Après avoir été (très) remarquée au sein des milieux autorisés comme étant la nouvelle princesse du mouvement slowcore/post-pop/shoegaze/indie avec son album Without the world, Alicia Merz aka Birds of Passage a depuis confirmé qu'elle était la digne héritière des Codeine, Slowdive et autres Sigur Ros, avec son deuxième album solo (Winter lady) puis un disque collaboratif enregistré avec le poète/compositeur portugais Leonardo Rosado (Dear and unfamiliar).
De son côté, Gareth Munday est, avec son projet solo Roof Light, l'artisan d'une electro-pop se rapprochant de part ses aspects ambient de la musique de Boards of Canada. En 2011, la collaboration des deux artistes, orchestrée par l'incontournable Denovali donne naissance à un projet intitulé Brother sun, sister moon sur lequel la gémellité artistique de l'anglais avec la néo-zélandaise semble, au-delà de l'éloignement géographique un peu handicapant, étrangement assez évidente.
"Ghost of Barry Mill" délivre ses premiers instants de grâce musicale pure et déjà la voix si caractéristique d'Alicia nous fait succomber. Dans un registre "folk" très joliment marié à une atmosphère post-pop épousant les contours d'une musique shoegaze, sur laquelle le duo a samplé des rires d'enfants pour conférer à l'ensemble un côté ingénu. Comme figé dans le temps, le duo créé quelque chose d'assez unique en son genre : une oeuvre buccolique, lumineuse aux mélodiques évanescentes et séraphiques qui, au détour d'un "Stand Under" ou d'un "Cope", fait naître quelques moments de bonheur intérieur chez l'auditeur, confondants (l'éponyme "Brother sun, sister moon"). Quelques petites expérimentations et bricolages électroniques aux incursions... lounge (si si) plus tard, et voici que le duo reprend son cheminement créatif, main dans la main, pour délicatement poser sur la platine un "A year's worth of leaves in your heart" à la douceur infinie. Une sorte de berceuse pour enfant (on retrouve l'esprit des débuts du disque à l'image de sa pochette d'ailleurs) qui trouve son prolongement avec un "From grain to flour" dont les arrangements de Gareth semblent jongler et virevolter autours de la voix d'Alicia comme pour laisser s'évader l'auditeur retombé en enfance ("Storm breaks the day").
La thématique d'ensemble reste toujours la même tout au long des onze morceaux que compte ce Brother sun, sister moon et pourtant le duo parvient toujours à surprendre, comme lorsqu'il s'amuse à mixer musique de vieux films noirs avec une electro-pop aventureuse aux teintes parfois old-school... pour un résultat assez détonnant bien que l'on en vienne parfois à se demander ce que cela vient faire au beau milieu des comptines survolées par le timbre d'Alicia Merz ("One throws and one pulls"). Des déclinaisons stylistiques qui trouvent leur aboutissement sur le très beau "All you need" et son cocktail trip-hop/shoegaze stratosphérique qui nous emmène très haut dans des sphères éthérées rarement explorées jusqu'alors, avant un final en deux parties, subtilement envoûtant. "South downs by morning" puis "Stand under" : deux dernières pistes aux tonalités plus adultes et un épilogue au minimalisme aussi appuyé que le reste de l'album est parsemé de ces petits moments de plaisir auditif pur. La classe absolue.