Originaire de Milan, Calibro 35 doit son nom à la célèbre arme à feu que les gansgters italiens usaient en masse dans les Poliziotteschi. En 2007, la formation menée par le producteur Tommaso Colliva s'est mise en tête de recréer le son des BO de l'époque. 8 ans plus tard, cela a l'air de plutôt pas mal marcher comme nous l'atteste ce dernier avec qui nous avons échanger quelques mots, quelques mois après la sortie de S.P.A.C.E. et 10 jours avant une date française attendue.
Nous sommes obligés de vous poser la question : Qui êtes vous Calibro 35 ?
Calibro 35 est à l'origine un projet studio qui est né de l'idée de recréer le son de l'âge d'or des BO de films italiens, soit des années 60 aux années 70. On a eu tellement de plaisir à enregistrer ce premier album (NDR : Calibro 35) qu'on a décidé de jouer le projet sur scène. Mais on n'a jamais pensé qu'un jour tout ça se transformerait en un vrai groupe tel que nous le sommes actuellement. Aujourd'hui, Calibro 35, c'est cinq personnes dont quatre musiciens et un producteur et nous travaillons avec des artistes italiens mais également internationaux comme Muse, PJ Harvey, Mike Patton et j'en passe. Mais Calibro 35 reste toujours notre principale activité créative.
Le style musical de Calibro 35 n'est pas majeur dans notre ligne éditoriale. Nous traitons de rock et de métal en général. Est-ce que vous vous considérez comme un groupe de rock ?
C'est difficile de définir notre groupe. Comme je te le disais, son principal but c'est de reproduire les sonorités de ces BO italiennes de l'époque mais le son de Calibro 35 est en réalité composé de quelques éléments et le rock en fait partie. Et puis, nous avons tous, d'une manière ou d'une autre, un background rock donc je vais te répondre en te disant qu'on est très certainement un groupe de rock.
D'un point de vue général, quels sont les genres musicaux qui vous inspirent pour créer en tant qu'artistes ?
Pour Calibro 35, on puise notre inspiration de différentes sources. Bon, à part évidemment les maestros italiens que sont Ennio Morricone, Riz Ortolani, Franco Micalizzi et Luis Bacalov, on adore aussi l'afro-funk, de Fela Kuti à The Budos Band, le rock progressif, de Emerson, Lake & Palmer à Canterbury Scene, ou bien la musique classique de Gustav Holst, pour n'en citer qu'un.
Votre nouvel album s'appelle S.P.A.C.E.. C'est un acronyme ?
Non, la vérité c'est qu'il n'y a pas de réelle explication à ce titre. On voulait que ce soit simple et clair. Notre style musical est passé d'une atmosphère noire, genre ambiance criminelle, à quelque chose d'autre et on voulait le décrire dans le titre de cet album. Alors on a pensé à "space", mais c'était un peu nul alors on a mis les points entre chaque lettre. Tout de suite, c'est devenu plus existant.
Est-ce que S.P.A.C.E. raconte une histoire à l'auditeur ? Est-ce un concept-album ?
C'est une fausse BO. On voulait que ça sonne comme une BO qui pourrait convenir à un film de science-fiction de Sergio Leone qui n'a jamais existé. On a essayé de jouer toutes les ambiances qui faisaient penser à de la SF : une poursuite de vaisseau-spatial, une atmosphère de suspens, l'amour intergalactique. Je pense qu'il y a à peu près tout dans cet album qui peut faire penser à ça.
Quelles sont les clés pour réussir une telle musique ? Est-ce qu'il suffit de prendre les codes musicaux des BO déjà existantes et de les appliquer ? Ou la recherche va plus loin que ça ?
Il y a eu un moment vraiment très important au milieu de notre première tournée avec Calibro 35. Quelqu'un est venu nous voir après un concert et nous a dit qu'il était expert musical. Il nous a avoué qu'il n'avait pas réussi à faire la différence entre nos compositions et celles des vieilles BO, on a alors réalisé que notre son était, d'une certaine façon, fiable, organique et réel. A partir de ce moment-là, nous avons décidé de recréer sur album les compositions d'autres mais à notre sauce, en étant totalement unique. Bon, après, c'est vrai que ça sonne très italien et rétro.
