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Amplifier / Chronique LP > Echo street

Amplifier - Echo street S'il avait fallu cinq années à Amplifier pour sortir un nouvel album après Insider, les Anglais n'auront pas mis autant de temps pour digérer le chef-d'oeuvre qu'était The octopus, et se sont rapidement remis à travail après un opus pourtant très long-format pour accoucher d'Echo street. Un disque au format plus "standard" qui marque le retour du groupe dans les sphères traditionnelles puisqu'il sort par le biais d'un label, en l'occurrence K Scope. Soit en gros LA référence rock/pop/progressive de qualité supérieure en Europe (Anathema, Porcupine Tree, Steven Wilson, The Pineapple Thief...).

On oublie l'autoproduction/auto-distribution et les ambitions démesurées (mais accomplies) du coup de Trafalgar passé et Amplifier livre ici une oeuvre plus classieuse que jamais qui, dès l'inaugural et très pop/prog "Matmos", prend une tournure résolument accessible, aux frontières du mainstream. Le résultat se laisse joliment déguster mais ne restera pas non plus dans les annales de la discographie d'un groupe qui semble avoir voulu livrer un single en introduction de cet Echo street. Une stratégie plutôt bien pensée (et payante) qui a en plus le don de déstabiliser l'auditeur resté scotché sur The octopus. Mais à nouvel album, nouvelle approche... "sauf que" rapidement, les Mancuniens se remettent à faire ce qu'ils savent faire de mieux, soit un rock progressif organique en perpétuelle évolution.

Une démarche qui trouve son... écho, à l'occasion d'un "The wheel" véloce passionnant ou de cet "Extra vehicular" aux deux visages : langoureux et un peu ennuyeux ou à défaut tout en crescendo space-rock stellaires et enivrants. Toute la problématique de ce nouvel Amplifier est là : rompre avec le passé immédiat et s'orienter vers une nouvelle voie. Plus policée, respectueuse d'un héritage prog' old-school un peu trop pesant ("Where the river goes"), parfois outrageusement pop progressive ("Paris in the spring"), mais également capable d'un raffinement certain ("Between yesterday and yesterday") voire un peu plus même (l'éponyme "Echo street"). En passant après The octopus, Echo street rompt assez radicalement sur ce que le groupe avait fait sur son précédent album et s'il a le mérite de ne pas du tout se renouveler, il a bien du mal à soutenir la comparaison avec ce qu'il avait fait avant ("Mary Rose").

L'intérêt réel de cet album est en fait à aller chercher du côté du deuxième CD, sur lequel figurent les 4 titres composant, Sunriders, un EP exclusivement dispo sur l'édition Digibook Deluxe 2xCD d'Echo street. Entre un "Spaceman" aux arrangements amples et ténébreux, un "Sunriders" éponyme au groove aussi volubile qu'au songwriting aventureux ou un "Never and always" à l'élégance racée, Amplifier fait finalement re-jaillir la magie quand on ne l'espérait plus ("Close"). On est donc finalement sauvé de la déception... même si on reste à des années lumières du chef d'oeuvre qu'était The octopus.

Amplifier / Chronique LP > The octopus

Amplifier - The octopus Si Amplifier a clairement pris son temps pour sortir son troisième album long-format, quelques cinq années après l'excellent Insider, le groupe n'a pas non plus complètement chômé. Produisant ses albums lui-même et ayant expérimenté de près les affres de l'industrie du disque dans toute sa splendeur (les deux premiers opus sont sortis chez Music for Nations et SPV), le groupe est retourné à l'autoproduction en 2008 en livrant un EP intitulé Eternity, non sans avoir auparavant profité de l'appel d'air médiatique provoqué par son précédent opus en tournant en première partie d'Opeth puis Porcupine Tree. Toujours en cette même année, les mancuniens annoncent un troisième effort long-format... lequel ne sortira donc que trente-six mois plus tard.

La raison? En plein enregistrement (finalement étalé entre fin 2008 et mi 2010), Samir Balamir et les siens, qui voulaient au départ enregistrer deux albums à la suite se sont rendus compte que ce qu'ils mettaient en boîte ne forme qu'un seul et même tout... à re-conceptualiser. Si bien que The octopus a finit par être un double album-...concept sorti en digital et au format physique collector accompagné d'un e-book relatant ce qu'est cet opus un peu particulier dont la durée dépasse allègrement les deux heures de musique. Mais nous ne leurrons pas, seul le groupe a compris les tenants et aboutissements de sa démarche (qui consiste à ne pas se revendiquer comme l'auteur dudit album mais à dire que l'album l'est lui-même... allez comprendre). L'important est ailleurs.

Musicalement, le résultat de cette démarche de DIY absolu (autoproduction, auto-distribution) est totalement ébouriffant et après quelques pistes seulement démontrent que l'autre groupe phare de Manchester (après Oceansize) est en train d'atteindre le niveau d'ambition artistique d'un Steven Wilson (le leader d'entre autres Porcupine Tree et référence incontestée de la mouvance prog' depuis plus de deux décennies maintenant) lorsqu'il est au meilleur de sa forme (c'est à dire... tout le temps). Des murailles de guitares prog-rock à l'ultra-reverbération massive ("The wave"), un songwriting pop avec piano/voix jonglant entre intimisme élégant et grandiloquence affirmée ("Minion's song"), Amplifier exhale une superpuissance indie juste étourdissante ("Interglacial spell", "Planet of insects"), avant de se permettre de faire tout ce que l'on vient d'évoquer... en un seul et même morceau (l'immense éponyme "The octopus"). Bluffant à tel point que l'on en vient presque à se dire que le groupe de Manchester ressemble par instants à ce que serait Pink Floyd au XXIe siècle...

