Les membres du quintet toulousain de slam-rock Bruit Qui Court ont tous en commun cet esprit de débrouillardise si chère aux keupons (Berurier Noir en tête) et autres teufeurs avides d'indépendance totale. Et cette dernière est naturellement accompagnée d'un militantisme, d'un engagement, d'un combat que le groupe revendique plus que tout au monde. Ce bruit de colère, un peu anar-coco sur les bords, s'est répandu à travers plus d'une centaine de concerts depuis la création du groupe il y a une dizaine d'années, avec de belles rencontres à la clé telles que Ministère des Affaires Populaires, Uncommonmenfrommars, Les Beautés Vulgaires ou Face-B, avec qui la formation garde encore de très bons contacts. En 2009, Bruit Qui Court sort un 4 titres Nous faire taire puis un album un an plus tard au nom évocateur Tuez le flic en vous !. A l'origine du collectif "L'utopie sinon rien", un espace de discussion militant sur les lieux de concerts, les Toulousains ont enchainé sur un EP en 2013 nommé T.I.N.A. avant de délivrer le 13 octobre 2014 leur nouveau disque éponyme.
Bruit Qui Court
Biographie > Rumeur ou vérité ?
Bruit Qui Court / Chronique LP > Bruit qui court
Bruit qui court est le disque de la renaissance du quintet. Peu avant sa sortie, ce dernier exigeait de son public d'oublier leur musique pour découvrir leurs nouveaux morceaux. C'est donc avec un line-up remodelé au sein duquel le clavier/samples a repris le rôle qu'avaient les guitares auparavant que Bruit Qui Court met à l'honneur ses textes subversifs. Ces derniers tournent autour des idées de radicalité politique de feu Charlie Bauer, révolutionnaire et penseur libertain, mais également légende du banditisme français avec son ancien complice Jacques Mesrine. Certains de ses écrits issus de son livre "Fractures d'une vie" sont d'ailleurs utilisés dans le titre "Charlie". Nicolas Lafforgue crache l'anti-soumission avec une haine palpable et partage son micro par moment avec Milka (Psykup, Agora Fidelio, My Own Private Alaska...) sur "Il suffirait de fermer les yeux" et avec Matthieu P. de Face-B sur "Dans l'ombre". C'est non sans rappeler un petit côté Diabologum (formation de Toulouse également) que le flow scandé quasi théâtralisé de Nico s'adapte à merveille à ce rock brut tantôt rageur ("Sans jamais vous suivre"), tantôt intimiste ("Ma haine, ma colère et ma rage #1"). Chaque instrument tient parfaitement son rôle, un équilibre dans lequel la rythmique se veut parfois noisy ("La mélancolie") tandis que les notes de claviers de Sandra peuvent être capables de tempérer l'atmosphère ("Soixante et onze jours") ou au contraire d'accompagner les perturbations. Soulignons que la basse profonde et aiguisée de Sylvain, dont les très bonnes lignes font souvent penser à Tool ("Le produit de mes erreurs"), est saisissante dans ce socle sonore.
J'ai toujours eu, en général, un tantinet du mal quand le message et les opinions politiques d'un groupe, qu'ils soient poétiques ou non, prennent le dessus sur l'aspect musical. On a tendance a en oublier le travail fourni par les musiciens et c'est bien dommage car Bruit Qui Court maîtrise très bien son art. Un style pas vraiment commun en plus même si, sans vouloir le comparer à La Canaille ou à Zone Libre, le sillon du combat artistique (avec démagogie pour certains) demeure encore bien présent et vivace en France. Bruit Qui Court a rejoint depuis un bail la grande tradition des groupes toulousains qui l'ouvrent pour réveiller à leurs manières les consciences (Fabulous Trabadors, Zebda, Sidilarsen), et à l'écoute de son nouvel opus, il n'est pas prêt de rendre les armes.