Leur EP éponyme avait estomaqué bon nombre de suiveurs de la scène française, leurs concerts avaient confirmé le potentiel de destruction des tympans entrevu en studio et le chaos délirant présenté en vidéo, les Pogo Car Crash Control nous ont maintenu en haleine avec quelques morceaux lâchés sur le net avant ce premier album qui répond à toutes les attentes et comble nos espoirs. Direction Déprime hostile, opus inaugural qui n'effacera pas des mémoires l'EP fondateur (et ses titres devenus des tubes comme "Conseil", "Paroles / M'assomment" ou "Crève") mais s'affiche comme un premier gros pavé jeté dans un cocktail de cervelle.
Depuis fin 2017, on connaît déjà "Déprime hostile", le clip mixe images live et joie de vivre dans le métro parisien, la musique envoie des riffs plus rapidement qu'on ne peut les compter, on a le droit à une escalade de notes qui finissent par tout bastonner et un refrain simpliste facile à scander. Mention spéciale pour le pont/break option math-core qui déglingue sa maman. L'autre clip qui t'a donné un avant-goût du bordel ambiant, c'est l'excellentissime "Comment lui en vouloir" et sa mise en images de la thérapie par la destruction, aussi bien du matos de zik sur une aire d'autoroute qu'un kebab attaqué à dents nues pour finir par ... non, je ne spoile pas la fin, t'iras voir après ! Plus rock, ce morceau presque "à la cool" permet de vérifier si tes hanches ont besoin de prothèse et si tu chantes à peu près juste car tu fredonneras forcément la petite mélodie. Il ne sera pas évident pour le combo de tourner un clip pour chaque titre (ce qu'ils avaient fait pour l'EP) mais on sait que de ce côté-là, il y a déjà un gros niveau. Et un paquet d'autres titres méritent d'être un peu plus exposés, "Je suis un crétin" et son côté Didier Super pour l'écriture, "Hypothèse mort" pour la vélocité du riffing et son impressionnante nervosité qui se fracasse en cours de route avant de reprendre de plus belle, "En boucle" tout en puissance et hypnotique. Un de mes préférés est "Rancunier", tout à fait dans la veine P3C, il est brut, s'intéresse au quotidien et mixe influences math/grunge/métal tout autant que les rythmes et les tons, c'est un putain de bordel poétiquement incorrect mais qu'est-ce que c'est bon ! D'autres trouveront plus d'intérêt à la construction plus classique de "C'est pas les autres", à "Je perds mon temps" et ses facilités harmoniques, à "A quoi ça sert" et ses saturations, à "Insomnie" et sa mélancolie en sons clairs, Pogo Car Crash Control file à bouffer à tous ses fans et ouvre des possibilités, démontrant qu'il est même capable de lâcher le micro et de faire groover les instrus sur la dernière plage qu'est "Crash test".
On savait qu'ils en étaient capables, ils l'ont fait, les Pogo Car Crash Control écrivent leur légende avec ce Déprime hostile ébouriffant de maîtrise technique, surclassant pas mal de monde dans l'organisation du chaos et synthétisant à merveille des dizaines d'années d'influences énervées. Déjà un grand groupe.
Publié dans le Mag #32