Quand j'écoute votre musique, je ne peux m'empêcher de penser aux travaux de Thomas "TNT" Brenneck (entre autres fondateur du Menahan Street Band et membre de The Budos Band). Est-ce que vous vous sentez proche musicalement de ce musicien-producteur ?
Wow, c'est de loin le meilleur compliment qu'on puisse nous faire ! Nous adorons TNT et tout ce qui se passe chez Daptone Records (Charles Bradley, Sharon Jones). Pour tout te dire, The Budos Band est l'une des premières inspirations pour Calibro 35 et nous écoutons encore ce qu'ils sortent, mais cela concerne également The Menahan Street Band, Dapkings et d'autres. Un grand merci pour le clin d'œil !
Est-ce qu'il est plus facile de produire Calibro 35 ou des groupes comme Muse ou Franz Ferdinand (dont tu es le producteur) ?
Je suis passé en une semaine d'une production longue de 9 mois avec 250 chansons à la clé (Drones de Muse) à S.P.A.C.E. qui nous a pris 7 jours pour sortir 8 chansons. C'est vraiment deux choses différentes et tu dois faire face à pas mal de tâches différentes. En gros, pour Calibro 35, tout est une question de moment et d'atmosphère et de ce que tu veux faire paraître à tel moment de ton disque. Avec Muse, c'est simple, le but c'est que tout doit être et sonner "grand".
Dr Dre vous a samplé sur son dernier album, comment le contact s'est noué et pour quelles raisons avez-vous accepté ? Aimez-vous ses albums et le hip-hop en général ?
Un jour, j'ai reçu un e-mail d'un organisme juridique américain nous expliquant qu'un producteur hip-hop avait utilisé notre musique pour un titre de son dernier album. Après un échange avec eux sur Skype, on a découvert que c'était pour un morceau de Dr Dre avec Snopp Dogg ! C'est marrant parce que le premier CD que j'ai acheté c'était The chronic de Dr Dre. On n'est plus trop branché par le hip-hop maintenant, mais c'est cool d'être samplé, que notre musique soit appréciée, qu'elle inspire des gens et que ça les mène vers d'autres horizons sonores. Ca, c'est vraiment cool !
Est-ce que tu connais d'autres groupes italiens qui font le même genre de projets que vous en Italie ?
Il n'y a rien d'aussi spécifique que Calibro 35 en Italie mais tu devrais jeter une oreille sur ce que font des groupes comme La Batteria et Ottone Pesante.
En tant que musiciens italiens, j'aimerais savoir s'il existe de nos jours une scène musicale italienne typique. Car j'ai l'impression qu'ils partent tous à l'étranger pour tenter leur chance.
La scène musicale italienne est une sorte de grande division : soit tu restes au pays et tu exploites ton potentiel au maximum mais tu n'as aucune raison d'aller l'exposer à l'étranger, soit tu essaies d'élaborer ton projet à l'étranger. Nous, nous sommes en plein milieu, plutôt très reconnus et appréciés en Italie mais nous travaillons pas mal ailleurs. Être un groupe instrumental nous a quand même bien aidé aussi.
Comment réagit le public italien à votre album ?
S.P.A.C.E. est un album important dans notre discographie, il a pas mal marché partout, pas qu'en Italie : en Europe, aux US et au Japon aussi. Nous voulions abandonner la musique des BO de Poliziotteschi, le côté "crime funk" et inclure et expérimenter d'autres univers. Je crois que nous avons assez bien réussi ce challenge.
Dernière question : vous allez jouer en France. Quel rapport avez-vous avec ce pays et quels sont les artistes français qui vous inspirent ?
La France s'occupe bien de nous et nous traite bien en général. Nous en sommes toujours très reconnaissant à chaque fois qu'on y vient, surtout les radios que je trouve très ouvertes musicalement parlant. On a joué quelques fois à Paris par le passé mais concernant notre prochain show en France (Le 25 février au Petit Bain à Paris), ce sera le premier après la sortie de S.P.A.C.E.. Autant vous dire, qu'il sera immanquable si vous aimez Calibro 35 sur disque.
Merci à Calibro 35 et à Marika.
