Dire qu'on n'attendait pas spécialement cet album solo du leader de KoRn n'est pas tout à fait vrai... Parce que si aujourd'hui Korn ne surprend plus grand monde en studio se contentant d'être une belle tête d'affiche et un rouleau compresseur live, on sait que Jonathan Davis aime toucher à tout, il avait d'ailleurs plutôt réussi les titres pour le film La Reine des damnés prolongeant le plaisir quelques années plus tard par une première tournée "solo" où il jouait ces morceaux écrits pour le cinéma et reprenait un peu de KoRn (l'album live Alone I play en témoigne), il y avait eu à la même période (soit le début des années 2000), le singulier See you on the other side où l'empreinte de HIV et ses aspirations avaient quelque peu vampirisé KoRn ce qui n'avait pas trop plu aux fans de la première heure. D'où le sentiment ambivalent au moment de découvrir ce Black labyrinth (qui sort chez Sumerian Records qui a déjà fait confiance à un autre leader en l'occurrence Chino des Deftones pour son Crosses), ça ne sera pas du KoRn mais ça pourrait être pas mal et surtout, les idées électro-chelou seront exploitées ici et non pas dans un futur album du groupe de Bakersfield.
Pour autant avec un chanteur pareil, aussi aisément identifiable, difficile d'occulter son background et de ne pas aller chercher des comparaisons avec son groupe. Au passage, la batterie est tenue par Ray Luzier, les claviers par Zac Baird et la basse par Miles Mosley, trois comparses de Jon depuis une dizaine d'années, tous trois plus ou moins mis en avant au sein de KoRn ou du travail solo de son leader. Jonathan Davis n'est donc pas tout fait tout seul, pour ajouter quelques guitares il a même appelé un vieil ami en renfort en la personne de Wes Borland (Limp Bizkit, Black Light Burns...). La trame des titres, les lignes de chant, les mélodies, les ambiances et même la production sont l'œuvre de Jonathan Davis (qui a su s'entourer pour un peu plus de prod et le mixage par des pointures). Et ce qu'il nous propose est plutôt pas mal... Morceaux avec une ligne de chant qui rampe avant de vous capturer l'esprit ("Underneath my skin", "Medicate"), grosse recherche dans les rythmes et les sonorités ("Walk on by", "What you believe" et même de beaux passages avec des influences orientales sur "Final days" et "Basic needs"), usage raisonné du sampling ("Please tell me"), quelques envies métalliques ("Everyone"), l'album est assez varié sans que cela ne nuise à l'ensemble car la voix de Jonathan assure un liant évident. Finalement, on ne peut pas reprocher à Davis de trop vouloir bidouiller et de rajouter des couches et des couches d'instruments sauf sur un "Happiness" assez torturé et un "What it is" trop simpliste. L'ensemble est plutôt cohérent et tient la route mais à moins d'être fan du bonhomme, pas sûr que ça intéresse grand monde.
Publié dans le Mag #34