Et si l'on freine de nous-mêmes l'emballement, les anglais eux poussent le vice jusqu'à instiller durablement cette impression, en accouchant de titres-fleuves et labyrinthiques dont on comprend de fait, a posteriori, la durée de gestation plutôt longue ("White horses at sea // Utopian daydream", "Trading dark matter on the stock exchange"), alors qu'il nous envoient dans les hautes sphères d'un space-rock, parfois aux frontières du stoner, halluciné mais envoûtant. Avec en prime la notion du "beau" en matière sonore portée par à son paroxysme sur des pièces qui renvoient tantôt à Porcupine Tree (évidemment) pour les passages les plus classieux mais également inventifs, tantôt à Tool pour les épisodes à la puissance exaltées (mais pas que). En clair une démonstration de maestria créative rarement égalée ces dernières années ("The sick rose", "Interstellar") pour un album-somme à la longueur démesurée (assez rare de notre époque) paradoxalement - et c'est tant mieux - jamais ennuyeux ni répétitif, c'est dire le niveau d'écriture atteint par les anglais qui gratifient l'auditeur d'une oeuvre aussi mégalomane qu'aboutie ("The emperor", "Oscar night // Embryo").

5 ans après son dernier album en date, Amplifier a définitivement changé de catégorie, passant du groupe de post-rock/progressif lambda au capital de sympathie évident à un potentiel poids-lourd du genre, prenant ainsi la place livre d'Oceansize (dont il a quelques temps après la sortie de The octopus embauché un ex-membre, Steve Duros) sur l'échiquier musical contemporain, ce en y imprimant durablement sa marque ("Fall of the empire", "Forever and ever"). Difficile dans ce troisième album de pas y voir leur chef-d'oeuvre, aussi inattendu qu'impressionnant. On appelle ça "avoir la classe" par ici...

[gb] The Octopus détaillé (324 hits)  External  ]

Amplifier / Chronique LP > Insider

amplifier_insider.jpg Signés chez l'éclectique SPV (Front Line Assembly notamment) depuis la disparition du label Music for Nation (chez qui le groupe avait fait ses débuts), Amplifier remet le couvert en 2006 avec un album qui doit confirmer les bonnes dispositions du groupe entrevues lors de ses débuts (le premier album en 2004 puis l'EP The astronaut dismantles HAL) l'année suivante). Car à l'époque, la formation anglo-saxonne avait marqué les esprits des spécialistes du genre par sa créativité et sa capacité à hisser ses compositions mélangeant habilement rock indé alternatif, influences progressives à la Porcupine Tree et structures alambiquées, à hauteur de cheville des référence incontournables que peuvent être Tool, A Perfect Circle ou Oceansize. Il faut dire que c'était sans doute à la croisée de ces trois références que l'on retrouvait alors l'essence même d'Amplifier. A l'heure d'Insider, deuxième effort des anglais, la question de savoir si l'on avait entre les mains la nouvelle offrande d'un simple groupe suiveur ou d'une formation marchant véritablement dans les pas de ces maîtres, restait dès lors posée.
Produit par le groupe lui-même et mixé par Chris Sheldon (Foo Fighters, Feeder et donc... Oceansize) ce nouvel opus va rapidement dissiper doutes et malentendus. L'instrumental et introductif "Gustav's arrival" évoquera Tool dans sa première partie, et toute une flopée de formations évoluant dans des sphères progressives, dans la seconde. Si l'effet n'est pas immédiat, ce prologue a le mérite de nous faire entrer de plein pied dans le vif du sujet et sert de transition idéale à "O fortuna", premier véritable morceau de bravoure d'Insider. Dense et structuré à la manière d'un Mogwai, complexe et maîtrisé façon Oceansize, ce titre impressionne par la faculté qu'on ses riffs massifs à faire naître quelques picotements bienvenus derrière la nuque. Mais Amplifier ne se contente pas de nous faire une démonstration de force virtuose, le trio mené par Sel Balamir (guitare, chant) a décidé de travailler ses atmosphères et le prouve avec un "Insider" éponyme et lorgnant du côté d'horizons post-rock. Et le groupe de surprendre à chaque titre, enchaînant un morceau (relativement) facile d'accès avec un autre plus expérimental ("Elysian gold" puis "Oort"), ne se privant pas au passage de nous mettre une grosse mandale technique avec un "Strange seas of thought" à la fois d'une créativité de tous les instants, mais également d'une maîtrise formelle effarante. Difficile de sortir de cet album d'Amplifier une fois que l'on y a mis le début d'un pied.
Le groupe ne joue pas sur ses acquis, semble se remettre au travail à chaque titre pour repousser sans cesse ses limites.Et pendant que la paire Matt Brobin (batterie) / Neil Mahony (basse) en met plein les mirettes, Amplifier affine ses titres ("R.I.P", "What is music?") sans jamais se répéter ni susciter le moindre ennui. Remarquablement compact et cohérent, cet album ne présente que relativement peu de défaut si ce n'est celui de manquer d'un soup_on de folie. Mais quand bien même, on voudrait se montrer particulièrement exigeant, il faudrait reconnaître qu'Insider est un disque qui impressionne. Et qu'au fil de ses écoutes successives, c'est Amplifier qui semble de plus en plus être de la race des groupes à (très) fort potentiel.