Eths - Tératologie Si les textes de Eths (et donc de Candice) tournent depuis toujours autour des souffrances, physiques et morales, le groupe n'avait jamais autant exploité la possibilité d'un concept album qu'avec Tératologie. Quoi ça ? La tératologie, c'est la science qui étudie les malformations congénitales, le nom savant du truc qui bosse sur les monstruosités naturelles... C'est le seul mot qu'on expliquera (même si à force de le lire, tu devrais t'en souvenir) car les textes de ce nouvel album, extrêmement dense, fourmillent d'autres termes tout aussi complexes et que même un dictionnaire n'explique pas toujours clairement, outre le fait que ce champ lexical est fort utile au scrabble, ça donne une couleur à l'album, ça renforce le malaise. Le fait de ne pas comprendre des mots qui pourtant sonnent bien entre eux met une distance entre Eths et nous là où Candice aurait pu joué à fond la carte du malaise adolescent (thème abordé par "Bulimiarexia" et son charmant vomi final). Extrait choisi de "NaOCl" (soit la formule chimique de l'hypochlorite de sodium plus connu sous le nom "eau de Javel") : Ma sextine est l'arcane de ma sombre gélatine. Méninges avancées à l'anosmie anorganique. Mon église primitive est encore une chimère alcaline. Javeline est infravie, salope. Javeline est acéphalie, salope. Mon porte-mort émétique complote. Toute une prose médicale et poétique, parfois douce à l'oreille (anosmie anorganique) parfois violente au cerveau (salope). Pas simple à déchiffrer, à retenir, à chanter mais sacrément bien écrit. Et là où Eths fait très fort, c'est que les références sont placées dans des textes qui traitent souvent des relations humaines (celles qu'on connaît tous de près ou de loin), le monstre moral est bien souvent bien pire que le monstre physique ("Priape" et son superbe passage en acoustique). Analyser les textes et les sujets demandent beaucoup de temps (et de connaissances), n'ayant ni l'un ni l'autre, on laisse le soin aux plus fans et aux plus lettrés de s'amuser avec cette petite boutique des horreurs lexicales. Musicalement, le quintet marseillais (fraîchement remodelé), semble plus abordable, moins extrêmiste, certes ça tabasse toujours pas mal ("Ondine", "Ileus Terebelle") mais il y a encore davantage de mélodies alors que les ambiances n'ont jamais été aussi poussées ("Rythmique de la bête", "Anima Exhalare", "Liquide éphémère"...) grâce à des passages de guitare acoustique, du piano ("Hydracombustio"), des samples et un savant dosage des rythmiques. En clair, malgré d'importants changements internes, Eths n'est pas plus faible qu'auparavant : conceptualiser quinze titres autour de la Tératologie était plus que risqué mais au final, ça paye.