The Black Heart Procession - Six A la simple vision de son artwork, on se dit que le nouvel album de The Black Heart Procession ne respire pas la joie de vivre. Un demi coup d'oeil jeté au tracklisting suffit pour nous en convaincre définitivement : "When you finish me", "Wasteland", "Heaven and Hell", "Forget my heart", "Suicide"..., ça n'a pas du rigoler tous les jours en studio. Un disque en forme d'épitaphe chapitrée en treize plages, une oraison funèbre qui navigue entre noir et gris, effleurant en de très rares instants le blanc, pour finalement se replonger tête basse dans les affres d'une mélancolie à fleur de peau, palpable, omniprésente... non ça n'a pas du rigoler du tout même. En pleine dépression artistique, le groupe a composé un disque oscillant entre americana folk-rock désenchantée et pop bluesy feutrée, une oeuvre douloureusement dépouillée sur laquelle ses géniteurs se mettent quasiment à nu, dévoilant leurs cicatrices émotionnelles et leur âme en peine. Malgré quelques éclaircies, The Black Heart Procession traîne son spleen maladif le long de quelques treize compositions arides et sans âge, des morceaux nous emmenant inexorablement vers la même destination. Notre dernière demeure, six pieds sous terre. Quelque part dans un spectre musical croisant les univers de Nick Cave, Tom Waits et Woven Hand, les natifs de San Diego ont écrit un disque à l'encre très noire lourde de sens ("Liar's ink"), sculptant le bois de leur cercueil pour mieux se préparer à l'inévitable et repousser de quelques instants encore leurs pulsions de mort. En filigrane, un sous-texte qui n'a rien de plus joyeux, des morceaux qui s'enchevêtrent ("Rats", "Drugs", "All my steps") pour finalement nous emmener vers la seule issue matérialisée par le dixième titre de l'album : "Suicide". Quand il n'y a plus d'espoir, The Black Heart Procession continue de s'enfoncer toujours plus loin dans les abîmes d'un tunnel émotionnel à l'issue bien incertaine ("Back to the underground"). Et quand celle-ci apparaît enfin au groupe, c'est pour lui imposer le choix ultime : "Heaven and Hell". Tout en paraboles et métaphores parfois un peu trop chargées, le groupe en fait des tonnes en versant dans l'apitoiement égocentrique mais parvient également (et c'était là certainement son but) à nous faire partager sa sensation de mal-être et de lente agonie existentielle. Dépressifs s'abstenir.