Obituary Obituary Le Zénith, encore timide au départ, se remplit peu à peu malgré les bouchons du périphérique (merci Hidalgo ! Mais surtout quelle idée de faire débuter les concerts si tôt !), pour une soirée enflammée où se succèdent pas moins de quatre groupes.
Le temps de se garer, de s'harnacher, de prendre l'accred, c'est pile à la fin du 3ème titre que je rentre dans le pit photo... comme dirait l'autre, pas le temps de rentrer que je me suis déjà croisé en ressortant...

Premier groupe à ouvrir le bal, donc : Jesus Piece. Et dès les premières notes, la foule se retrouve happée par une vague de décibels fracassants. Fondé en 2015 à Philadelphie, ce groupe hardcore américain a imposé son style avec une intensité rarement égalée. Jesus Piece débarque avec des morceaux tirés de leur premier album, Only self, un véritable rouleau compresseur sonore qui explore des thèmes sombres et introspectifs. Setlist assez compacte, avec explosion de riffs saturés et de voix rauques, où Aaron Heard s'évertue à repousser les limites de l'intensité vocale. Le groupe plonge dans des sonorités metalcore, avec des breakdowns qui emportent le public, le tout porté par une rythmique implacable. Jesus Piece affiche une puissance brute ; le public ne se fait pas prier pour reprendre les paroles en chœur malgré la violence du son. Le groupe distille ses hymnes au hardcore, purs et sans compromis. Les jeux de lumière plongent la salle dans une ambiance oppressante, parfaitement en phase avec les thèmes abordés. Le groupe a joué dans une salle qui tardait à se remplir et termine son set par un "free Palestine".

jinjer Étonnamment, ce sont les vétérans d'Obituary et non Jinjer qui montent sur scène après Jesus Piece. Et là, la fosse s'épaissit : l'attente est palpable. En quelques accords, le groupe de Tampa en Floride démontre pourquoi il est un pilier du death metal depuis les années 80. Avec "Slowly we rot" en guise d'ouverture, les aficionados comprennent qu'Obituary n'est pas là pour faire dans la demi-mesure. John Tardy, sa voix gutturale pleine de rage, et ses compagnons de scène délivrent une avalanche de morceaux issus des albums marquants de leur carrière. La setlist est taillée sur mesure pour les fans, avec des titres comme "Threatening skies", "Deadly intentions" et "The wrong time". Mais c'est "Chopped in half" qui provoque un véritable cataclysme dans la fosse. Le groove implacable de "Slowly we rot" et les riffs lourds de "War" appuient la réputation inégalée du groupe dans l'univers du death metal, et les fans ne peuvent que s'abandonner aux headbangs frénétiques. Le groupe enchaîne avec maîtrise, livrant des classiques où chaque riff semble destiné à écraser l'âme, avant de clôturer sur une version magistrale de "Solid state". On assiste à un groupe au sommet de son art, fidèle à son essence et à sa brutalité inégalée, sans fioritures, et avec l'énergie dévastatrice de leur jeunesse. Obituary prouve une fois de plus que le death metal coule encore dans leurs veines.

Puis vient le tour de Jinjer, ce quatuor ukrainien emmené par la charismatique Tatiana Shmailyuk. Je ne m'étais pas attendu à entendre des "À poil" ou des "en réalité, il n'y aurait pas une bonnasse au chant, ce groupe ça serait vraiment de la merde". Bref la scène metal a encore à travailler sur ses membres... Donc, lorsque Jinjer fait son apparition, la tension se charge d'une aura différente. Le groupe ukrainien, célèbre pour ses performances scéniques uniques, est prêt à envoûter le public parisien. Mené par son impressionnante chanteuse, Jinjer propose une setlist éclectique, naviguant entre les riffs percutants et les mélodies éthérées qui ont fait leur succès. "Sit stay roll over" donne le ton dès les premières minutes, suivi de morceaux intenses comme "Ape" et "Fast draw". Tatiana, véritable tourbillon de charisme, alterne avec aisance entre growls profonds et chant clair, embarquant le public dans un voyage émotionnel. Pour ceux qui n'ont encore jamais vu Jinjer en live, la performance est une découverte : des morceaux comme "Teacher, teacher !" et "Colossus" captivent par leur complexité musicale et les changements de tempo vertigineux. La première interprétation de "Kafka" en live trouve des échos dans le public, qui répond par des acclamations continues. "Perennial" et "Rogue" clôturent leur set en apothéose, et il est indéniable que Jinjer n'a fait qu'agrandir sa base de fans parisiens ce soir. Première pour moi et je trouve le set un peu trop linéaire, j'ai profité de quelques titres pour aller m'aérer pour être prêt pour la tête d'affiche et les adieux que Paris va lui faire.

