Petite rencontre bien sympathique avec un de mes groupes préférés juste avant leur concert à l'Usine de Genève ! Arrivée à Genève en retard, je rate le premier groupe (Stairland) et j'ai juste le temps d'attraper l'organisateur pour un interview avec Poison the Well, un peu speed dans les loges, ils me proposent du red bull pour me mettre à l'aise... beuarkkk !
Bon il n 'y a QUE Derek et Ryan les deux guitaristes ! Et Derek est aussi bavard qu'incompréhensible tant il parle vite ! Ou c'est peut-être moi qui rame en anglais...
poison the well live
Salut ! Vous vous sentez comment ce soir ?
Derek : Là je m'échauffe pour ce soir !
[Derek effectivement ne tient pas en place et gesticule, s'étire.tandis que Ryan est confortablement vautré sur le canapé.]
Ryan : Oui on est super excités, on est jamais venu en Europe avant ! Ca nous fait vraiment quelque chose de spécial ce soir !
Stressés ?
D : Oui beaucoup ! Je ne sais pas s'il y aura du monde mais j'ai du mal à me contenir.
R : Non, ça va ... on verra sur scène !
Question un peu bateau pour attaquer : pour vous, aujourd'hui, dans le monde, dans la vie en général, où sont les larmes, où est le rouge [cf le titre du dernier album, Tear from the red] ?
R : Le titre explique assez bien je trouve tout le processus de cet album. On pourrait dire que les larmes sont là pour la violence du monde, ce qui nous entoure. Le rouge représente le sang pour moi.
D : c'est aussi représentatif de l'honnêteté de la conception de cet album. On a voulu être sincères avec nous mêmes sur ce disque et je pense qu'on a réalisé cela.
Tear from the red semble être un album de transition.
D : Oui c'est exactement cela. Ca remonte au début. Lorsque nous avons commencé ce groupe nous étions tout jeunes.
R : On avait entre 16 et 18 ans pour certains ! Toi t'étais le plus petit !
D : T'es sûr que j'étais si jeune ? Je me rappelle qu'on était tout fou, on aimait vraiment les premiers disques et on a eu de bons moments. Puis on a voulu aller dans une autre direction, enregistrer quelque chose de différent. On en est fier aujourd'hui.
Comment se fait-il que cet album sonne aussi "poppy" par endroits ? Je pense à "Horns and tails"
R : Cette chanson est un accident. En fait on l'a composé et on a réalisé que c'était une grosse bêtise. Et finalement on l'a apprécié telle quelle.
D : Mais elle aurait pu être fait différemment. Ca a été le hasard. Le nouveau cd aussi comporte des erreurs mais il fait vraiment "neuf". Je dirais représentatif d'un album plus cru, agressif, un "pissed-of record".
R : Il a aussi un coté sombre et triste avec beaucoup de réflexion et d'introspective. Jeffrey l'a envisagé dans une approche différente, avec un style moins fleurie et plus direct.
Un ami m'a fait remarqué que le Cd commençait et se terminait sur la même note de guitare et forme une boucle.
D : (rires) C'était accidentel puis intentionnel ! Avec Ryan on avait composé pas mal et je cherchais un riff. J'ai composé le dernier titre et ensuite on s'est aperçu qu'il finissait sur la même note que le premier de l'album ! Alors on a décidé de le garder.
J'ai entendu dire que vous étiez fans des Deftones... avez-vous écouté des morceaux du nouvel album ?
D : Humm. J'ai téléchargé des trucs, ça m'a semblé très mélodique... Mais ça m'a aussi vraiment donné envie d'entendre la suite ! C'est le premier groupe qui m'a fait rentrer dans la musique un peu "lourde".
Quels sont les groupes qui vous ont influencés, notamment sur le nouvel album ?
D : C'est pas spécialement sur le nouvel album... mais en général j'écoute énormement de Radiohead et Deftones, Refused aussi. The Smiths, un très bon groupe.
R : Du rock classique, des trucs qui ne sont pas vraiment proche de ce qu'on aime d'habitude dans le groupe. Led Zeppelin biensûr, Pink Floyd et les Bad Brains.
D : Et Johnny Marr !
Qu'est ce qui vous inspire dans la littérature, le cinéma.
R : J'aime beaucoup Stanley Kubrick pour sa capacité à faire valoir ces moments dans les films où le silence est plus poignant que le son.
D : Un auteur..je dirais Kurt Vonnegut. Je ne sais pas si tu connais... mais c'est très sombre, il a une façon de rendre des problèmes sérieux d'une façon quasiment hystérique. C'est intéressant de rendre cela aussi par la musique.
Quelle est votre vision, votre recul sur ce que vous avez faits ces dernières années avec le groupe ?
