Boris | Ian Astbury - BXI Vous connaissez le point commun entre le trio drone-doom-rock nippon Boris et la vieille gloire du rock qu'est le chanteur de The Cult ? Oui, non, peut-être ? Pourtant il y en a un : BXI, soit un split EP composé à 8 mains. Ben oui, pourquoi pas ? OK bon sur le papier, ça paraît hautement improbable, surtout s'il s'agit de le sortir chez Southern Lord mais quitte à oser un truc un peu farfelu, autant y aller vraiment. 4 titres au total, dont trois compositions "originales" et une reprise de... The Cult (ben oui...) enregistrées à Tokyo au printemps dernier et voici donc BXI pour un résultat fatalement attendu au tournant. Verdict ?

"Teeth and claws", premier titre de ce split calme d'entrée les ardeurs : ce que l'on craignait d'entendre se réalise malheureusement sous nos yeux. Boris vs Ian Astbury dans ce que cette association artistique quelque peu impromptue a de plus pénible. Soit un mélange d'indie noisy poussif à tendance expérimentale et de rock boursouflé à la grandiloquence crasse. Pas grand chose à sauver, c'est plat, sans âme et le chanteur de The Cult en fait des tonnes pour rien (qui a dit "comme d'habitude ?"). "We are witches" maintenant : le gros riff à la nippone des Boris soulage un peu les tympans légèrement euthanasiés par le premier titre et démontre que les japonais ont définitivement ce sens inné de la marave rock dure, tout comme ils maîtrisent les nappes drone-doom hypnotique. Conclusion : c'est pas mal du tout, mais ça pourrait être carrément brillant si quelqu'un avait quelque part eu la bonne idée de bâillonner tonton Ian.

Et là, alors même que l'on s'attend à subir l'innommable (ou presque), "Rain" : la reprise de The Cult est paradoxalement l'excellente surprise de ce split. Une voix féminine complètement habitée au micro, un son volontairement sous-mixé qui donne un côté cru, DIY et abrupt au riffing des Boris, un son atypique insufflant tout au long du morceau une énergie brute qui met valeur la mélodie en même temps qu'elle contamine son auditoire. On l'a compris, le trio fait très fort et alimente un peu plus sa légende d'iconoclaste de la scène rock expérimentale (mais pas que). On aura au moins eu droit à un titre magistral sur quatre... et ce sera tout. "Magickal child" se chargeant d'enterrer cette collaboration dont on espère ne jamais avoir de suite. Revoici donc Ian Astbury qui vient geindre au micro pendant que les nippons la jouent minimaliste. Au départ, ça chatouille un peu, à la fin ça agace sérieusement. Heureusement au milieu, quelques éclairs post-rock viennent densifier l'ensemble et lui donner une consistance qui tend à démontrer qu'avec un autre chanteur, le rendu final de ce BXI aurait pu être tout autre. Boris Ok, mais Ian peut retourner bêler au micro de The Doors pendant que Jim "Dieu" Morrison se retourne sous sa stèle.

PS : oser sans cesse, prendre tout les risques comme le fait le label Southern Lord (Black Cobra, Sunn O)))), Masakari), c'est plus que louable, ça en devient même salvateur en ces temps d'uniformisation généralisée où règne en maître absolu et incontesté l'art aseptisé pour les masses. Et même si parfois, le résultat est un peu bancal (ou beaucoup), la démarche mérite au moins d'être soulignée. Merci à eux.