Seb, guitariste, chanteur et géniteur de Catchlight profite de quelques moments perdus durant ce confinement pour répondre à nos quelques questions sur leur nouvelle œuvre (n'ayons pas peur des mots) qui traite, comme par hasard..., du sujet.
On débute cette interview avec l'actualité et le confinement, qu'est-ce que ça change dans la vie du groupe ?
Comme tout le monde, on avait des concerts de prévus, un planning pour l'année qu'on a dû revoir. On a dû annuler nos répètes, mais on va certainement en profiter pour composer la deuxième partie de Helios.
Vous composez plus ?
La plupart du temps c'est moi qui compose. Dans le cadre du confinement, il arrive que les autres m'envoient des idées de riffs ou d'ambiance et j'essaie de les assembler. Généralement je fonctionne à l'inspiration. J'essaie d'éviter de forcer les choses. Du coup on prend notre temps malgré le confinement.
Vous jouez avec des logiciels pour vous accompagner ?
Il se trouve qu'on travaille avec Cubase et tout un tas de plug ins finalement assez classiques qu'on retrouve souvent. C'est vraiment bien d'avoir de bons outils, même si finalement ce qui compte c'est ce qu'on en fait.
Qu'est-ce qui te manque le plus dans les répét' ?
Je dirais, l'énergie. Composer chez soi c'est super intéressant, voire introspectif, mais il y a un autre degré de communication et d'empathie lors des répèt'. C'est pas du tout la même énergie, et c'est d'ailleurs encore très différent en concert.
Vous démarchez encore les salles pour plus tard ?
Bien-sûr, même si c'est moins évident de prévoir à moyen terme. Non seulement parce qu'on ne sait pas avec certitude quand les concerts pourront reprendre, mais il y a aussi de grandes chances pour que les annulations diverses influent sur le paysage musical et associatif au sortir de la crise.
Vous deviez partir jouer en Europe de l'Est, c'est reporté ?
Oui, on devait partir du 17 au 26 avril. On devait passer par la Suisse, la Bulgarie, le Kosovo. Les circonstances nous ont effectivement contraints à annuler. Actuellement nous essayons de reporter la tournée sur le mois d'octobre, mais si certaines dates ont été confirmées, il y a encore pas mal d'inconnues.
Comment s'est organisée cette mini tournée ?
Nous avons fait appel à Nicolas de Ziker Booking qui a fait un super boulot. Il a été à l'écoute de nos demandes et nous a fait des retours réguliers sur l'avancement des dates. On s'est aussi vus régulièrement en personne pour discuter étant donné que nous sommes Lyonnais, ça facilite les choses.
C'est l'occasion de réécouter de la musique, quels albums t'as pu réécouter ?
C'est assez éclectique. J'ai découvert Fool's Ghost, qui m'a vraiment plu et transporté. Sinon, je me suis réécouté le tout premier A Swarm Of The Sun qui reste un chef-d'œuvre absolu dans le genre. Étrangement, j'écoute moins de métal qu'avant et j'aime bien écouter du hip hop français ou étranger également comme Dope DOD, Aesop Rock ou Scylla par exemples.
Le vôtre est sorti en fin d'année dernière, comment a-t-il été reçu ?
Plutôt très bien. Les retours que nous avons eu ont été vraiment positifs. On avait une certaine appréhension, c'est notre deuxième album et on a fait certains choix comme celui d'inclure plus l'influence post-rock/metal dans les compos, ou de créer une ambiance répétitive et hypnotique très électro pour "Cyclops" qui se trouve être le morceau le plus long de l'album. Et au final les retours on été plus que rassurants, voire même encourageants !
L'extinction de l'espèce humaine, c'est un thème récurrent dans la SF ou l'anticipation, l'actualité nous montre que ce n'est peut-être pas une fiction, tu es inquiet de voir votre l'idée de la base de votre histoire se réaliser ?
