Boris, groupe nippon ("ni mauvais" s'aventureront les boute-en-train les plus suicidaires) nous a lâché il y a plusieurs mois (en Europe, et deux ans auparavant dans leur pays) une galette cosmique, ébouriffante et ahurissante qui tend à tirer le rock'n'roll vers ce qu'il y a de plus divin. Cette monumentale apoplexie de près de trois quarts d'heure, découpée en 5 pistes, vous bouleversera sûrement de part l'énergie et la maîtrise exceptionnelles qui transparaissent de ce trio peu connu dans nos contrées.
Wata, pendant une dizaine de minutes, explose les conventions, on est au bord de l'anti-musique. Elle inaugure l'album en plaçant son instrument, seul, au centre de toutes les attentions ; larsens frémissants chevauchent vrombissements telluriques, images de canopées succèdent à celles de terres brûlées : le petit bout de femme fait très forte impression. Ensuite arrive la deuxième piste, et l'apparition en filigrane de la batterie d'Atsuo puis de la seconde guitare : celle de Takeshi. C'est alors que le trio se met tranquillement en marche. Un sentiment de faux calme enveloppe l'espace, la douceur est là, c'est certain, mais combien de temps résistera-t-elle ? Impossible de déterminer quand elle cèdera sa place au déchaînement du combo, puisque Boris parvient, pas à pas, à développer un tohu-bohu sans pour autant créer de réelle rupture avec l'instant précédent. Ceci est vrai jusqu'au milieu du mouvement, aux environs de la vingt-cinquième minute (non, vous n'êtes pas devant un match de football !), moment où, comme un seul Homme, le trio fait jaillir quelques effluves venues d'une planète proche de celle de Tool, venant démontrer, une fois encore, le talent des japonais. La basse dont s'est emparé Takeshi vous renverse les viscères, la guitare hurle à la mort, la batterie martèle ses envies d'auto-destruction : le "chaos organisé" est foudroyant de justesse et d'émotion. S'en suit un léger passage, a nouveau aérien, avant de replonger dans une succession d'explosions multiples éclairant la performance, jusque là servie sur un ton très solennel. Les déflagrations de fins de concert de Nirvana ou Sonic Youth font bien pâle figure à coté de ce que jette Boris à nos oreilles lors de la partie suivante.
Les deux dernières pistes servent au groupe à se retirer progressivement, inversement à la manière dont il est apparu, laissant s'échoir larsens improbables et nappes distordues afin de ne laisser filtrer qu'une fine écume inoffensive. Les ultimes minutes que délivre Boris, une sorte de travelling arrière musical, rappellent l'ouverture de l'album, évoquant de cette manière une boucle se fermant sur elle-même et se répétant à l'infini.
Ne croyez pas qu'il s'agisse ici d'une oeuvre exclusivement instrumentale, parfois Takeshi et Atsuo lâchent quelques bribes ou couplets, distillant un chant vaporeux mais persuasif, complétant l'oeuvre d'une touche sensible.
Pour qui la description n'aurait pas vraiment provoqué d'effet, sachez qu'entre Sunn o))), Kyuss, Pink Floyd et Earth, Boris, talentueux combo n'en a pas fini de divaguer sur des terres sacrées, frontalières d'improvisation, d'expérimentation et de contrôle total de déluge sonique.
Toujours est-il que leur drone musical est splendide, on attend que l'appareil se pose dans le jardin pour embarquer avec lui vers des cieux d'une pareille perfection...
Boris at last - feedbacker
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Re: Boris / Boris at last - feedbacker
Terrier : Shanghai
Une elongation vers les experimentations de Yoshihide pour les constru et Acid Mothers Temple pour le travail d'orfevre sur le son des instru, le bruit, mais avec une demarche beaucoup plus accessible...
bref c'est vraiment bon et ca m'etonne de trouver ca ici (pas beaucoup de japonais dans ces pages...)
Re: Boris / Boris at last - feedbacker
Terrier : Là-bas.
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Rémiii
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Re: Boris / Boris at last - feedbacker
Terrier : Toulouse
D'ailleurs, au passage félicitation à Rémiii pour cette excellente chronique, elle retrace bien l'atmosphère qui se dégage de cette galette, je trouve.
Cette album est vraiment très bon. Je trouve que c'est vraiment le genre de truc qui pourrait faire aimer le drone à quelqu'un n'en ayant jamais écouté (c'est que c'est un peu spécial comme musique...lol).
Le but du jeu ça n'est pas uniquement de te faire vibrer à grand renfort de larsen et de rythmes ultra-lentes, il y a un vrai lyrisme là dedans, et il est peut-être plus accessible que par exemple le deuxième Earth (ou que Sunn o))) ) ...
Je vais essayer de mettre la main sur le split avec merzbow, histoire de voir un peu ce que ça peu donner...
Tu conseillerais quoi comme autre album d'eux ?
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Ave Atque Vale
Re: Boris / Boris at last - feedbacker
Terrier : Shanghai
Re: Boris at last - feedbacker
Terrier : DTC
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Re: Boris at last - feedbacker
Terrier : Toulouse
Sinon, ecoutez Amplifier Worship... c'est tres different mais proprement monstrueux !
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Droooooop oouuuut of life with booooong innnn haaaand
Follooow the smooooke to-uuh the riffffff-fillllled laaand