Intro qui fait doucement grimper le tensiomètre, une mise en condition qui déjà laisse quelques indices sur ce qui va nous exploser au visage dans les prochaines secondes... puis la déflagration, le Chaos et le déferlement de décibels. Une bulle de haine qui éclate enfin et laisse écouler des torrents de souffrance, indicible, presque insoutenable, "Je ne suis plus un homme", sature l'atmosphère en imposant une pression auditive soutenue et constante. Marquée par des riffs tranchants et une rythmique en appui de ce chant tout en hurlements déchirants, c'est à une véritable épreuve sensorielle que nous convie le groupe, un traitement de choc par le biais duquel Kazan met à jour les déviances de la condition humaine, ses légères imperfections qui peuvent à tout moment la faire basculer dans l'enfer de les démence, et les confronte à la pyramide des besoins de Maslow (d'où le titre).
Cette théorie (qui vaut ce qu'elle vaut...) édictée par un certain Abraham Maslow dans les années 40, suppose que les besoins humains soient différenciés et de fait hiérarchisés selon 5 niveaux : besoins physiologiques / besoin de sécurité / besoin d'appartenance / besoin d'estime / besoin d'accomplissement. Selon lui, l'être humain (donc le consommateur lambda) passe à un besoin d'ordre supérieur quand le besoin de niveau immédiatement inférieur est satisfait, concept d'ailleurs repris par de nombreux théoriciens du marketing (logique...). Musicalement, Kazan transpose les préceptes de la pyramide de Maslow sur des compositions qui ne transigent pas avec une violence brute et sans concession, lesquelles agrippent l'auditeur et ne lâchent plus jusqu'à la fin de l'album ("So say we all", "Être et (s)Avoir - Part I & II"). Entrecoupant le tout d'un titre sur lequel il s'est associé à Arcane XVII pour un brûlot HxC doublé d'un spoken word au texte particulièrement soigné, le combo dijonnais frappe fort et va au bout de son sujet, sans la moindre concession.
Une incision métallique, des riffs qui s'entrechoquent et une voix en mode "hurlements absolus" qui concasse à tout va, "Ma vie c'est du lourd" (ne pas faire attention au titre, un peu ridicule...) permet au groupe de mettre tout ce qu'il a dans les chaussettes et d'aller au charbon sans le moindre complexe pour se poser comme un croisement tordu d'un Mihai Edrisch et d'un Tanen passé en mode nihiliste façon Overmars. Associé à une production très crue, le post-hardcore très (mais alors très...) screamo des Dijonnais instille un sentiment de malaise latent, qui après un split déjà remarqué avec After Taste il y a deux ans, écorche sérieusement les tympans, si bien qu'elle perd parfois un peu en impact à force de nous labourer les membranes. Car à trop en faire, les Kazan usent un peu l'auditeur..., d'autant qu'on a parfois bien du mal à appréhender des textes un peu trop masqués par des vagues déferlantes de vociférations hardcore ("Carnal" en est l'illustration parfaite malgré son déchaînement instrumental plus que maîtrisé). Défaut récurrent chez nombre de formations estampillées "post-hardcore et affiliés", ce bémol fait de Maslow 0 un disque imparfait quoique plutôt maîtrisé... surtout le potentiel est clairement là. Encore un groupe à mettre dans le coin du viseur...
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