Si tu veux vivre quelque chose de ténébreux qui suinte le désespoir absolu, tu es au bon endroit l'ami. Je reviens d'une immersion sonore dans laquelle je ne me suis pas vraiment senti le bienvenu, c'était carrément malfaisant, diabolique, mais comme dans toute part d'ombre, on y trouve toujours un coin où on s'y sent bien. J'ai donc découvert Perdition, le dernier album des Rennais de Fange, et je dois bien avouer avoir été conquis par cette mixture de (post-) metal et d'industriel. À vrai dire, je ne connaissais pas très bien l'œuvre intégrale des gaziers, je ne sais même pas si c'est leur disque le plus intéressant ou quoi, mais ce Perdition a eu les capacités de m'émouvoir presque instinctivement. On est loin de l'ambiance de Fear Factory ou de Godflesh, c'est beaucoup plus lourd avec une touche sludge bien cradingue, et la voix de Matthias à la fois gutturale, parlée et hurlée en français ne laisse aucune place aux tentatives mélodiques pour exprimer sa rage. Ce rôle lyrique est d'ailleurs pris par les invités vocaux (Olivier Guinot de Lodges sur "Toute honte bue" et Diane Pellotieri de Pencey Sloe sur "Désunion sacrée"), et c'est presque le petit regret que j'ai sur ce disque : de ne pas avoir jouer plus souvent avec cette ambivalence vocale.
Publié dans le Mag #61