Black Rebel Motorcycle Club fait partie de ces groupes qui pourraient allègrement servir de définition à une certaine idée du rock. Un look blouson noir absolument démodé mais qui tient bon, des membres charismatiques, dont un sosie de James Dean, des cordes implacables capables de déclencher une émeute avant d'appeler à la transcendance, des voix charismatiques, sensibles et furieuses, et enfin une attitude aussi authentique que rugueuse. En 15 ans de carrière le gang n'a jamais démérité, rejoignant la catégorie de ces formations n'ayant jamais été propulsées dans la stratosphère médiatique mais qui malgré tout résistent à toutes les tempêtes et continuent de naviguer sur une fan-base fidèle et solide.
Cette fan-base sera comblée par la sortie de ce superbe CD/DVD Live in Paris qui prend place dans le décor incroyable du Trianon. Grosse surprise de cette sortie, c'est la performance spéciale livrée par le groupe pour l'occasion. En effet, il n'y a pas un mais deux CDs live, dont le premier n'est rien de moins que l'interprétation en intégral de leur dernier album en date, Specter at the feast (2013). Le deuxième CD lui renferme la seconde partie du concert, une setlist ''best-of'' des plus croustillantes avec les plus grands classiques du groupe, de ''Beat the devil's tatoo'' a ''Spread your love'' en passant par d'autres titres un peu plus rares mais tout aussi jouissifs.
Un peu plus de deux heures de rock'n'roll qui puent la classe et la maîtrise jusqu'au bout et qu'on retrouve sur le DVD de ce même concert. La réalisation est superbe, le montage hypnotisant, la lumière lysergique et le cadrage digne d'un grand western. Sans compter la prod' sonore, tout aussi propre que fidèle, qui laisse apprécier toutes les subtilités du son vaporeux et lourd du trio des Californiens. Deux heures intenses et donc pas forcément digestes pour tout le monde mais qui rassasieront plus qu'assez les die-hard du Club.
Et comme les fans, c'est bien connu, n'en ont jamais assez, ils trouveront également un sympathique documentaire sur la vie en tournée du groupe, à condition d'être anglophone. Un documentaire dans la même veine que ceux qu'on a l'habitude de voir sur ce genre de DVD mais qui s'avère toujours intéressant tout en révélant quelques petites anecdotes classiques de la vie sur la route.
Bref, si tu es client du BRMC, fonce sur ce CD/DVD Live in Paris et son artwork bien léché. Par contre, si tout ce que BRMC t'évoque c'est la chanson que tu as entendu dans une pub avec Robert Patinson, alors commence par écouter le second CD du concert qui sera pour toi une excellente porte d'entrée dans l'univers du groupe de Frisco.
Black Rebel Motorcycle Club
Black Rebel Motorcycle Club / Chronique LP > Live in Paris
Black Rebel Motorcycle Club / Chronique LP > Baby 81
Deux ans après le très sobre et acoustique Howl, les Black Rebel Motorcycle Club reviennent à leurs amours électriques pour le rock dur, ténébreux et inflammable, sous l'emprise d'un groove ressuscité à coups de riffs cramoisis, de rythmiques emballantes et de mélodies rocailleuses ("Tool out a loan", "Berlin"). Tout ceci est certes très simple, très BRMC tant sur la forme que sur le fond mais le rock du Club a toujours été ainsi. Sans fausse retenue ni trop d'égards pour la critique dite "spécialisée", mais plutôt du genre efficace et décomplexé (fougueux "Weapon of choice").
Un clavier pour une ballade pop US aux accents rock, le petit soupçon de mièvrerie crasse en plus, un titre aux atmosphères rétro ("Cold wind"), un autre aux arrangements synthétiques ("Not what you wanted"), les américains parviennent à varier les plaisirs sans trop se mettre en danger, assurant de fait un retour à la musique amplifiée forcément attendu par ceux qui ont toujours du mal avec le changement de registre (cf : Howl). Problème : là où l'on s'attendait à un rock graisseux, trempé dans quelques ballons de bourbon et de mélodies à la fébrilité rugueuse, on a trop souvent droit à des titres ("Killing the light", "American X") qui n'exploitent pas tout à fait le potentiel d'un groupe qui sait paradoxalement y faire quand il le veut bien.
La preuve avec "666 conducer" : en lâchant les chevaux, le Club renoue avec ses brûlots rock les plus cinglants et, paradoxalement, se nourrit de l'expérience Howl pour enrichir ses instrumentations, produire d'une certaine manière un compromis électrique entre le BRMC des débuts et celui de l'album acoustique. Le résultat est une vraie claque et surclasse tellement les autres morceaux de l'album que l'on se prend à regretter que le groupe n'ait pas pleinement exploité cette voie-là. De fait, ce Baby 81, s'il marque un retour aux sources du son "made by Black Rebel Motorcycle Club" n'est clairement pas l'excellent album célébré un peu partout, mais un petit come-back électrique plutôt sympathique, à défaut d'être véritablement transcendant.
Black Rebel Motorcycle Club / Chronique LP > Howl
BRMC son rock bouillonnant et ouvertement revival, parfois surestimé, d'autres fois massacré par l'intransigeance un peu égocentrique d'une certaine presse, ses brûlots incendiaires et graisseux qui font fumer les amplis, ici en mode... acoustique. Forcément ça change et surprend. Des titres sonnants et trébuchants aux ambiances électriques aux petites folk-songs exécutées au coin de feu, en débranchant ses amplis, le groupe a pris un risque, lui qui misait justement sur la fougue incandescente de ses titres les plus bruts pour convertir l'auditeur à sa cause. Et pourtant... Dès "Shuffle your feet", on comprend que cet Howl est une récréation folk/country/bluesy pour le Club, que l'idée est ici est d'arrêter de transpirer comme des forcenés sur les guitares pour travailler sur la divulgation d'une émotion. Fugace certes mais toute aussi libératrice elle-aussi.
Et le pire, c'est que c'est plutôt réussi, comme sur le très pur et éponyme "Howl" ou le groovy "Ain't not easy way". On nage parfois en plein western post-moderne, dans une musique au racines blues solidement accrochées à un songwriting libéré des artifices souvent imposés par un gros son qui crache le feu dans les tuyaux et le Black Rebel Mortorcycle Club parvient à convaincre ("Restless sinner" épuré, "Sympathic noose", folk et délicieusement classieux), plus que ça même (magnifique "The line")... Par contre, on n'évite pas quelques moments de "moins-bien" ("Promise" très poussif et un poil agaçant), où le Club démontre que sur la distance d'un album entier, il a encore un peu de mal à maintenir un niveau d'écriture constant. Les mauvaises langues diront que ça ne change pas vraiment des albums électriques auxquels il nous avait habitué. Les autres conviendront que cet Howl-là recèle quand même quelques jolies pépites.