Sepultura Sepultura La tournée d'adieu de Sepultura est un événement marquant dans l'histoire du metal. Avec 40 ans de carrière à célébrer, le groupe brésilien compte bien un concert mémorable au Zénith de Paris, seule date française de ce long périple d'adieux. Cette tournée de 18 mois, marquant la fin de leur incroyable aventure, n'est pas une célébration de leur musique mais aussi un témoignage de leur impact sur la scène mondiale, et j'espère que le concert parisien tiendra toutes ses promesses.
Dès les premières notes, Sepultura a établi une connexion palpable avec son public. L'ouverture sur "Arise" a immédiatement plongé la salle dans une atmosphère électrique, le ton étant donné pour une soirée où les fans allaient revisiter les moments forts de la carrière du groupe. "Refuse/Resist" et "Propaganda" ont suivi, déclenchant un chaos maîtrisé dans la fosse. Nous, les photographes, avons malheureusement appris que ce soir, l'intro compte comme une chanson... donc pas plus de deux titres dans le pit... quel dommage. Ces morceaux, issus des années glorieuses de la période Chaos A.D., ont rappelé la puissance sonore de Sepultura, portée par des riffs incisifs et des rythmes percutants.
Derrick Green, au chant depuis 1998, a démontré une fois encore pourquoi il a su s'imposer comme une figure centrale du groupe après le départ de Max Cavalera. Sa voix puissante et son charisme naturel ont donné vie aux morceaux, qu'ils soient issus de la période classique ou de l'ère moderne. En parallèle, Paulo Jr., dernier membre fondateur encore actif, a assuré un lien symbolique avec les débuts du groupe, son jeu de basse structurant chaque titre avec une précision redoutable. Andreas Kisser, fidèle depuis 1987, a brillé avec ses solos et ses riffs tranchants, témoignages de son rôle central dans la pérennité du groupe. La setlist, soigneusement élaborée, a alterné entre les classiques incontournables et des titres plus récents, prouvant que même dans leurs dernières années, Sepultura continuait de repousser les limites de leur créativité. "Célébrer la mort par la vie" ou comment euthanasier un groupe en pleine force de l'âge, le nom de la tournée ne trompe pas. Les morceaux de leur dernier album, "Quadra", comme "Guardians of Earth" et "Isolation", ont ajouté une dimension contemporaine à la soirée, tout en montrant l'évolution musicale d'un groupe qui n'a jamais cessé d'explorer de nouvelles voies. Sur "Guardians of Earth", le groupe est rejoint par Sylvain Demercastel, croisé un peu plus tôt (notamment pour arrêter de subir Jinjer) au bar avec Poun et les Locomuerte (dont le batteur est également batteur de Savage Lands). Outre Sylvain, d'autres membre de l'équipe et de la famille Sepultura se joignent à Greyson Nekrutman avec des percussions complémentaires. Le jeune batteur tient tout son rôle derrière les fûts et fait oublier son prédécesseur parti chez Slipknot quelques mois plus tôt. Savage Lands aura été une sorte de fil conducteur tout au long de la soirée, les membres d'Obituary arborant leur t-shirt de l'armée des arbres. Tout au long du concert, le backdrop ou les écrans LED ont retracé l'histoire du groupe ou accompagné visuellement certains titres par des courts métrages. Il est étonnant de voir projeté des images d'archives avec les Cavalera, mais c'est toute l'histoire du groupe que l'on célèbre. Le public, composé de fans de toutes générations, a répondu avec une énergie contagieuse, chantant, pogotant et levant les poings au rythme des morceaux. Chaque titre résonnait comme un hymne, un rappel de l'héritage monumental de Sepultura. "Roots bloody roots", choisi comme dernier morceau de la soirée, a été accueilli par un rugissement collectif. Ce titre emblématique, extrait de leur album Roots, a cristallisé tout ce qui fait de Sepultura une légende : une énergie brute, des paroles engagées, et une capacité unique à fusionner les sonorités du metal avec leurs racines culturelles brésiliennes.

Sepultura Ce concert n'était pas qu'une performance musicale, c'était une célébration de quatre décennies d'une carrière jalonnée de succès, de défis, et d'une influence indéniable sur le genre. Sepultura a marqué la scène mondiale, non seulement par ses albums, mais aussi par son engagement à repousser les frontières du thrash et du groove metal. Leur tournée d'adieu est un au revoir conscient et planifié, un acte de gratitude envers leurs fans et leur histoire.

Alors que les lumières se rallumaient, l'émotion dans la salle était palpable. Les spectateurs quittaient le Zénith avec un mélange de nostalgie et de gratitude, conscients d'avoir assisté à un moment unique. Sepultura tire sa révérence avec éclat, laissant derrière eux un héritage musical immortel. Alors qu'il y a peu, Kisser ouvrait la porte à un retour des Cavalera pour le dernier concert à Sao Paulo, il a, quelques jours après, indiqué que les réenregistrements des premiers albums par les deux frères n'avaient aucune utilité... Le doute plane, mais ce qui est certains c'est que rien ne nous a autant donné envie de visiter le Brésil en 2026 pour voir ce concert de clôture. Le groupe nous a néanmoins ici permis une "petite mort" qui restera à jamais gravée dans nos cœurs.