L'extinction finira bien par arriver et plus tôt qu'on ne pense. Il y a une certaine arrogance dans le fait de croire qu'on pourra y échapper. L'humanité donne l'impression de regarder la fin approcher sans vraiment réagir, mais l'environnement se charge généralement de nous rappeler à l'ordre. Là c'est un virus, une menace invisible et évidemment ça fait écho à l'histoire qu'on raconte, même si le virus en question est d'ordre "numérique" dans notre univers. J'espère seulement qu'on réagira plus vite et qu'on sera moins arrogants que l'humanité décrite dans notre histoire, même si j'en doute.
Prog métal et SF, c'est un peu un couple stéréotypé, ça ne vous dérange pas de vous enfermer dans ce modèle ?
C'est vrai qu'on en voit beaucoup. Après, on évolue dans une branche du prog assez émotionnelle avec une grande place laissée au chant. On voit éclore un peu partout des groupes de djent au son ultra léché, numérique et froid très propice à un univers SF ou encore des groupes instrumentaux qui invitent au voyage, je pense aux excellents Hemelbestormer par exemple. Je pense que nous avons une démarche encore différente en mettant l'émotion au centre du récit. De plus, notre univers ne s'arrête pas à la musique et j'écris l'histoire sous forme de nouvelles illustrées sur le site du groupe.
Cette "part one" en appelle d'autres, est-ce que le Covid-19 va influencer l'écriture ou tout est déjà prêt ?
J'ai déjà une trame générale. Je sais où je voudrais amener mon récit. Après, écrire une histoire sur de la musique et inversement, ça ouvre des perspectives parfois inattendues et il arrive que le récit prenne un tournant assez différent de celui que j'avais prévu au départ. C'est toujours en mouvement. Pour le Covid-19, je dirais que je n'exclue rien a priori, même si j'aimerais éviter de trop en faire une source d'inspiration. Je pense surtout qu'on aura bien assez de propositions qui iront dans ce sens, une fois "sortis" de cette crise.
C'est une œuvre qui dépasse le strict cadre musical notamment par les illustrations et la narration, il y a une existence de ce travail hors de la sphère musicale ?
Comme je te le disais, j'écris l'histoire sous forme de nouvelles, qui sont consultables sur le site via une section qui lui est dédiée. J'invite tout le monde à s'y rendre. La lecture ajoute une dimension à la musique et inversement. Tout comme les illustrations. Catchlight propose un concept basé sur l'interaction entre ces 3 différents médiums.
Je fais référence à Ghost in the Shell et Enki Bilal dans l'article, ça vous va ?
Oui bien sûr. C'est même plutôt flatteur. Merci. Ce qui est assez particulier quand on évolue dans un concept narratif comme nous, c'est de voir la manière dont les gens s'approprient le récit, avec leurs références leur univers. Pour ma part, mon inspiration vient autant du cinéma que de la littérature SF. Des livres comme Dune, des films comme Gattaca ou 2001 a space odyssey par exemples.
Le clip de "Silent ghosts" est très abouti avec des décors, un scénario, pas mal de travail en post-production, c'est rare car ça demande beaucoup d'investissements, comment vous y êtes arrivé ?
On a travaillé avec Anthony Mouchet qui avait déjà réalisé plusieurs clips pour Psygnosis, Deathawaits ou Prismeria. Nous avons eu la chance d'être entourés de personnes, d'amis qui ont accepté volontiers de s'impliquer dans ce projet. On a réussi à trouver une équipe de gens motivés et volontaires. On avait accès à certains lieux très cools vers Mâcon. Avec Anthony on a dirigé les acteurs et on a même travaillé ensemble sur la réalisation de ce clip qui a d'ailleurs demandé beaucoup de boulot sur les effets spéciaux également. On a tellement bien aimé bosser ensemble qu'il se pourrait bien qu'on continue, pour Catchlight mais peut-être aussi sur d'autres projets.
Le premier truc que tu vas faire après le confinement ?
Comme tout le monde je pense. Prendre un grand bol d'air frais, sortir, reprendre la fréquentation des concerts là où on s'était arrêtés et espérer pouvoir reprendre la route et écumer les scènes européennes comme on voulait le faire en avril. On est très impatients !
Merci Seb et les Catchlight, merci aussi à Aurelio et Domino Media.
Publié dans le Mag #42