Le groupe excelle en studio et ne l'est pas moins sur scène. Les queues pour entrer dans les tentes du Hellfest lors de leurs prestations soit "en solo" soit en mode "Regarde Les Hommes Tomber X Hangman's Chair" sont la démonstration du succès grandissant de la formation. Un peu plus anecdotique, le fait qu'ils aient été choisis pour représenter la scène metal lors des "Nuits Collectives" dans le cadre des Francofolies semble leur attribuer une place à part dans le paysage rock français. Depuis la première fois où je les ai vus sur scène en première partie de luxe de Mass Hysteria au Zénith - volant presque sans le vouloir la vedette à la tête d'affiche - j'ai beaucoup d'affection pour ce groupe et ce dernier opus n'est pas là pour me faire changer d'avis.
Les Parisiens de Hangman's Chair ont signé pour cet album un deal avec Nuclear Blast Records ce qui leur permet d'avoir plus de moyens tout en gardant leur liberté pour produire leur musique. Le résultat tient en neuf titres et moins d'une heure. L'arrivée dans l'écurie allemande semble leur donner plus de moyens comme ce single, le presque éponyme "The loner" dont le clip est un court documentaire réalisé par Kendy Ty autour de quatre protagonistes comme une plongée dans le cœur des banlieues parisiennes. C'est peut-être cela aussi qui rend le groupe si attachant, des banlieusards normaux qui produisent certainement la plus belle musique metal, presque inhumaine tant elle touche au plus profond. Le titre instrumental "Pariah and the plague" n'est pas là pour me contredire.
S'il fallait les classer dans un genre en particulier, il faudrait appeler cela du doom rock, mais leur musique est bien trop fine pour être cantonnée à un style et il faudrait certainement rajouter "Cold". La biographie nous les positionne par GPS à la croisée de Type of Negative, Life of Agony et Sisters of Mercy, je les vois plus comme des descendants banlieusards d'Alice in Chains tant la voix de Cédric Toufouti est superbe et rappelle celle de Layne Staley, non pas en copier-coller mais par ce qu'elle procure comme émotions. Les compositions du groupe sont toujours d'une finesse qui n'a d'égale que la lourdeur des riffs qui les accompagnent. Les compositions tirent leur essence des expériences réelles vécues par chaque musicien et c'est certainement ce qui bouleverse à l'écoute de ces titres. Julien, Cédric, Mehdi et Clément arrivent avec beaucoup de classe à retranscrire toutes leurs émotions purement humaines dans un metal pesant et vaporeux à la fois. Les neuf titres de l'album nous plongent dans l'obscurité avant de se transformer en quelque chose de mélancolique avec une lourdeur maitrisée. "Sombrement lumineux" ai-je pu lire sur un site de vente en ligne généraliste et je crois que c'est certainement la meilleure définition de leur musique. Du made in France, du made in banlieue qui marquera définitivement 2022 tant au niveau des classements d'albums que des meilleurs lives de l'année.
Il serait erroné de dire que le titre de ce nouvel album sied au groupe tant cet album nous plait à la rédaction. Pour ma part, il sera même certainement sur le podium des albums marquant de l'année. A loner donc... Et si j'osais, je dirais "a boner" tant il y a de la joie intense à écouter cet album. Conservons peut-être phonétiquement le mot "bonheur" en français dans le texte, le bonheur d'écouter un album magistral de bout en bout.
Publié dans le Mag #52