Tout n'a-t-il pas été dit à propos de Ghost et de son génial cerveau Tobias Forge ? Personnellement, je pensais avoir fait le tour de la question à propos de ce groupe dont mon premier (et inoubliable) souvenir remonte à un concert s'étant tenu un début d'après-midi dominical dans le cadre de l'édition 2013 du Sonisphere français. L'eau a coulé sous les ponts depuis, les albums et les tournées se sont enchaînées, avec leur lot de grandiloquence et de succès jamais remis en cause. J'ai un (gros) faible pour Infestissumam qui reste mon album de cœur, mais Meloria et Prequelle ont consolidé le statut de Ghost comme groupe incontournable et trouvent une place de choix dans ma rockothèque. Mais voilà, Impera, cinquième effort studio longue durée, est bien la preuve que le groupe, constant dans sa façon de composer des tubes qui trottent dans la tête, est encore sujet à surprises. De bonnes surprises même.
Avec Imperia à la cover rétrofuturiste impeccable (merci Zbigniew Bielak !), c'est le quatrième représentant de la destinée Emeritus qui succède au Cardinal Copia, reprenant le contrôle de ce mastodonte qu'est devenu Ghost. Et alors que le groupe tutoie les sommets avec sa pop métallique/satanique, Impera fait part belle aux compositions les plus heavy que le groupe de Tobias aient composées, le tout dans un registre de plus en plus progressif, bien aidé à cette occasion par Fredrik Åkesson (Opeth) pour les guitares et par les auteurs Salem Al Fakir et Vincent Pontare. Un pari osé, mais ne s'agit-il pas de la destinée de Ghost de faire évoluer ce monstre hors des sentiers battus ? Bien entendu, les ingrédients faisant le charme de la formation suédoise sont au menu de cette gargantuesque orgie musicale. Passé le romantique "Imperium" en guise d'intro, "Kaisarion" démarre sur les chapeaux de roue, les accents pop s'entrelaçant de fort belle manière avec le riffing appuyé des guitares aiguisées et le basse/batterie supersonique. C'est jouissif tellement c'est Malin. "Spillways" enfonce le(s) clou(s) comme pour mieux nous crucifier, et la modulation prog rock va finalement à ravir à ce groupe qui, une fois encore, réussit son coup. Tout au long de ce disque vont s'enchaîner les délices sonores ("Hunter's moon", le gigantesque "Darkness at the heart", le sombre "Call me little sunshine") et les uppercuts ("Watcher in the sky", "Griftwood"), avec tout de même quelques fautes de goût ("Twenties" sans saveur ou l'incompréhensible envie de thrashiser l'ambiance). Après une écoute qui n'a pas été des plus rassurantes du fait d'une indigestion d'informations à appréhender, je dois quand même reconnaître qu'après plusieurs lectures, ce disque est réussi.
Ghost peut (une nouvelle fois) conquérir le monde avec cet Imperia qui, malgré sa complexité, pourrait lui faire atteindre les sommets Et même si, visuellement, je serai toujours nostalgique des deux premiers opus et que je regrette le coté grand guignolesque des dernières productions scéniques, Ghost reste et restera à jamais un groupe qui comptera pour moi (surtout depuis que je viens de découvrir en écoutant ce disque qu'un des Nameless Ghoul n'est autre que Chris Catalyst du Ginger Wildheart Band/Ugly Kid Joe/Eureka Machine !).
Publié dans le Mag #51