La Canaille Autrefois lieu de vie alternatif, désormais lieu culturel à tendance subversive, La Fraternelle porte en elle un héritage en parfaite osmose avec l'imaginaire véhiculé par La Canaille lequel a été fidèlement retranscrit par Ted dans la chronique de Par temps de rage. C'est donc fort logiquement ici, sans qu'il y ait de toute façon vraiment d'autre possibilité dans la cité pipière, que le quatuor a posé les amplis pour exprimer son rap-rock de très bonne facture. Mais avant d'entrer dans le vif du sujet, il est question de se rendre compte que les aficionados de Marc et/ou de La Canaille ont répondu présent en emplissant très généreusement les lieux, d'effectuer un crochet par le bar, de saluer Sam (Salut Sam !) et de savourer l'exercice de quelques slameurs amateurs en guise de première partie. Si nombre de spectateurs semblent être attirés, bien légitimement, par la personnalité de Marc, c'est en tant qu'amateur de Quelques gouttes de miel dans un litre de plomb que j'entre en contact sonore avec le live de La Canaille. Et c'est la baffe, la mandale, le pied total lorsque la formule secrète de Par temps de rage, largement représenté lors du set, explose les tympans, perfore les pores, fait briller les pupilles : la magie du live fonctionne à merveille.
A l'instar du dub-rock des Guns Of Brixton, La Canaille et son rap-rock, dont l'appellation pourrait apparaître comme désinvolte, attribuée à la va-vite, prend tout son sens puisque la fusion opère instantanément. Groupe rock à l'énergie à peine contenue, écriture hip-hop qui fait mouche, on songe immanquablement à la tribu Casey/B.James/Hamé/Zone Libre en encore plus groovy et on jubile lorsque La Canaille fait exploser les conventions en s'aventurant sur des terrains noisy, guitare/basse/batterie bouillonnantes. Le combo présente amplement son deuxième album mais n'oublie pourtant pas le premier avec une version retravaillée de "Ni dieu ni maître" et "La Marseillaise", livrée ici pleine de grâce. Et c'est lors du rappel que La Canaille fait allusion à la grosse boîte de la ville (fabrique sous-traitante pour l'automobile traversant une crise depuis des années dont les enjeux qu'elle porte est représentative des défis économiques, sociaux et écologiques mondiaux du moment) en envoyant "L'usine", ne pouvant pas ne pas être interprétée ici ce soir. Son tempo, industriel s'il en est, et son refrain "couper, séparer, jeter, toute sa vie" finissent de mettre le groupe à l'unisson avec le public. Les yeux rougis de Marc à l'issue du morceau sont là pour prouver que c'est du vécu et que les retrouvailles, "attendues depuis 4 ans", sont réussies. A l'issue de l'ultime morceau ("J'ai faim") parti sur un dub des plus enthousiasmant, force est de constater que La Canaille a converti plus d'un spectateur à sa cause.