Depuis bientôt 15 ans, Loïc a rejoint le collectif The Ocean toujours mené par le stakhanoviste Robin (guitariste, auteur, compositeur du combo mais aussi patron de Pelagic Records), il y a posé sa voix et nous offre un peu de son temps pour répondre à de nombreuses questions sur l'actualité brûlante du groupe.
The Ocean a passé en revue toutes les ères géologiques, c'est Robin qui a imposé cette thématique ?
Oui, Robin est en charge de conceptualiser les thèmes des chansons. En tant que fondateur du groupe, il joue un rôle essentiel dans la direction artistique. Le groupe porte véritablement sa vision créative. Il possède une vision unique et bien définie qui guide notre musique et notre identité artistique.
Avec Holocène, c'est terminé, vous savez s'il y aura un nouveau cycle ou si ce seront des albums "indépendants" par la suite ?
Honnêtement, je ne le sais pas pour le moment. Je crois qu'il reste une ère géologique très courte dont il n'a pas encore abordé le thème. À l'heure actuelle, je ne peux pas dire s'il prévoit de l'explorer à l'avenir. Ça dépendra probablement de son inspiration et de la direction qu'il souhaite prendre pour la suite.
Le collectif ressemble davantage à un groupe, comment fonctionne la prise de décision ?
Il est vrai que notre line-up est resté assez stable depuis un certain temps, mais je ne pense pas que cela signifie que le collectif soit mort. En ce qui concerne la prise de décision, c'est principalement Robin. En tant que fondateur du groupe, il a toujours été le principal à prendre les décisions et cela ne devrait pas changer. Bien sûr, il nous consulte et demande nos avis et corrige s'il le faut, mais la décision finale lui revient la plupart du temps.
Sur certains morceaux, l'inspiration des textes vient quasiment de l'actualité... Il est plus facile d'écrire sur des thèmes du monde moderne ?
Je suppose que oui, mais pas forcement. Il faudrait poser la question à Robin. En fin de compte c'est lui qui compose et écrit tous les textes donc il serait le mieux placé pour répondre à cette question, je pense.
Il y a des citations de Lautréamont, en français, tu pourrais chanter en français ?
En effet, nous avons inclus des citations de Lautréamont ainsi qu'une partie parlée en français. Ça démontre que rien n'est impossible en musique, y compris chanter en français. L'anglais a l'avantage d'être une langue internationale qui permet d'atteindre un plus large public. Je ne pense pas que je vais chanter en français avec The Ocean, peut-être une chanson dans le futur, mais ça serait tout à fait possible de chanter en français dans un autre projet.
Des citations de Guy Debord sont utilisées dans le livret, tu sais que Hypno5e a mis des samples de Debord sur A distant (dark) source ?
On en avait un peu parlé avec Manu, mais je ne savais pas qu'ils avaient utilisé des samples.
L'album est assez "clair", avec pas mal d'ambiances plus légères, des cuivres... ça reflète votre état d'esprit au moment de composer ?
Les idées de base ont été composées par Peter pendant la pandémie et, ensuite, il les a fait écouter à Robin qui les a modifié et adapté à l'esthétique sonore de The Ocean. C'est vrai, l'album est plus lumineux avec une forte base d'éléments électroniques. Nous avons ajouté des cuivres car ils sonnaient mieux avec notre vision musicale que l'utilisation d'une section de cordes comme on l'avait déjà fait dans le passée. L'état d'esprit était assez différent et un peu bizarre pendant la pandémie et on savait pas trop comment l'avenir allait être. On a eu beaucoup plus de temps comparé aux anciens albums.
La musique vient toujours avant le chant et avant les textes, tu aurais pu poser plus de chant lourd ou la musique ne s'y prêtait pas suffisamment ?
Oui, en effet, la musique arrive toujours avant le chant dans le processus de création. Pour cet album, nous avions envie de créer quelque chose de différent et il est vrai que les morceaux demandaient une approche plus calme et plus émotionnelle, je trouve. Nous avons également essayé des parties vocales criées, mais cela ne produisait pas le résultat que nous recherchions car la musique ne s'y prêtait pas suffisamment.
Vous avez déjà sorti deux clips, ils ont été tournés en même temps ?
Oui, c'est exact. Les vidéos ont été tournées lors de notre tournée américaine en support de Katatonia. Une partie a été filmée à Montréal, les parties en studio ont été enregistrées à Los Angeles, et les scènes sur la plage et en pleine jungle ont été filmées à Porto Rico pendant les quelques jours où nous avons donné notre premier concert là-bas. Le clip a été réalisé par notre ami Drew Storcks, qui fait également partie du groupe Shy, Low.
C'est facile de faire l'acteur ?
Non, personnellement je ne trouve pas que ce soit facile du tout. C'est vraiment un domaine différent qui exige beaucoup de temps et de préparation qui inclut le visuel et on n'était pas super préparés pour cela, ça s'est fait entre deux concerts un peu à la fraiche mais nous sommes très satisfaits et contents du résultat final.
Les clips sont liés, d'autres sont prévus ?
Oui, un autre clip est prévu, il doit sortir dans les prochains jours ou dans quelques semaines, il est actuellement en phase de finalisation.
Pourquoi avoir choisi ces morceaux-là ? Il y en a des plus courts qui coûteraient moins cher !
