Alvvays - Antisocialites C'est un peu LE disque pop de la dernière rentrée scolaire. Une période pendant laquelle, après un trimestre de "pause" festivalière, une quantité incroyable de disques fait surface et par conséquent une chiée d'e-mails inonde ta messagerie électronique. Pas forcément la meilleure période pour découvrir et apprécier toutes les galettes qui ne demandent qu'à être écoutées voire décortiquées, comme le prêchent assez souvent si bien nos amis les attachés de presse. Et le comble dans cette histoire, c'est que sans crier gare (donc sans promo mail), Alvvays sort pile à ce moment-là son deuxième album, Antisocialites. Par le biais d'une consultation hasardeuse du site All Music, je tombe nez à nez sur une page regroupant les albums les plus plébiscités du moment dont le deuxième des Canadiens recueillant au passage la note parfaite de 5 sur 5. Trop beau pour y croire, je me jette sur ce disque tout en ayant dans le même temps de vagues souvenirs de cette formation autour de son single "Archie, marry me" sorti en 2014, un titre repris un an plus tard en live par Ben Gibbard de Death Cab For Cutie qui assoira définitivement le succès de ce groupe de Toronto mené par la sémillante et faussement timide Molly Rankin.

"In undertow" inaugure le disque et comporte toutes les substances qui font de lui le titre pop par excellence : une mélodie gracieuse et assurée, une atmosphère éthérée, une narration superbement menée avec des allégories suggérées dans la manière de chanter comme ce saccadé "There's no turning back..." évoquant des déferlements de vagues (dont Molly parle avant) sur les rochers, insinuant un refus, un point de non retour. Car il est bien question de ruptures et d'évasions sur cet Antisocialites, un thème cher à la frontwoman qui se paye le luxe d'inviter Norman Blake de Teenage Fanclub à faire les chœurs sur ce titre. "Dreams tonite", qui le succède, poursuit sa tentative de séduction avec cette voix si mélancolique qu'elle en ferait craquer plus d'un(e). "Plimsoll punks", tout comme "Your type" et "Saved by a waif", fait partie de ces morceaux dévoilant le côté plus enlevé du combo, le tempo augmentant, on est plus proche de Diet Cig que de Widowspeak, pour citer des artistes nord-américains qui gravitent autour de cette scène pop-rock indépendante. À ce propos, quiconque découvrira cette galette saisira assez rapidement le yo-yo entre ces deux aspects "calme-nerveux" (les suites "Not my baby" / "Hey" et "Lollipop" / "Already gone") qui le tiennent en équilibre et nous évite la compilation de chansons gnangnan à l'eau de rose comme pourrait l'être la touchante "Already gone" (un hommage au père de Molly décédé en 2000 dans un accident de la route).

La famille Rankin fut célèbre sur le continent nord-américain dans les années 90, avec sa formation country-folk celtique dont est issu le père de Molly. Cette dernière a choisi une autre voie musicale, celle d'Alvvays, une pop juvénile dans l'air du temps qui ne révolutionne rien mais qui a le don d'offrir des compositions qui font mouche presque à chaque fois, et de te rappeler pourquoi tu aimes ou as aimé tant ce genre. C'est simple, il n'y a quasi rien à jeter sur cet Antisocialites. Moralité : All Music avait donc raison.