Contractions, quesako ? Une association de malfaiteurs du côté de Lyon/Besançon, qu'on n'imaginait pas forcément rassemblés dans le même bastion. Jugez plutôt ; Julien, guitariste/chanteur de Daitro (screamo) et Bâton Rouge, Buanax, batteur de The Irradiates (surf) et Lopin, bassiste de Whoresnation (grindcore), auxquels il faut rajouter sur ce disque, Macst, guitariste de Red Gloves (indie punk) mais aussi The Irradiates. Ca va, vous arrivez à suivre jusqu'ici ? Bien. Et encore, je n'ai pas mis tout leur pedigree.
Ces messieurs ensemble font donc une espèce de garage pop, chanté en français, dont je ne saurais trop mettre des noms de groupes en comparaison mais une chose est certaine, ça fonctionne à mort et il n'est pas question de les laisser dans l'indifférence générale. La première démo (en K7, mais quelle idée !?) m'avait déjà bien bluffé et c'est un doux euphémisme de dire que j'attendais l'album avec impatience. Bon bah, j'ai pas été déçu. Le niveau est encore monté d'un cran, pour ce qui est de la production, de l'écriture et de l'efficacité des morceaux. Une rythmique imparable de bout en bout, quelques accords et arpèges simples mais savamment trouvés, un chant quelque peu éraillé permettant de ne pas sonner varièt', un ton légèrement mélancolique et le tour est joué. L'album s'intitule Demain est annulé et sera dans mon top de fin d'année, malgré son programme pas franchement réjouissant. À ce propos, on sent qu'il a été écrit sur fond de crise et luttes sociales, en y faisant référence directement ("Rien n'est acquis") mais aussi indirectement par le biais de la gentrification avec le très bon "Trace en ville". Le mouvement est également un thème de prédilection des chansons mais à l'image du groupe, sans jamais se contenter de la facilité, en sortant des sentiers battus ("Passe par le détour") et par moments, tout va trop vite, sauf les heures de labeur ("Un jour qui traîne"). Derrière ces constats, ces désillusions, peut néanmoins encore apparaître une lueur d'espoir, comme sur l'excellent "Touché, le fond" ("n'oublie jamais que la lumière, dans les fissures, renaît"). Attention quand même, après une écoute répétée, on est à deux doigts d'enfiler son gilet jaune ("Y aura plus rien à perdre, faudra juste changer de ton"). Mais un jaune moutarde marbré comme la couleur du magnifique vinyl, quand le cd se présente lui, en version digipak, le tout empaqueté dans un artwork retro moderne.
Publié dans le Mag #40