Heirs - Alchera A la première écoute (via l'inévitable MySpace), Heirs n'inspirait pas grand chose d'extraordinaire. La compression du son sur la plate-forme n'aidant pas vraiment à retranscrire les finesses de la musique de cette entité australienne capable de mêler rock downtempo, metal industriel et postcore navigant entre deux eaux, on était quand même largement resté sur notre faim. Etonnant de la part d'un label aussi exigeant que Denovali Records (Celeste, Kodiak, Les Fragments de la Nuit, Mihai Edrisch tout de même...). Alchera, premier effort des wallabies, débarquant sur la platine, c'était donc là l'occasion idéale de se faire une idée définitive sur ce dont était réellement capable le groupe, le temps d'un album entier et près de quarante deux minutes de musique se faufilant entre les genres. Pour mieux les appréhender. Car Heirs s'adresse autant aux inconditionnels des neurasthéniques Mono, qu'aux amateurs des poussées de fièvre post-metal signées Pelican ou aux nostalgiques du magma indus ambient torturé de feu-Godflesh. Et pour cause, afin de comprendre Alchera, il faut nécessairement l'écouter en entier et non pas au détours de quelques vagues extraits essaimés sur les sites communautaires.
Dès "Plague Asphyx", les Australiens plantent le décors. Celui d'un monde en déliquescence, sans même une lueur d'espoir à l'horizon. Au bord du gouffre. Un titre aux rythmiques pénétrantes et hypnotiques, des nappes indus sombres et torturées qui emplissent l'atmosphère, rendant celle-ci complètement étouffante, le groupe libère son substrat musical et marque durablement les esprits. Car Heirs est ici vénéneux, discret, elliptique, mais subrepticement fatal. Au bord du choc anaphylactique, l'auditeur enchaîne en s'injectant un "Mockery" qui lui permet de retrouver un semblant de souffle. Apaisant dans ses riffs de guitares qui semblent laisser le temps s'écouler à l'infini, le groupe maîtrise son sujet. Une saturation qui reste tapie dans l'ombre, discrètement omniprésente et les mélodies métalliques aux textures rock qui se diffusent inexorablement afin de mettre l'auditeur sous leur coupe, Heirs impose délicatement sa griffe musicale, jouant des dégradés de gris pour atténuer une noirceur qui aurait pu être seulement contrastée par quelques éclats d'une lumière diaphane. Mais le groupe sait également frapper fort, avec "Mandril" notamment ou "The white swell", deux titres qui donnent un peu plus de souffle à un album finalement très classe. Comme quoi les premières impressions...