et une femme" de Claude Lelouch, les Anversois montrent leur amour pour la théâtralité et les arrangements. Cet album ne pouvait pas mieux commencer. L'efficace et mélodique hit "Must have been new" enchaîne sur la platine et sert de thérapie pour Tom, bien accompagné aux chœurs par un trio féminin soul jouant sur les émotions. Les choses commencent à être intéressantes avec "Man of the house". Moins radiophonique, ce titre nous cloue au sol avec cette basse électro et sa lourdeur rock imposante. C'est tout le contraire sur "1989" qui met en avant la sensualité et la légèreté sur des sonorités 80s. Menée par des synthés et un beat programmé, cette pop spatiale évoque la nostalgie à coup sûr, et même si ce morceau n'est pas le meilleur de l'album, il a le mérite d'introduire une petite respiration appréciable, d'autant plus avec l'agréable voix de Lies Lorquet de Mintzkov en accompagnement. "Faux bamboo" qui suit est peut-être le premier faux-pas de l'album, une chanson pop bien écrite mais un peu trop conventionnelle à mon goût.

C'est une ambiance feutrée comme on les aime que propose "Dream is a giver", nous rappelant le titre éponyme de Pocket revolution, avec moins de tension cependant et un flow haché pas si courant que ça chez dEUS. On poursuit avec un titre encore calme nommé "Pirates" qui est un peu calqué sur le même modèle que son prédécesseur, plus rythmé et plus dispensable. Bien que son final soit exaltant, on touche peut-être là le ventre mou du disque. Mais pas pour longtemps, car le morceau suivant, "Simple pleasures", est le plus captivant et ensorcelant du disque. C'est l'un de ses plus beaux bijoux car on y retrouve une ambiance aventureuse parfaite pour se trémousser, quelque part entre jazz et funk, et totalement libérée du carcan de la pop balisée où se refugiait la formation quelques titres auparavant. Les Belges reviennent en force à ce moment-là et lâchent un "Never get you high" doté d'une écriture pop sensuelle avec ses rythmes chaloupés, ses orchestrations et chœurs généreux mais pas trop. "Why think it over (Cadillac)", quant à lui, a tout du tube explosif. On n'est pas loin de certains morceaux d'Arcade Fire avec son refrain accrocheur et obsédant, et on perçoit le plaisir pris par le groupe lorsqu'il joue ce morceau. Du coup, c'est contagieux. Après ces réjouissances, les oreilles se reposent sur "Love breaks down", une ballade bouleversante qui ne peut que nous toucher.

Plus on se rapproche de la fin, plus How to replace it devient saisissant. On se dit alors que le final va être magistral. Cet épilogue se nomme "Le blues polaire", chanson parlée et chantée en français, qu'on peut instinctivement relier à "Quatre mains" du disque précédent. Sauf que là, rien de bien Gainsbourgrien à l'horizon. Ce titre construit comme un scénario de film de la Nouvelle Vague pourrait nous toucher aisément (le concept, le bon travail instrumental), mais son refrain peu inspiré me ramène à l'air de "Laisse-moi kiffer la vibe avec mon mec" de Diam's (qui elle-même l'a repiqué au ¿Quién será? de Pablo Beltran Ruiz). Et là c'est le drame, je suis alors dans l'incapacité d'écouter le morceau sans que mon cerveau soit pollué par cette immondice de la variété française. Cela n'enlève en rien la qualité de ce nouvel album, mais c'est dommage, surtout avec cette surprenante idée de finir avec une composition qui sort un peu du format des autres.

Il ne vous reste plus qu'à plonger dans ce How to replace it qui, en somme, fait remonter un peu le dEUS post-Pocket revolution dans notre estime. Si ces rois de la mélodie pop et du rythme savent y faire en la matière, peut-être faudrait-il être plus concis à l'avenir, proposer des formats plus court (35-40 min au lieu de 55) et être moins ambitieux. Après 11 ans d'absence, on comprend dans le même temps que dEUS ait eu le besoin de se rattraper vis-à-vis de ses adorateurs. Mon conseil au groupe : sortez vite un nouvel album !

