Interlude - A la deriva Entre émo-rock et post-hardcore avec du chant (en espagnol), Interlude nous fait entrer dans son univers avec un "Entre aires de grandeza" qui pose discrètement - mais avec une élégance certaine - les bases de sa griffe musicale. Plutôt atypique dans sa manière de sonner, pas forcément comme on a l'habitude de l'entendre un peu partout sur la scène post-quelque chose européenne et pourtant sans aucun amateurisme, au contraire. Car avec son A la deriva, le groupe ne suit pas les courants traditionnels du genre mais s'inscrit plus dans la tradition émo-hardcore/postrock ibère qui a marqué les esprits il y a quelques années (ou encore aujourd'hui) avec des entités comme Standstill, Zul ou Pupille et autres Toundra.

Et la suite de confirmer cette impression sur des titres à l'image d'"Olvido", hargneux et vindicatif ou "La voz de los sin voz" qui sonne comme un cri du cœur emo-hardcore-rock sur-tendu, dopé par une ferveur punk écorchée vive. Une approche artistique qu'Interlude maîtrise parfaitement, ce qui ne l'empêche pas s'essayer à quelque chose de légèrement différent, en déclenchant quelques lames de fond post-hardcore-rock sur "Viernes de Nakba", lesquelles parsemées d'éclairs ravageur évoquent alors le punk aux tentations HxC outrageusement révolutionnaires : des courants mouvementés qui ne lui font pas peur. Car le groupe navigue à vue avec la houle pour se bercer, mais garde son cap, sans dériver d'un iota, éclaircissant son horizon sur un "Ecos del Norte" à la fois intensément habité et magnifiquement lumineux. Toujours en se reposant sur un socle instrumental de premier choix.

Musiciens plutôt doués et créateurs efficaces, les Espagnols d'Interlude connaissent la recette de leur mixture sonore sur le bout des riffs, l'assaisonnant à leur guise pour la rendre toujours plus âpre ou pimentée. Même quand ils y ajoutent un petit soupçon d'indie-pop discrètement parsemée ci et là, avant de revenir à leur fondamentaux fougueux ("La senda del esclavo") ; et de faire jouer la corde émotionnelle de l'auditeur sur l'éponyme (et très beau) "A la deriva", avant de conclure en douceur sur un élégant et intimiste "Wounded knee 1890". Si ça ce n'est pas avoir la classe, ça y ressemble quand même dangereusement. Et en bons faiseurs appliquées, les zikos d'Interlude savent où ils veulent aller quitte à braver les éléments et une mer déchaînée. Parce que crise ou pas, la scène ibère respire toujours elle.