Pour sa troisième livraison, Saar nous emmène dans un monde où les Dieux croisent les hommes pour des aventures extraordinaires, celui de la mythologie grecque, et mis à part le passage du "Styx", effectué en moins de trois minutes paisibles, chaque voyage est une odyssée, un parcours progressif où les instruments sont maîtres de l'espace et du temps. Si l'ossature et les constructions évoquent évidemment le post-rock, la hargne et l'agressivité de quelques distorsions envoient le groupe sur un Olympe où traînent Caspian, Russian Circles et Year Of No Light.
Maintenant que j'ai toute ton attention, si tu vas plus loin, il faut que tu acceptes de te perdre. Car ce Gods peut être déroutant, quel lien entre cette façade d'immeuble et les croyances de l'Antiquité grecque ? Comment passe-t-on de quelques notes claires et délicates à cette saturation sourde pour enjamber un pont ? Verra-t-on un jour la fin de ce labyrinthique chemin vers les Enfers ? Faut-il se fier à "Tiresias" ? Son humeur changeante est-elle un mauvais présage ? Les "Gods" sont-ils juste une statistique comme le prétend un révérend du monde contemporain et donc une simple affaire de math ? Pourquoi reléguer "Truth" vers l'infini ? Les murmures de Julien (venu de Wolve) apportent-ils un message ou ne sont-ils qu'une autre couche d'instruments destinée à humaniser et rendre vraie toute cette histoire ?
Resté presque sans voix, Saar nous laisse aussi presque sans réponse. Plonger dans leur univers est une aventure en soi, c'est aussi un piège car on ne gagne rien à en sortir, tel le chant des sirènes, leur musique est hypnotique, on s'y replonge avec délice, quel qu'en soit le prix à payer.
Publié dans le Mag #49