Publié dans le Mag #55

dEUS / Chronique LP > Following sea

dEUS - Following sea "L'idée d'attendre des mois avant de publier de la musique est tellement dépassée.". Soit. Il y un mois, les belges de dEUS décident à la surprise générale de sortir un nouvel album, neuf mois après le décevant Keep you close. Une envie urgente de dépoussiérer les fonds de tiroir ? La peur de voir ces morceaux prendre un coup de vieux sur le prochain disque ? Un vrai faux cadeau offert aux personnes qui continuent allègrement de suivre les aventures des Anversois ? Non, Tom Barman assume avoir eu "honte d'avoir livré neuf titres en deux ans". Ces dix nouvelles offrandes compilées sur Following sea sont l'occasion pour nous de vous livrer nos tops et nos flops. C'est parti !


Nos tops :

"Quatre mains" : La belle surprise de découvrir une chanson en langue française, une vraie première pour les Belges (si l'on omet d'ajouter l'expérience live piano-voix de Tom Barman avec Guy Van Nueten en 2004). Comment ne pas penser au Gainsbourg des années 80 lorsqu'on écoute le phrasé talk-over de Barman ? Cinq minutes d'une dynamique dont la noirceur envoute inlassablement.

"Hidden wounds" : Voilà le genre de couplet parlé et jouissif qu'on ne trouve plus beaucoup chez dEUS, telle une confession lancinante qui franchit progressivement les limites d'une pop enchanteresse.

"Girls keep drinking" : Guitare funky, basse ronde, flow assuré, le groove ensorcelle sans artifice. L'effet est direct, certes déjà-vu mais quand c'est bon, c'est Bonduel !, inutile de se voiler la face.

"Nothing" : Ballade fragile aux guitares über cristallines, telle une caresse dans les cheveux. Une cousine éloignée de "Little arithmetic" (In a bar, under the sea) qui est malheureusement trop courte à notre goût.

"Fire up the google beast algorithm" : Sans conteste, le meilleur titre de l'album ! Tout y est : l'énergie, la créativité, des putains de vocalises entrecroisées. Un véritable coup de semonce qui vient balayer, sur un trop court instant (à peine deux minutes), certains regrets qu'on peut avoir sur cet album.

"One thing about waves" : Plus de six minutes pour un morceau qui s'annonce comme épique ou qui en a tout l'air. Aérien dans le fond, répétitif dans la forme, il monte en régime progressivement met en perspective les enchevêtrement des instruments sous la coupe d'un Tom Barman dont la forme vocale est rassurante. Mais qui pouvait en douter ?


Nos flops :

"Siren" : Ou comment replonger dans les affres de ces pop-songs à la mélodie facile. Avalée puis recrachée. Le même effet qu'un "Ghost" sur Keep you close, pour situer.

"The soft ball" : Poussif et lissé, ce titre n'aura que l'avantage d'apporter un peu de couleur à l'ensemble de ce disque. Son aigreur domine largement les débats.

"Crazy about you" : Autre exemple de morceau manquant terriblement d'intérêt. Pas loin de la pop-song type d'un mauvais groupe américain de la fin des années 80, début des années 90. On se consolera en se disant que même les plus grands l'ont fait.

"The give up gene" : A la première écoute de ce morceau, le rythme fait étrangement penser à "Kiss" de Prince. L'idée est initialement bonne mais le problème réside dans le fait qu'on côtoie le vide avec en guise de décoration sonore des tests de sons de claviers tout naze. Véridique !


