Gojira - Fortitude Est-ce que c'est parce que la période depuis Magma a été longue (5 années) ou parce que ce nouvel opus est vraiment exceptionnel que dès les premières écoutes de Fortitude, j'ai eu la sensation d'écouter un disque important dans leur discographie ? Alors qu'ils n'ont pas vraiment fait d'erreur depuis leurs débuts, depuis From Mars to Sirius, je n'avais pas ressenti un tel truc. On les a vus gravir la montagne et cet album sonne un peu comme le drapeau qu'ils planteraient au sommet.

Roulements, notes de guitares aussi excitées que nous, break et BING, Gojira is back. "Born for one thing" amène aussi sa part de douceurs et comme le tout est parfaitement construit, on est à genoux en à peine deux minutes. La grosse artillerie technique et "classique" est déjà de sortie, on se gave de breaks, d'harmoniques, de descentes de manche et de coups de massue. On retrouve la même alchimie sur "New found" ou "Grind" qui sont tout aussi terriblement efficaces. Si, selon moi, l'opus sera un marqueur dans leur histoire, c'est que les mélodies n'ont jamais été aussi présentes et intégrées à leur death metal, "Another world" ou "The trails" sont presque "rock" avec une grosse partie planante pour le second cité (qui peut renvoyer à la fin de From Mars to Sirius et "World to come" ou "From mars"), des plages plus accessibles mais totalement dans le moule Gojira. Le paroxysme de cette évolution, c'est la paire axiale "Fortitude" / "The chant", le titre qui donne son nom à l'album qu'on peut traduire par "courage" (voire bravitude en dialecte deux-sévrien) est une sorte d'intermède où les sons clairs et un chant tribal se partagent la vedette, une mélopée reprise pour l'introduction du titre suivant, une intro qui surprendra celui qui écoute les titres n'importe comment, le genre de passage qui pourrait être confondu avec du Mars Red Sky sur un blind test ! Résolument rock dans certains choix, le groupe n'oublie pas ses origines et avec "Hold on" ou "Sphinx", ils rappellent que pour enchaîner parfaitement les riffs qui défoncent et claquer une voix grave qui fait hérisser les poils, il n'y a pas beaucoup mieux qu'eux (mention très spéciale à "Hold on" qui multiplie les inspirations différentes et les amalgame toutes avec brio). S'il ne fallait garder qu'une démonstration de cette facilité à mêler puissance et mélodies, on peut mettre de côté "Into the storm", le genre de titres qui permet à Gojira de s'asseoir à la table des plus grands sans rougir. Une assemblée où le combo retrouve Sepultura, des influenceurs (puisque ce terme existe désormais), des précurseurs et d'ardents défenseurs de la planète à qui on pense forcément à l'écoute du sublime "Amazonia". Par leurs mots et leurs actions, les Français ont toujours soutenu notre vieille Terre et s'ils n'ont pas de Roots au Brésil, ils refusent de rester sans réaction face aux catastrophes générées par l'Homme. A l'instar de "Grind", l'humain est capable de dérapages (plus ou moins) contrôlés mais les mêmes sont aussi responsables du retour en force de l'harmonie avant l'extinction des feux (mais pas ceux des forêts primaires).

Si le Terrien n'est pas encore en osmose avec son milieu, Gojira est lui complètement en symbiose avec son élément, un métal corrosif qui marie le death et le rock, qui unit harmonieusement l'ancien et le nouveau, le doux et le rugueux, le violent et le calme, le magnifique et le sublime.