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Herod / Chronique LP > Iconoclast

Herod-Iconoclast On a raté le deuxième album d'Herod mais pas le troisième, et ça aurait été une belle connerie que de passer à côté de cet Iconoclast. Les Suisses ont calmé quelques-unes de leurs (h)ardeurs et ont - sans surprise tant les liens avec The Ocean sont nombreux - charmé Pelagic Records pour livrer un album de post-metal où la violence des riffs n'a d'égal que les frissons procurés par les instants délivrés de la puissance brute mais habités par des esprits aériens.

Aussi à l'aise quand ça bourrine que quand ça câline, Herod ne fait pas trainer les transitions, passant rapidement d'une ambiance à l'autre, son spectre étant bien plus large à ses extrémités qu'en son centre. De ce fait la "moyenne" musicale n'est quasi jamais audible, on est toujours soit dans le cyclone, soit dans son œil. Seul peut-être l'ultime "The prophecy" montre quelques atmosphères déchirées, la voix de Loïc Rosetti (The Ocean) y étant certainement pour quelque chose, elle transperce les murs de guitare de par sa clarté avant de sombrer du côté obscur. Les autres invités sur ce disque ont choisi leur camp assez aisément, l'organe de Matt McGachy (Cryptopsy) donne dans le guttural sur "The edifice" tandis que le chœur Les Mystères des Voix Bulgares enchante "The ode to..." avec une présence phénoménale et un mariage particulier avec le son du groupe, le morceau en devient mystique, cette collaboration, plus inattendue, se révèle être la plus excitante, au cœur de la galette, ce titre se fait plus que remarquer. Parmi les autres moments marquants, je placerais volontiers "The becoming" et "The obsolete" particulièrement sauvages, lourds et brutaux. Si tu aimes quand ça blast, tu seras servi.

Rares sont les héritiers de Cult Of Luna qui fracassent autant les tympans dans leurs parties death et arrivent tout de même à reprendre de la hauteur en calmant le rythme, à ce titre Herod mérite le détour et fait un bel hommage à ses aînés, contrairement à ce que pouvait laisser penser le titre de l'album, les icônes sacrées sont respectées...

Publié dans le Mag #57

Herod / Chronique LP > They were none

Herod - They were none Malmö, en Suède pour les nuls en géographie, année 2006. Pierre, musicien suisse de passage, achète une guitare baryton qu'il accorde six pieds sous terre histoire de s'amuser avec le vieil enregistreur 4 pistes qu'il a sous la main. Inspiré par le climat local et la morosité scandinave de l'instant, il compose une dizaine de morceaux dans son coin dans le cadre d'un projet solo baptisé Herod. Sans suite immédiate. Ce n'est qu'après être rentré au pays puis rencontré, quelques années plus tard, Fabien et David que le groupe prend définitivement forme avant de se rendre au Studio Mécanique de La-Chaux-de-Fonds en compagnie de Julien Fehlmann (Coilguns, The Ocean, Unfold, etc...) pour mettre en boîte son premier album. Intitulé They were none, celui-ci sort au printemps 2014 chez le danois Mighty Music, alors que le trio est entre-temps devenu quatuor avec l'arrivée en son sein de Bertrand comme deuxième guitariste.

Une affinité somme toute logique avec l'Europe du Nord et des influences nordiques qui résonnent à plein volume dès les premières mesures d'un album qui, avec "The fall" ou "The glory north", renvoie invariablement l'auditeur vers les figures tutélaires du Hard scandinave que sont Breach, Cult Of Luna ou Switchblade. Autant dire qu'on cause ici metal/hardcore/prog' à la froideur clinique qui, entre martelage rythmique glacial voire aliénant et riffing mastodonte, distille des ambiances de fin des temps avec une efficacité redoutable ("Inner peace"). Alors fatalement, quand Herod sort la grosse artillerie, un morceau du calibre de "Northern lights" fait office de bulldozer émotionnel (mais aussi sauvagement burné) qui pratique la stratégie de la terre brûlée. Là où les Suisses passent, rien ne repoussent sinon un sentiment latent de désolation décharnée ("Sad Hill Part I"). Le désespoir qui prend aux tripes également ("Albert Fish") et qui sous-entend chez le groupe une noirceur plus que palpable.

Question sauvagerie brute, They were none, en tient également une belle couche ("We are the failure", "Betraying Satan"), démontrant par là-même qu'Herod sait aussi ravager les membranes en jouant sur les plates-bandes d'un Terra Tenebrosa (Suède toujours...) mais avec encore une fois cette foudroyante capacité à mettre une puissance de feu salvatrice et implacable dans ses impacts, en termes de lourdeur abrasive également. En témoignent les ogives thermonucléaires "Watch'em die" ou "No forgiveness for vultures" scellant définitivement le sort de ce premier album dévastateur ("Sad hill part II"). A tous les niveaux.. et surtout à celui d'une maestria formelle et artistique béton.