Disque inégal touchant à la fois les cieux comme le fond, Following sea est un peu à l'image du groupe qui, ces dernières années, nous a habitué à ce genre de disque où chaque bonne surprise se traduit presque comme un exploit. C'en est devenu irritant à la longue.

dEUS / Chronique LP > Keep you close

dEUS - Keep you close Avec la sortie en 2008 de Vantage point, dEUS nous avait laissé sur notre faim avec en cause un dernier tiers en dent de scie mais également des morceaux discutables s'éloignant peu à peu de la griffe des débuts, le tout chargé d'une production pour le moins luisante. Dès les premiers airs de violon du morceau éponyme de ce Keep you close, nous tombons les deux pieds dans les propos tenus auparavant. Propre et exaltée, la pop des belges a des allures d'élégance certaine, surtout lorsqu'elle mise en valeur par des chœurs et par la voix légèrement éraillée de Tom Barman, mais vient souvent se buter sur des titres sévèrement poussifs. Sans renier le travail impeccable des arrangements et la volonté de varier les sonorités instrumentales avec de jolies mélodies de cordes, de piano et autres vibraphone, dEUS sait aussi tirer son épingle du jeu en sortant de bons titres dont eux seuls ont le secret. Ainsi, "The final blast" et "Dark sets in" sont ces exemples de ballades envoutantes qu'on n'ose plus beaucoup espérer des belges de nos jours et qui auraient très bien pu avoir leurs places sur Pocket revolution, époque où le combo voyait une grosse partie de son effectif renouvelé.

Le groupe évolue vers le musicalement correct, s'impose des limites stylistiques balayant d'un trait toutes sorties de routes, cette folie d'antan qu'on ne retrouvera jamais sur "Twice (we survive)" ou "Ghost", deux titres plutôt ennuyeux. "Constant now" est un beau constat de cet album, de bonnes idées gâchées par un couplet quelconque entaché de notes de pianos superflues mais au refrain paradoxalement excellent et entrainant. Mais le pompon est définitivement décroché sur "The end of romance" où la sensualité de Barman s'exécute en mode talk-over et devient une véritable caricature fleur bleue. Le nouveau disque des belges connaît toutefois quelques belles envolées, certes rares, comme sur "Easy" où les structures deviennent tout de suite plus alambiquées. Malheureusement, les tubes épiques et jouissifs chez dEUS n'existent plus vraiment et ont été remplacés par cette espèce de grandiloquence pop souvent imbuvable. Keep you close est une vraie déception et, croyez le bien, ce n'est pas une partie de plaisir que de se voir l'écrire tant les Anversois ont été brillants auparavant.

dEUS / Chronique LP > Vantage point

deus : vantage point Avec une formation intacte depuis l'album précédent, fait rare chez dEUS, on pouvait s'attendre à voir les Anversois nous pondre un album se rapprochant de Pocket revolution. Album attendu au tournant, Vantage point, le cinquième album du groupe a été, pour la première fois, enregistré à la maison chez Klaas Janzoons, le violoniste du groupe. Moins de pression, plus de temps, gain financier : des avantages non négligeables laissant penser que les flamands pourraient expérimenter de nouvelles choses. Au lieu de ça, dEUS délaisse la complexité et met le paquet sur la production, le travail des sons et des arrangements. Et ce n'est pas un hasard lorsque l'on connaît le travail de Dave McCracken (Depeche Mode, Faithless). Résultat : une quasi-surproduction qui camoufle la simplicité des compositions avec des effets, des claviers et des choeurs à tout-va. Certes, les mélodies sont jolies et la voix de Barman toujours aussi attirante, mais leur nouveau répertoire sonne de plus en plus pop "radiophonique" à l'image de "The Architect" ou de la jolie ballade "Eternal woman".
Les Belges gardent néanmoins leur énergie pour des titres tels que "Oh your God, "Is a robot" et "Favourite game". Ceci dit, cette production n'enlève en rien la patte dEUS. On reconnaît le groupe dès les premières notes mais il s'éloigne doucement de ce qui faisait son originalité il y a encore quelques années. Les premières écoutes de Vantage point sont probablement les plus difficiles car il faut arriver à cerner cet album rempli de sons et d'effets. Par contre, une fois l'oreille fidélisée, on se rend compte finalement que ça file très vite. En effet, une fois passé le cap des 7 premiers titres mêlant chansons à la fois groovy, rock et pop, dEUS termine son opus avec 3 titres en manque d'inspiration (surtout "Smokers reflect" et "Popular culture"). Et ce n'est pas les invités de l'album (dont Karin Dreijer Andersson de The Knife et Guy Garvey d'Elbow) qui, à eux seuls, réussiront à relever le niveau. Il est certain que Vantage point laissera un goût amer aux fans exigeants de dEUS, comme une légère impression d'inachevé. Heureusement pour eux, les chansons de cet album passent beaucoup plus facilement en live, l'énergie de la scène aidant. Est-ce une erreur de parcours ? L'avenir nous le dira.

