Unfold 2017 Pourquoi avoir choisi ce titre d'album, Banshee o beast ?
Comme pour les titres de nos morceaux, nous attachons une importance toute particulière à la sonorité intrinsèque d'un nom d'album. Il peut avoir une résonance dans un concept global voire musical, ou pas. La sonorité des mots est prépondérante. Au-delà de sa traduction littérale, nous aimons dans « Banshee o beast » le fait que ça ne sonne absolument pas comme un album de métal, mais plutôt comme un album de hip hop. De manière générale, nous n'aimons pas trop les conventions.

Justement, les titres des morceaux sont en anglais, en latin et en français, le sens a autant d'importance que la sonorité ?
Nous avons toujours choisi nos titres de morceaux pour la façon dont ils sonnent. C'est quelque chose auquel nous tenons et que nous discutons tous ensemble en groupe. Tu vas y trouver une résonance avec les lyrics ou pas.

L'artwork est superbe, qui en est responsable, qu'est-ce qui vous a plu dans cette illustration ?
L'artwork de Banshee o beast a été réalisé par Fabian Sbarro, artiste avec qui nous avons collaboré depuis nos débuts sur la quasi-totalité de nos projets musicaux... Fabian a également travaillé sur Vancouver ou Enterprise par exemple. Notre relation dans la réalisation d'un album a énormément évolué au fil des années et nous sommes réellement allés très loin dans le développement de certain concepts ensembles. Pour Banshee o beast, nous voulions revenir à quelque chose de plus direct, de plus simple, afin de sortir d'un scénario qui révèle une histoire au fur et à mesure que le disque s'ouvre de panneau en panneau. Cette pochette est à la fois inquiétante, sombre et très épurée. Je dirais que la globalité fonctionne très bien avec la musique de ce nouvel album.

Unfold a pas mal évolué en terme de son, je le trouve moins clinique, plus "humain" ?
Le son est un éternel débat ainsi qu'une quête perpétuelle. J'aimerais beaucoup te dire que tout vient de nos choix mais tous les groupes du monde sont tributaires d'éléments extérieurs et de nombreux facteurs qu'il est très difficile d'entièrement maîtriser. Au final il s'agit toujours d'un voyage avec une destination à peu près inconnue.
Nous avons fait le recording au Studio Mécanique de Julien Fehlman à la Chaux-de-Fonds, puis le tout est parti en Suède chez Pelle Henricsson pour le mix. Magnus Lindberg s'est lui occupé du mastering. Nous avions déjà travaillé avec Pelle sur Aeon aony et pensions que sa patte collerait très bien avec nos nouvelles compositions, Il nous fallait quelque chose de très organique. Nous avons eu différentes approches et avons opté pour la plus « agressive », je veux dire par là que le mix ne laisse pas indifférent : tu aimes ou tu n'aimes pas. Ce n'est pas un mix de compromis.

Pourquoi avoir pris cette direction ?
Cosmogon, notre album précédent, était vraiment très noir et ambient. Banshee o beast étant définitivement plus dynamique, nous voulions qu'il sonne brut, dans un esprit plus live, que ça bave un peu. Et puis, un peu de larsen n'a jamais tué personne !

Vous aviez des influences noise cachées ?
La carrière d'Unfold commence à avoir une belle durée, nous ne comptons plus tout ce qui a pu nous influencer au travers des années. Mais le jeu reste toujours le même : s'affranchir de tout ça et délivrer quelque chose qui nous semble original, risqué, différent.

Le chant évolue lui aussi, par la force des choses...
Danek le chanteur d'Unfold ayant eu des problèmes aux cordes vocales... il doit d'ailleurs subir une opération sous peu, nous avons dû nous résoudre à avoir un remplaçant pour cet album. C'était également une question de timing, car si nous devions repousser le recording des voix de plusieurs mois, nous serions probablement passés à autre chose dans nos têtes, le momentum aurait disparu.
Louis Jucker, chanteur de Coilguns entre autres, a accepté de relever ce défi, et nous avons été soufflés de voir avec quelle aisance il a trouvé le bon chemin sur ces compos, amenant des idées très originales. Il a vraiment « fait le job » comme on dit. C'est un artiste très complet et un garçon adorable. Danek reste le chanteur, notre chanteur et humainement il est évidemment irremplaçable.