Après plusieurs discussions avec Drew, nous avons pris la décision de tourner "Parabiosis" en premier. Les idées qu'il nous a présentées nous ont vraiment séduites. Ensuite, nous avons choisi "Subatlantic" comme deuxième clip. Nous avions prévu de filmer ce deuxième clip à l'observatoire d'Arecibo à Porto Rico. Nous les avions contactés des mois à l'avance et obtenu leur autorisation, mais une fois sur place, ils ont changé d'avis. Ça nous a poussés à improviser sur place pour trouver un nouvel endroit et élaborer un nouveau scénario. C'était un peu rock and roll mais, encore une fois, on est vraiment content du résultat final.
Travail en studio, travail sur les clips, travail sur l'artwork, des idées suivies jusqu'au bout, un chant qui s'éclaircit... ça fait pas mal de points communs avec Tool, non ?
(Rires) Oui, peut-être que nous avons quelques points en commun avec Tool. Je ne pense pas que cela soit intentionnel, mais il est clair qu'ils sont au sommet de leur art et dans tous les aspects de leur musique. Ça fait toujours plaisir d'avoir une comparaison comme celle-ci mais ils ont quand même quelques coups d'avance.
Vous préparez une grosse tournée européenne, ça va être intense, tu fais une préparation physique ?
Non, je ne me prépare pas physiquement pour une tournée mais peut être qu'il faudrait que j'y songe. C'est vrai que ça va être une tournée intense, avec 28 concerts en 30 jours, dont 17 sans day off, ça risque de piquer un peu. Je vais surtout essayer de récupérer un max du jet lag après notre retour d'Afrique du Sud, d'Australie et de Malaisie et de passer du temps avec ma famille et de dormir autant que possible pour être au meilleur de ma forme.
Tu regardes la liste des dates en te disant que tu pourras faire un peu de tourisme ou vous n'allez pas avoir le temps de profiter des villes ?
Absolument, autant que possible, pour être honnête. C'était mon rêve lorsque j'ai rejoint le groupe en 2009. Je voulais sortir de la Suisse et voyager autant que possible, découvrir de nouveaux endroits, rencontrer de nouvelles personnes et goûter à de nouvelles expériences culinaires et culturelles. Après, des fois en raison de contraintes de temps, c'est pas toujours possible de tout visiter, mais on essaye d'explorer le plus possible.
Ce sera avec This Will Destroy You, est-ce que tu te dis parfois que ce serait pas mal avec du chant à tel ou tel passage ?
Oui, c'est exact, nous allons tourner avec This Will Destroy You, ça va être un cool tour. Il y aura des premières parties avec des groupe du label dans différents endroits avec Lost in Kiev pour la France, Playgrounded pour la Hollande et d'autres bands. Pour la création de chansons, c'est pas quelque chose qui m'arrive très souvent je dois dire. Il m'est arrivé d'avoir quelques idées de temps en temps, mais ce n'est pas très fréquent.
Vous avez joué cet été au ArctAnGent, vous avez donc fait à peu près tous les gros festivals, lequel est ton préféré ?
Oui ArctAnGent était vraiment génial cette année. Il y avait une grande diversité de groupes, et le public était fantastique, très enthousiaste et détendu. Personnellement, tous les festivals sont assez cools en général mais j'ai un petit faible pour le Roskilde Festival au Danemark c'est vraiment une bonne ambiance avec une programmation très variée.
Vous êtes désormais chez Pelagic Records, c'est plus simple de travailler avec "la maison" ?
Oui, c'est certainement plus facile de travailler avec ton propre label par rapport à un label majeur. Chaque situation est unique mais travailler avec son propre label permet d'avoir une atmosphère plus familiale, plus à l'écoute et avec une plus grande flexibilité dans notre processus de création et également avec nos demandes. Après, avec Metal Blade, c'était vraiment cool, ils étaient quand même à l'écoute et ils nous ont permis de faire pleins de belles choses et d'exporter notre musique un peu partout.
Tu as de nouveau bossé avec Herod, tu les connais depuis longtemps, c'est difficile de leur refuser ?
Je connais Pierre depuis de nombreuses années, c'est un copain d'enfance bien avant d'avant d'avoir rejoint The Ocean et nous sommes toujours restés en contact. Donc tout se passe assez naturellement et simplement entre nous et vu que les morceaux sont juste excellents, je ne peux pas refuser !
Comment s'organise ta participation à un de leurs titres ?
Mon processus de travail reste plus ou moins le même. Il m'envoie des songs, et je choisis celles qui me parle le plus et j'essaye des choses. Il est essentiel que la chanson résonne en moi et suscite une émotion particulière. Ensuite, je travaille sur une ligne vocale pour obtenir le feu vert du groupe et ensuite je me concentre sur les paroles en dernier.
Passer du temps pour répondre aux interviews, c'est une corvée ou un plaisir ?
C'est un mélange des deux, je pense. C'est certainement flatteur et gratifiant de constater que les journalistes s'intéressent à ton album. Et c'est marrant car parfois les questions sont exactement les mêmes d'un magazine à l'autre. Je suppose que cela fait partie du jeu. En tout cas, je voulais te remercier pour cette interview, c'était très agréable ! Merci et longue vie à vous !
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Merci Loïc, merci Clément (Vous Connaissez ?).
Photos : Jaqueline Vanek
Publié dans le Mag #57