dEUS / Chronique LP > The ideal crash

deus_the_ideal_crash.jpg 3 ans. C'est le temps qui sépare The ideal crash d'In a bar, under the sea. Que s'est-il passé durant cette période pour dEUS, qui avait pris l'habitude de sortir un album par année? Un des piliers de la formation, Stef Kamil Carlens (basse, chant), parti pour s'occuper à temps plein de Zita Swoon, a été remplacé par Danny Mommens (Vive la Fête), les flamands enchaînent les dates de concerts et prennent le temps de se remettre à la composition. Pour leur troisième LP, la bande à Tom Barman s'envole en Andalousie, à Ronda plus exactement, en compagnie de David Bottrill, connu pour avoir produit Tool, Mudvayne, Muse ou Coheed and Cambria. Comme Radiohead avec son Kid A, cet album signé dEUS marque une nouvelle ère dans la carrière du groupe. Fini les chansons hétéroclites, "fourre-tout" et place à des structures musicales plus classiques et plus linéaires. Une belle remise en question (dûe aux départ de Stef ?) et un travail de huit mois qui porte ses fruits. L'écriture des morceaux et la production sont des plus soignée. Les belges nous livrent un disque indie-pop-rock avec des mélodies somptueuses ("The magic hour", "Sister Dew", "Magdalena"), des rythmes intéressants ("Put the freaks up front", "The ideal crash"), un peu d'électro ("Everybody's weird", "Dream sequence #1"), des guitares qui crachent ("Instant street") et plus encore, le tout orné de la sublime voix de Tom Barman et des choeurs. Mention spéciale à la langoureuse The ideal crash avec son rythme syncopé ininterrompu et ses sons qui viennent se coller les uns sur les autres et le chef d'oeuvre nommé "Instant street" qui débute sur un air de bossa avec du banjo pour se terminer avec une superpositions de riffs de guitares apocalyptique laissant une belle chair de poule sur son passage. The ideal crash (dont la pochette n'a pas été réalisée par Rudy Trouvé, une première !) est un album magistral salué par la critique et par les pairs (Radiohead notamment) que tout bon fan de rock et de mélodies se doit d'avoir dans sa discothèque. dEUS garde bien avec cet album son statut de "meilleur groupe belge de rock".