Le W-Fenec fête ses 20 ans début 2018, Unfold a déjà 22 ans, vous êtes nostalgiques de vos débuts ?
A nos débuts nous étions encore plus mauvais avec nos instruments respectifs, donc sur cet aspect-là : non pas de nostalgie. Mais nos débuts signifient aussi des vies très différentes de celles que nous menons aujourd'hui. Il est plus délicat de mener de front le rock & roll et la vie de famille. Quand nous avons démarré, nous répétions trois fois par semaine, aujourd'hui difficilement une. C'est le plus gros challenge dans le fait de composer un album : utiliser le peu de temps que nous avons à bon escient et de manière productive.

Unfold - Banshee O beast Qu'est-ce qui vous manque le plus ?
Un groupe est un microcosme dans lequel tu vis plein d'expériences humaines incroyables. Nous avons fait des choix dès nos débuts, judicieux ou non, mais je crois que rien ne nous manque vraiment car nous continuons tout simplement à faire la même chose avec une énergie intacte. Les attentes sont très probablement plus élevées, mais ça fait partie du jeu. C'est le chemin qui est important, pas l'arrivée.

Qu'est-ce que vous regrettez le moins ?
Le fait d'avoir eu la chance de faire une tournée une fois dans notre vie.

Quelle était votre situation vis-à vis d'internet en 1998 ?
Je m'en souviens difficilement, mais je crois que Division Records, le label que j'ai créé et qui aujourd'hui continue avec l'énergie d'une nouvelle équipe qui fait un super job avait une page hébergée sur Geocities.com, avec un peu de contenu sur chaque groupe signé à cette période, dont Unfold faisait partie. C'était très sommaire.

Quel changement a eu internet dans la vie du groupe ?
Avant toute cette période internet, je me rappelle encore partir à Paris avec mes promos dans le sac à dos, les rendez-vous avec la presse musicale à tenter de convaincre les gens au coup de cœur car je ne pouvais pas me permettre de mettre un budget conséquent dans la pub. La presse musicale était un vecteur d'information très important, de même que les fanzines et le réseau.
Internet a certes donné une exposition sans précédent à tous les groupes de la planète, mais tout cela à aussi tué la presse écrite et créé d'autres problèmes. Comme par exemple quand ton album est disponible en totalité sur internet avant même sa date de sortie. Je parle à tellement de gens qui vont payer leur café 7 euros chez Starbucks mais qui ne comprennent pas pourquoi ils devraient payer 1 euro pour un morceau qui a mis des mois pour être composé, enregistré, mixé et masterisé.... Extrapole ce comportement à une large échelle et c'est tout le système qui se casse la figure. Réunir un budget pour faire un album devient un casse-tête quasi impossible à résoudre.

Ça permet d'avoir de nouveaux fans dans le monde mais concrètement, ça aide ?
On ne se pose pas vraiment la question car c'est un état de fait. Nous sommes loin d'exceller dans tout cela, mais on se rend également compte que nous contrôlons difficilement ce qui est publié. Le fait d'être actif en digital te permet au moins de poster du contenu de qualité. Mais c'est également l'abondance de tout et par tous les canaux, donc les gens intéressés par la musique en général doivent aussi trier dans la marée d'information qui leur parvient.

C'est toujours compliqué de trouver des dates de concerts...Qu'est-ce qu'il y a au programme de 2018 ?
Nous venons de terminer une série de concerts pour la sortie de Banshee o beast, nous n'avons plus de rien de programmé pour l'instant. La sortie d'un album génère un buzz qui est extrêmement court, il faut tenter de capitaliser là-dessus. Cela va avec le monde d'aujourd'hui, tout est « obsolescence programmée ».
J'espère sincèrement que de temps à autre, des personnes ressortent un de nos albums et ont du plaisir à le ré-écouter. Sans avoir la prétention d'avoir achevé un « classique » ce serait déjà une grande satisfaction !