Norna-Norna Quand les deux membres d'Ølten, en l'occurrence Christophe (guitariste) et Marc (batteur), ont partagé un titre de leur opus Mode ("Gloom") avec Tomas, leader du cultissime Breach et initiateur de The Old Wind et Terra Tenebrosa, ils devaient être ravis. Raccourcir la distance entre la Suisse et la Suède pour un titre, c'est pas mal mais pourquoi jouer ensemble dans un nouveau groupe ? Certainement que l'idée a été semée à ce moment en 2015... Elle a germé, résisté au COVID et Norna est né. Un premier opus, Star is way way is eye, sort sur un confidential label norvégien en 2022, mais les connections de Tomas font le job (il a aussi participé à un titre de The Ocean) et Pelagic Records offre une plus grande exposition au nouvel album qui ne porte pas de nom.

Si les groupes évoqués à l'instant ne te sont pas inconnus, tu sais déjà que Norna part avec un haut degré de sympathie et tu ne seras pas surpris que le trio œuvre en terres doom/sludge/post-metal. Les zicos helvètes sont amateurs de riffs lourds et lancinants tandis que le chanteur suédois aime quand ça hurle, pour ne léser personne, ils font tous trois ce qu'ils préfèrent. Le résultat se tient en six titres, découpé en deux parties (pour mieux coller au vinyle, pourquoi pas cette superbe édition gold ?) même si chaque pièce fait largement son poids et ne se digère pas aisément. Je ne sais pas comment les mecs ont écrit leurs morceaux, mais sur certains, il semble assez évident que le chant n'arrive qu'en tout dernier. Non seulement les parties instrumentales se suffisent quasiment à elles-mêmes, mais en plus, la voix se rajoute à l'ensemble comme une couche supplémentaire, jamais comme un élément qu'il faudrait mettre en avant, comme si Tomas se fondait dans la masse et cherchait à suivre les déchirements des guitares et la brutalité de la batterie plus qu'à imposer ses lignes et ses maux. L'ensemble forme un sombre chaos où les respirations sont fugaces (l'intro de "Shine by its own light" ne contient qu'une lointaine saturation !) et la volonté d'oppresser prédomine. On se sent écrasé de bout en bout, la masse des riffs et des effets pèse tant que quand arrive "The sleep", on est à bout de force et on ne peut que s'effondrer en subissant les derniers coups de butoir. D'autant que ceux-là sont un peu plus rapides et puissants que d'autres ("Samsara" paraît doux à côté).

Éreinté par ces quarante minutes, il faut impérativement changer de disque pour conserver sa santé mentale et ne pas transformer le cerveau en bouillis. Mais il est déjà trop tard, Norna a un truc qui fait qu'on a envie d'y retourner, quand bien même ça va de nouveau nous faire mal.