Songs of Townes Van Zandt Songs of Townes Van Zandt, c'est l'hommage le plus élégant possible rendu à un songwriter folk/country décédé en 1997 et quasiment vénéré par ses pairs, ce malgré un succès public finalement assez "confidentiel". Le genre à ne pas trop faire en sorte de plaire aussi, un solitaire, vivant dans sa caravane et pensant ses journées à jongler entre alcoolisme forcené et un goût prononcé pour l'héroïne comme les médicaments, le tout ajouté à un humour très noir doublé d'une sérieuse tendance à la dépression. En clair pas le type que l'on invite chez soit pour mettre l'ambiance la veille de Noël... et pourtant une quasi légende dans le milieu, à tel point que ce sont rien moins que Scott Kelly & Steve Von Till soit les deux compères de Neurosis ainsi que Scott Wino Weinrich (Saint Vitus, The Obsessed notamment) soit un cast de luxe qui s'y sont collés sur ce pour ce tribute album paru chez Neurot Recordings.

Le programme est d'une simplicité évidente : une petite dizaine de folk-songs crépusculaires et désenchantées, promenant leurs tourments au détour de mélodies brisées par les fantômes d'une vie sommes toutes assez triste ("If I needed you"), une country feutrée, habitée par des textes au cynisme acerbe ("St.John, the Gambler"), celui d'un artiste qui n'était clairement pas bien dans sa peau et n'a su réellement exprimer son mal-être qu'au travers de sa musique ("Black crow blues"). Townes Van Zandt vivait dans un chalet sans électricité ni eau courant lorsque le succès naissant l'embrassa. Mais celui-ci décida de l'ignorer pour continuer sa route sans varier d'un iota, refusant consciemment de bouleverser son quotidien partagé entre sa guitare folk, son whisky et ses paradis artificiels, pour mieux faire la seule chose qu'il savait faire réellement selon lui : se perdre de quelque manière que ce soit. Notamment dans sa musique, racée, plutôt brute de décoffrage et pourtant d'une classe incomparable ("Lungs", "Rake"), si bien que l'hommage ici rendu par trois monstres sacrés du hard/metal/rock/sludge/doom/post-hardcore des trente dernières années, en plus de faire (re)découvrir un artiste folk/country majeur du XXe siècle à ceux qui ne le connaissaient pas ou peu, se révèle être LE tribute-album de référence.

Un disque rare parce que précieux, porté par des musiciens à l'intégrité irréprochable et qui n'ont certainement pas fait un "coup" pour remplir leur compte en banque avec cet album. Mais au contraire pour s'offrir un vrai plaisir de songwriter reprenant les oeuvres d'un modèle, avec ce qu'il faut de maturité artistique pour ne pas dénaturer le propos originel tout en apportant ce petit "truc" en plus qui rend cet hommage difficilement dispensable. En témoigne la très belle et cendrée "Snake song", ou le minimaliste "Nothin" qui respirent la classe. Par contre dépressifs s'abstenir parce que sur un morceau comme "Tecumseh valley", on est quand même à deux doigts et demi de finir la chronique au bout d'une corde avant que "A song for" ne finisse de boucler la boucle sur ce sans-faute évident.