Les apparences sont souvent trompeuses et pour cause, le skeud entre les mains et après une première écoute, on serait prêt à jurer que la galette est anglo-saxonne : le nom , les titres, la production, la photo et surtout le contenu car tout ici respire bon le bon vieux rock indie des nineties. Seul le petit logo "Puy-de-Dôme" vient trahir la véritable identité de Baltimore, car ce dernier ne mouille pas de l'autre côté de l'Atlantique mais est sorti des terres françaises, celles façonnées par les volcans. Le combo auvergnat n'en n'est pas à son coup d'essai puisque leur premier EP Tigers of the year sorti en 2015 avait déjà suscité l'intérêt général. Et comme on ne change pas une équipe qui gagne, la production et le mixage ont été une nouvelle fois confiés à Ian Davenport (Supergrass, Stereophonics, Elastica) dans son studio outre-Manche, résultat : un son incisif, précis et classe qui sied parfaitement aux compos des Clermontois.
Bien que revendiquant l'influence de The Smashing Pumpkins et Nada Surf, il faudra dépasser cette filiation un peu étriquée à l'écoute de ce Summer rain, parce que nos frenchies n'ont pas passé leur temps à pleurer Kurt Cobain en optant pour une formule post-grunge mille fois copiée et galvaudée. Non, les frères "Rigaud" et leur acolyte "Sawicki" valent beaucoup mieux que cela et vont autant puiser dans l'indie-rock que dans le post-punk revival : la formule est ainsi revue avec une certaine touche britannique, non sans rappeler celle du dernier Bloc Party.
Chaque morceau possède une saveur singulière et c'est la grande force de ce disque: passer en revue presque une dizaine d'années de rock indépendant en restant cohérent, de American Hi-Fi ("Testify") et Our Lady Peace ("Lost tripper") à The Vines ou The Strokes sur "New way" et "Attraction" en passant par les Pixies avec "Lonely days" et "Sofa rosa", clin d'œil au Surfer rosa des lutins de Boston, on ira même jusqu'à taquiner les QOTSA sur le très stoner "Feel good".
Notre trio n'a rien à envier à certaines formations plus prestigieuses et peut être rangé sans avoir à rougir à côté de Placebo ou Silverchair, les quatorze pistes ne souffrent d'aucun temps mort, elles allient subtilité et efficacité et ne cèdent jamais à la facilité, quarante minutes entraînantes et dynamiques qui prouvent une nouvelle fois que l'hexagone n'a pas de complexe d'infériorité à avoir.
Publié dans le Mag #34