The Alvaret Ensemble - Skeylja Deuxième album déjà pour le projet multicéphal The Alvaret Ensemble et cette fois-ci un line-up particulièrement imposant puisque ce ne sont pas moins de cinq nouveaux musiciens (Kira Kira, Eiríkur Orri Ólafsson, Ingi Garðar Erlendsson, Borgar Magnason) qui sont venus prêter main forte au quartet anglo-néerlandais. Neuf personnes pour un projet collectif étendu et un disque de musique minimale et expérimentale à la beauté diaphane étourdissante. Et dès les premiers instants, elle prend possession de l'auditeur en le livrant à la fantomatique partition de l'inaugural "Hoarn". Une pièce d'ouverture littéralement habitée par la voix féminine qui fait office de véritable halo vocal alors que son comparse masculin lui répond quelques secondes plus tard, psalmodiant quelques paroles en spoken-word des plus crépusculaires et cryptiques.

Jusqu'à l'effrayante explosion free/dark/black-jazz qui vient brutalement déchirer l'atmosphère que l'on qualifiera d'apaisé des débuts. Vrillant ainsi la tranquillité ambiante et plongeant alors l'album au cœur d'un univers particulièrement torturé que l'on retrouvera sur un "Sjouv" terrifiant qui mêle univers baroque horrifique et musique concrète insaisissable. Avec une pointe de néo-classique que l'on qualifiera de difficile à cerner. Entre-temps, un "Aaster" plus apaisé a enveloppé l'auditeur d'un manteau de douceur relative. Même si on sent déjà poindre ci et là les tourments futurs d'un album qui ne nous épargnera pas grand-chose. Du calme et recueillement d'un "Duunt" tout en clair/obscur à l'évasion lumineuse de "Kleifarvatn" en passant par le minimalisme absolu du néanmoins très beau "Selvatn", The Alvaret Ensemble et ses co-conspirateurs du moment livrent avec Skeylja une œuvre étourdissante, qui fait passer l'auditeur par à peu près tous les états, tout en risquant souvent de le perdre en chemin.

Pour autant, c'est aussi avec ce type d'album, sans doute à réserver aux initiés, que Denovali Records parvient à continuer de sortir des disques à un rythme défiant la normalité sans pour autant donner l'impression de ne plus rien avoir à dire. Au contraire, le label continue de défricher de nouveaux territoires sonores en permanence et les morceaux présents sur le deuxième opus de The Alvaret Ensemble en témoignent, notamment ce "Hafravatn" aussi énigmatique que son titre ou le "Borgarvatn" final qui vient se draper dans son exigeant ascétisme artistique. Jusque-boutiste, plutôt extrême et certainement à ne pas mettre entre n'importe quels tympans.