taint_the_ruin_of_nova_roma.jpg Nous sommes en 2005. Après dix ans de pérégrinations musicales incertaines, Taint sont enfin son premier album grâce au bon sens artistique de Lee Dorian (Cathedral), fondateur du label Rise Above. The Ruin of Novà Roma, donc, un disque mûri pendant une petite décade et qui se veut comme étant le portrait d'une civilisation capitaliste deshumanisée, ne capitalisant que sur la valeur de l'argent et vouée à sombrer dans la dégénérescence comme le fit en son temps l'empire romain d'occident. Musicalement, une fois que les légions se sont mises en ordre de bataille, la marche en avant semble peut-être inexorable mais il ne faut pas oublier que le gallois est fier et qu'il resistera quoiqu'il lui en coûte.
Pratiquant la politique de la terre brûlée ("The sound-out competition"), le power-trio anglo-saxon nous inflige une dérouillée sludge metal hardcore qui laisse des traces. Une guitare bien grasse et qui envoie du riff bien saignant à tout va, une basse saturée et turgescente, une batterie qui met tout ce qu'elle a dans les fûts à démonter les cloisons, le tout, pour un album qui fluctue entre sludge saillant, post-hardcore tellurique et stoner acéré comme la lame d'un glaive de centurion. Les rythmiques sont particulièrement lourdes, les légions déroulent, les fiers gallois serrent les rangs, Taint ne s'embarrasse pas des convenances et fait ce qu'il a à faire, avec maîtrise et puissance ("The darksman"). Un chant particulièrement rugueux, un feeling dantesque et des rythmiques infernales, Taint est un rouleau-compresseur que rien ne semble pouvoir arrêter. Peut importe ce que le peuple gallois devra affronter, il résistera encore et encore quelque soit l'ennemi qui se dressera devant lui. Il prendra pour modèles les spartiates menés par Leonidas dans le couloir des Thermopyles et enverra ses guerriers au combat, se sacrifiant pour la cause. Sans jamais baisser les yeux.
Dans cet esprit, Taint atomise les tympans, envoie la saturation avec un plaisir non-dissimulé et écrase tout sur son passage. Les uppercuts sonores donnent toujours plus d'intensité aux fulgurances postcore qui bercent un "Amaranthine" sans concession, Taint est incroyablement puissant mais pas pour autant absent de toute subtilité (l'instrumental éponyme "The ruin of Nova Roma"). Et là est toute la finesse d'un album sanguin et viscéral qui aurait pu se poser comme un manifeste sludge post-machin truc de premier ordre, mais qui prend le temps de voir sa musique explorer d'autres horizons. On aurait mis The Mars Volta et Isis dans une marmite, on les aurait saupoudré de ((The) Melvins) et d'un petit groupe estampillé stoner de passage dans le coin, on aurait assaisonné ça à la sauce "gallois underground pas content", que l'on aurait eu Taint. Un groupe qui vient, sans sourciller une demi-seconde, de bousculer le trône de l'arrogant imperator romain, posant brutalement ses guêtres dessus en piétinant sans vergogne sa couronne de lauriers. Alea jacta est.