R : Je n'aurais jamais imaginé un tel niveau de succès. Surtout sur quatre ans ! C'est incroyable, je me sens vraiment chanceux et je sais qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui ont cette chance !
Des regrets, des souhaits ?
R + D : Non pas de regrets... On a toujours des souhaits !
Pourquoi une seule date en France (et une à Genève) ?
R : C'était un plan de dernière minute, on a été averti à l'arrache (rires). Mais, c'est encore à confirmer, on devrait revenir en septembre.
Comment c'était la tournée avec Hatebreed ?
D : Wow, c'était gigantesque ! Ils ont vraiment été comme des grands frères pour nous ! Ce sont des mecs qui bossent très dur, ils ont une grande liberté d'esprit aussi. Et surtout ils ne font pas de compromis !
Ce n'était pas les gros durs qu'on imagine ?
R : C'est pas ça, ils ont tout simplement les pieds sur terre et sont authentiques. Assez "vieux jeu" en quelque sorte, mais ils travaillent énormément.
Votre meilleur souvenir de concert ? le pire ?
R : Le meilleur était celui dans le New Jersey je pense, pour moi. C'était pour le nouvel an, le 31 décembre 1999, la première fois qu'on jouait avec la formation du groupe actuelle. Le pire, c'était le concert du Fantasy Fest 1999 en Floride, où Derek n'était pas là. Notre bassiste avait la diarrhée !
poison the well live
Y'a t-il un univers particulier à Poison the Well, des valeurs auxquelles vous tenez et que vous aimeriez transmettre avec votre musique ?
D : Pour nous le plus important c'est de créer une musique sincère. C'est pas tant d'être quelqu'un de bien, mais de faire quelque chose de pur à nos yeux. On essaie de ne pas faire de compromis. Par exemple on voudrait réussir à vendre les t-shirts aux prix les plus bas. On aimerait que les gens sachent qu'on en a rien à faire de l'attitude rock star à la con et qu'on fait pas de différences avec les gens ou "l'avant/après".
Des rythmes rapides, des chants clairs qui rompent avec un ambiance sombre et torturée qui prédomine... et d'où cela vient-il ?
R : Il y a parmi nous des gens assez excentriques, avec une personnalité très forte, peut-être trop. Cela créer parfois des tensions. Ces mauvais moments permettent de faire sortir tout ça, comme un thérapie. On crée cela ! C'est quelque chose de très dur et aussi une étape agréable lorsque tu es dans la composition. Et puis la plupart des gens le disent, c'est très attirant d'être dépressif (rires) !
D : Pour moi composer c'est comme une réponse automatique. L'émotion est impliquée dans la chanson et toi avec. Tout le monde voudrait pouvoir écrire sa dépression.
A propos d'écrire, que pensez vous des paroles ? Vous sentez vous inclus dedans ?
D : Oui, surtout dans les nouvelles compos. Toutes les paroles collent parfaitement avec chaque chanson. Ca a beaucoup de sens, que chacun va percevoir à sa façon.
Que signifie cette date énigmatique présente dans "Opposite of december" : 12/23/93 ?
R : C'est très personnel, je ne voudrais pas m'étendre dessus. Disons de façon simple que c'est la dernière fois que j'ai parlé à ma mère.
Pouvez vous m'en dire plus sur l'artwork des albums ?
D : Ils ont tous été réalisés par Don Clarck sauf pour le nouveau qui est fait par Jacob Bannon (Converge). Don est un ami dont le travail concordait bien avec ce qu'on voulait rendre.
Vos projets ?
R+D : Tourner le plus possible !
Là, ils m'avertissent qu'on doit terminer l'interview car n'ayant pas vu le temps passé il est déjà l'heure. de jouer (pour eux) et de redescendre dans la fosse pour moi. Au pays de Mickey Mouse, il y a aussi de très sympathiques musiciens, c'est bon à savoir ! Le concert se déroule bien, Derek et surtout Ryan enchaînent les postures et les bonds les plus désarmants, grosse grosse claque pour ce groupe qui a désormais l'habitude de la scène et de très bons atouts en poche pour dépasser le stade de gros groupe underground. Leur nouvel album lui sort le 1er juillet et s'intitule You come before you. Espérons qu'ils reviennent vite...
Un énorme merci à Mister x83x, du site x83x.ch, coordinateur/organisateur du concert et grâce à qui j'ai eu cette interview ! Merci à l'Usine (KAB) de Genève grâce à qui le concert s'est très bien déroulé et à Sonja pour les astuces, photos et autres bidouilles. Et encore bravo et merci à Derek et Ryan et à tout Poison the Well !Photos : Sonja