dEUS / Chronique LP > In a bar, under the sea


deus_in_a_bar_under_the_sea.jpg Avant d'appréhender un disque de dEUS, il est plus que nécessaire de s'intéresser au mouvement du line- up qui a entouré l'indéboulonable et génial Tom Barman. Exit donc Rudy Trouvé (auteur de la pochette), welcome le guitariste écossais Craig Ward. Exit également les murs de distorsion pour un son d'ensemble plus aéré et épuré où les guitares et justement les distorsions sont utilisées avec beaucoup plus de parcimonie, d'ingéniosité et de variété dans leurs interventions. Le son de dEUS a évolué. L'EP My sister = my clock avait été un sacré avertissement sur la trajectoire qu'allait prendre le groupe anversois sur l'album à venir : celle de l'expérimentation et la fuite des normes établies. In a bar, under the sea est une invitation au voyage, un de ceux duquel on ne ressort pas totalement indemne. Un voyage à travers les contrées mais également à travers les époques. Bienveillant avec les repères de son auditeur, dEUS n'hésite pas à laisser quelques indices jalonnant ici et là l'album, à l'instar d'une voix-off signalant chaque escales lors d'un trip en locomotive à vapeur : l'intro de l'opus "I don't mind what ever happens" évoque le blues noir et nous immerge dans l'ambiance des rives du Mississipi, "Theme from turnpike" dont certains samples semblent inspirés par l'oeuvre d'Ennio Morricone et les percussions amérindiennes hypnotiques sentent bon la pluie invoquée par la danse rituelle et le Far-West. Certaines sonorités de "Serpentine" pourraient illustrer un reportage sur les quartiers de China Town tandis que la trompette et le piano langoureux de "Nine threads" nous ramènent à la belle époque des bars de jazz enfumés de la Nouvelle-orléans. Enfin, "Wake me up before I sleep" et sa guitar slide "hawaiisante" nous laissent à penser que la plage d'Honolulu n'est pas si lointaine que ça. En cela, le groupe semble célébrer les différentes facettes et la diversité des cultures de ce melting-pot que sont les Etats-Unis. Diversité dans les ambiances donc, mais diversité également de par les styles abordés par le groupe : In a bar under the sea est un album caméléon qui flirte tour à tour avec le blues, la pop, le jazz, le rock, le punk. dEUS ne se prive pas pour développer également un goût très prononcé pour une musique aux orientations progressives (cinq morceaux au dessus de la barre des 5 minutes). Le mot "compromis" n'existe pas dans le vocabulaire de Tom Barman et de sa bande, ils font ce qui leur chante et c'est tant mieux pour nous parce ça fonctionne à merveille. Dès lors, difficile de ne pas penser à un savant mélange de tout un tas de groupes ou de personnalités qui ont marqué le petit-monde de la musique rock : David Bowie pour le coté caméléon insatiable de découvertes, Frank Zappa pour cette addiction aux prises de risques et la "je fais ce que je veux de ma musique" attitude, le Velvet Underground pour cette propension à produire des morceaux de pop classieuse où l'électricité reste toujours présente. Jamais indigeste (quinze titres s'étalent pourtant sur une heure de musique), souvent passionnant, ce In a bar under the sea se savoure avec une délectation croissante. Grâce à sa richesse, l'excitation et la curiosité de l'auditeur semblent vouées à un éternel renouvellement. En 2005 est sorti Pocket revolution mais rétrospectivement, c'est réellement sur ce In a bar, under the sea sorti en 1996 que dEUS a entamé sa petite révolution. Elégant et brillant, racé et inspiré : pas très loin du chef d'oeuvre.

dEUS / Chronique LP > Pocket revolution

deus : pocket revolution Avec un line-up encore complètement renouvelé (seuls le chanteur Tom Barman et son violonniste Klaas Janzoons faisaient partie du groupe lors du dernier enregistrement) et une absence de six ans, on aurait pu s'attendre à une petite révolution dans le monde de la musique indé belge. Il n'en est rien. Nous retrouvons dEUS exactement là où nous les avions laissés, ou presque.
Pour ce nouvel opus, le groupe s'est entouré de quelques uns de ses guests habituels (Stef Kamils Carlens, Craig Ward, Danny Mommens) : un lien avec le passé qui jalonne Pocket revolution et l'inscrit un peu plus dans l'évolution d'une formation, qui, avec déjà quinze ans de scène, a depuis longtemps fait preuve de maturité.
Les Belges ont définitivement laissé de côté les expérimentations de In a bar, under the sea et restent dans la ligne de The ideal crash.
L'album s'ouvre sur Bad Timing, chanson-marathon de sept minutes, format auquel le groupe nous avait habitué. Le timbre éraillé de Tom Barman modèle des pétites pop, qui, de "7 days, 7 weeks", le premier single, à "Include me out", devraient réconcilier tous les déçus de la pop que je connais avec la pop douce amère, loin des clichés dégouliants de bons sentiments. Des Stones à Bowie, la culture pop-rock-punk de différents membres du groupe se fait imperceptiblement sentir d'un bout à l'autre l'album ("Cold sun of circumstance").
Les guitares sont plus que jamais présentes et viennent électriser le son de dEUS. La structure se construit toujours sur une même base : une introdution sur du velours bercé par un Tom Barman au ton juste, avant l'explosion de guitares parfois noisy ou saturées, jamais trop en avant ("If you don't get what you want").
Les Belges ne nous ont donc pas berné en nous annonçant cette petite "Révolution de poche" (elle était un peu facile). Une révolution dans la continuité.