aaron_artificial_animals_riding_on_neverland.jpg Si le rock brut de décoffrage a, depuis quelques mois, retrouvé des couleurs chez nous (Zoe, Glowsun, 7 Weeks...), que le rock alternatif et le post-rock se porte bien (Curtiss pour le premier, Dont Look Back, Somna et Neko pour le second), la scène indie-pop hexagonale est quant à elle un peu sinistrée. Et pour cause, quand les anglais ont Coldplay, les américains Dredg et nos voisins belges Novastar, nous il nous reste presque que les yeux pour pleurer. Si, il y avait William Wilson, mais ils ont splitté, Masternova fait partie des quelques bons groupes mais il manquait quelque chose, jusqu'à l'automne dernier et l'arrivé d'Aaron. Découvert via le sublime U-turn (Lili) sur la bande-originale du film Je vais bien ne t'en fais pas, ces deux français vient d'attirer tous les projecteurs sur eux... Leur premier album était forcément attendu, Artificial animals riding on Neverland ne déçoit pas.
Car dès "Endless Song" et ses notes qui glissent sur un clavier mélancolique, ce chant habité et à fleur de peau... la paire fait parler le tube. Entre Coldplay et Archive, les français mélangent habilement mélodies pop incandescentes et arrangements légèrement électroniques, ils frappent un grand coup et ne peinent pas un instant à séduire un auditoire qui n'attend qu'une chose, ce fameux single paru sur la B.O du film de Philippe Lioret. Une attente rapidement récompensée avec ce qui sera sans aucun doute l'un des hit indé de cette année musicale. La qualité mélodique entrevue sur le premier titre confine cette fois au sublime. D'une intensité émotionnelle rare, "U-turn (Lili)" est une véritable pépite. Et cette merveille pop concoctée par le duo Aaron a la puissance d'un tube intemporel, voilà qui est difficilement contestable. Ces deux musiciens ont pris ce qui faisait le succès des meilleurs groupes anglo-saxons pour le passer sous leur propre scanner et mélanger tout ça à un songwriting des plus raffinés. Magique. Quelques arpèges graciles, un clavier sur lequel vient se greffer des mélodies suaves ("Beautiful scar", "Little love"), l'élégance poétique des compositions signé par le duo français ravira les amateurs de pop indé mélodique et raffinée. On a parlé de Coldplay et d'Archive pour les premiers morceaux d'Artificial animals riding on Neverland, la suite évoquera inévitablement Radiohead sur des titres plus à fleur de peau tel que "Lost highway" ou le magnifique "Angel dust" (un autre single en puissance). Deux titres où les beats éléctro et le chant tout en retenue ne sont pas sans évoquer l'oeuvre du quintet d'Oxford ou de Thom Yorke via son projet solo (The eraser)... Autant de véritables réussites auxquels s'ajoutent une reprise classieuse de Billie Holliday ("Strange fruit") et un titre intégralement interprété dans la langue de Molière ("Le tunnel d'or"), sur lequel on retrouve déjà ce petit truc en plus qui fait la qualité d'Aaron. Pour un premier album, le groupe frappe un grand coup et n'hésite pas à alourdir l'addition avec un "Last night thoughts" final maniant l'épure à merveille pour définitivement nous envoûter. Et au final, on referme cet Artificial animals riding on Neverland avec l'étrange impression d'avoir entre les mains une vraie merveille comme on en écoute que trop rarement. Un disque à la classe précieuse et un énorme carton en puissance.