Lilium Sova - Epic morning Quatre ans après un Tripartite chaos resté relativement confidentiel du fait de son exigence noise-postcore abrasive et d'un léger manque d'exposition médiatique, les Suisses de Lilium Sova, que l'on pensait enterrés après une belle période d'hibernation, ressortent de l'ombre pour proposer une sequel à ce premier opus. Le titre, Epic morning, sonne comme le réveil d'un groupe qui a entre-temps changé, autant au niveau de son personnel, que de son approche artistique. Moins post-hardcore qu'auparavant, plus noisecore jazzy, moins massif, plus vénéneux et addictif, Lilium Sova est également devenu un quartet mais n'oublie pas pour autant le Hard bien velu qui a fait sa griffe à ses débuts discographiques.

Renforcé par des guests (issus de Rorcal, Kehlvin, Impure Wilhelmina) présents tout au long de cet Epic morning conceptuel, Lilium Sova distille ici une musique âpre, magnétique ("1.00 a.m locked-in syndrom", "2.00 a.m insomnia"). Une œuvre se drapant dans une densité noisecore, insidieuse et subversive, comme un caractère épique et aventureux dans ses lignes instrumentales, lesquelles semblent régulièrement partir dans tous les sens. pour invariablement retomber sur leurs riffs. Groove massif, textures synthétiques ("3.00 a.m. call of sova" puis "4.00 a.m. parasomnia"), le groupe monte doucement en pression, délivre des ambiances drone/doom-jazz que ne renieraient pas le Bohren & der Club of Gore ou The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble et captive l'assistance en l'hypnotisant doucement. pour mieux lui vriller les tympans quelques instants plus tard.

Parce que ce qui devait arriver après l'écoute des pistes 3 et 4 se produit fatalement et comme prévu avec la cinquième et ce "5.00 a.m. premonition" aussi bluffant de par ses progressions harmoniques que par ses fugitifs coups de folie, une sorte de court prologue à "6.00 a.m. ondine's curse", lequel fait naître un sentiment de malaise, laissant planer une esquisse de menace sous-jacente sur l'album en laissant le champ libre aux lacérations hardcore de "7.00 a.m. dawn of sweet villain". Du hard suisse mâtiné de fulgurances noisecore/prog/jazzy complètement démentes et décharnées, de quoi butiner les membranes auditives de l'auditeur avec un plaisir non-dissimulé. Et de s'offrir un ultime défouloir avant LE climax de cet Epic morning, soit un morceau-titre de quelques vingt-deux minutes et vingt et une secondes d'une épopée ambient/doom/jazz super-noïsique a priori injouable en live. Même si avec ces gens-là, on ne sait jamais vraiment.

Livré dans un très classe digisleeve à l'esthétisme étudié, Epic morning a également le bon goût de soigner la forme autant que le fond. Histoire de se rendre définitivement indispensable. Qu'ajouter à cela sinon qu'on lui colle une mention d'excellence avant même de relancer l'écoute pour saisir une nouvelle flopée de petits finesses made in Lilium Sova.