notre rage n'est pas perdue Le cauchemar du nucléaire, énergie décriée depuis ses débuts par une poignée de philosophes mais promue unilatéralement par l'establishment étatique, industriel et militaire, combattue ensuite par des militants chevronnés, continue de s'abattre telle une fatalité sur l'ensemble du globe et plus intensivement à certains endroits de celui-ci. Parmi ces endroits, se trouve Bure, paisible village du sud du département de la Meuse, justement choisi par sa faible population et par ses couches géologiques prometteuses aux yeux (non éborgnés) des autorités de gestion des déchets nucléaires, l'ANDRA. Des couches géologiques sondées et étudiées afin d'y enfouir des déchets issus des centrales nucléaires, chose dont la collectivité ne sait que faire. Pour l'anecdote, il se dit que les strates d'argilite présentes dans le sous-sol meusien sont semblables à celles présentes sous le siège de l'ANDRA en banlieue parisienne. Contre tout cela, des activistes mais aussi de simples citoyens et même des élus locaux se sont levés en Meuse ou ailleurs. Mais qui se lève prend le risque de se faire bousculer ou de tomber. Et c'est bel et bien ce qui est arrivé à nombre d'entre eux -bien avant que la France n'attrape la jaunisse- pour qui l'existence s'est dernièrement compliquée depuis que la Justice s'est intéressée à leurs activités et tout simplement à leurs vies.

Pourquoi un si long préambule ? Parce que ce qui était dénoncé hier et passait pour être hérétique est en train de devenir la réalité de demain, parce que certains éléments méritent d'être remis dans leur contexte et parce que cet objet est une compilation de soutien, à l'image de la précurseure Enragez vous !, de l'anti-carcérale In the spirit of total resistance ou de l'internationaliste El libertario.

Afin d'apporter un « soutien aux inculpés de Bure », pas moins de 25 groupes différents, signe de générosité et de diversité, ont donc répondus présents à l'appel de deux collectifs (Blast et ALHM) et d'un label (General Strike : Cartouche, Nevrotic Explosion, Brigitte Pop, ...). Ainsi, les 76 minutes de la galette sont investies aussi bien par des vétérans du mouvement punk-rock (Heyoka avec une version acoustique, Bérurier Noir avec un remix, Ludwig Von 88 avec le bien nommé "Fire" et même Psycho Squatt qui s'étire durant 6 minutes avec "Déforester" ou encore Attentat Sonore) que par des formations habituées de la scène alternative (Los Tres Puntos et son ska-punk, 22 Longs Riffs et son punk à tendance street, 8°6 Crew et sa sauce ska, Les Ramoneurs de Menhirs et leur formule punk-bretonne, Banane Metalik et son original gore 'n'roll ou Les Clébards et leur authentique punk-musette). En plus des revenants nés au milieu des 1990's que sont ZSK et Les Partisans, on notera la présence de groupes ayant dernièrement mis un terme à leurs activités (les excellents The Decline! et Edouard Nenez et les Princes de Bretagne avec son caustique "Quechua on a ?") ainsi que celle du trio de potes constitué par Guerilla Poubelle, Diego Pallavas et Justin(e) (les deux derniers ont partagé un split sur le label tenu par les premiers, vous suivez ?).

Parmi les formations plus confidentielles se trouvent des "débutantes", même si la plupart d'entre-elles a déjà au moins un album au compteur : il s'agit des Langrois de The Black Peppers (punk-hardcore), Stéphanois de Zone Infinie (punk-rock), Messins de Recidive (speedpunk) et Dijonnais de The Berbiseyans (reggae). En guise de (très bonnes) découvertes, on soulignera les performances de Radiocrimen et d'Accidente, combos respectivement Bilbayens et Madrilènes, qui insufflent un punk chaleureux en provenance d'outre-Pyrénées. Enfin, la mission d'achever la tracklist de cet explosif objet sonore a été confiée aux énigmatiques Black Birds qui (se) font plaisir avec un "92451" certes rudimentaire mais entraînant.

Près de 35 ans après que l'individuelle rage du "malheureux renard" des Bérus ait été chantée pour la première fois (sur Concerto pour détraqués), cette rage devenue collective sur la pochette de cette compilation s'allie désormais à tous les anti-nuke qui se sont mis à scander un peu partout et en toutes circonstances qu' "On ne nous atomisera jamais !".