Il y en a des choses à dire pour présenter Ecr.Linf ! Par où commencer ? Peut-être par la formation en elle-même qui réunit quelques vieux comparses qui jouaient ensemble il y a une quinzaine d'années au sein de Jarell : Krys au chant (aussi Omrade, ex-Demande à la Poussière, ex-plein d'autres groupes), Dorian à la guitare, Jean aux claviers et deux autres "non Jarrell", à savoir le bassiste Jiu qu'ils connaissent bien car il est aussi passé par Demande à la Poussière et Omrade (mais également par Lokurah et No Return) et le batteur Rémi qui possède également un beau CV (Crusher, Dissident, ex-Hyrgal, ex-Svart Crown...). Je crois qu'on peut parler de "supergroupe".
Un groupe dénommé Ecr.Linf, raccourci pour "Écrasons l'infâme" qui servait de signature à Voltaire, le philosophe souvent censuré (il passe près d'un an à la Bastille, s'exile en Angleterre et en Suisse, fait éditer des textes clandestinement...) et inlassable combattant de la tolérance. Pour lui, l'infâme, c'est l'obscurantisme et la toute puissance de la religion catholique qui décide des vérités de l'époque et refuse qu'on apporte de la lumière préférant rester dans l'ombre. Cette lutte contre l'obscurité comme la défense de la tolérance est un thème cher au combo qui a trouvé logique de reprendre la formule à son compte.
Et comment aller au combat ? Comme des Belluaires pardi ! Ce sont les "gladiateurs" qui ne méritent pas vraiment ce nom car il est construit sur le mot "glaive", alors que ces combattants (esclaves ou prisonniers condamnés à morts) affrontent des bêtes sauvages avec une simple lance et parfois un trident et des protections sur les jambes. Taureaux, ours et sangliers assurent le "spectacle"... D'ailleurs, l'animal comme l'homme présenté en artwork semble ne pas correspondre à la définition du belluaire, c'est un félin qui attaque un homme casqué, cela convient plus pour l'idée de la "chasse" (venatio pour les latinistes et donc "venator" pour le "chasseur"), un autre "jeu" cruel qui serait à l'origine de l'extinction du lion en Europe. L'Antiquité est une période passionnante, mais sa (mé)connaissance vient surtout d'œuvres artistiques modernes ou contemporaines pas toujours exactes (Gladiator est un bon film, mais ferait un très mauvais cours d'histoire). Bref, les vacances ont commencé, je vais arrêter de faire le prof relou !
Ecr.Linf descend dans l'arène avec un black metal ouvert à d'autres influences, acceptant à la fois des incursions hardcore (avec l'importance du contexte, j'ai repensé à The Arrs...), des ralentissements un peu prog/post-metal (sur les bords de "Le royaume du vide") et n'hésitant pas une seconde à laisser de la place à l'accordéon d'Adrian pour se donner un peu d'air... de musette ("La danse des crânes"). Pour le "train train" quotidien (tu parles), on met des grands coups de double pédale, des nappes de synthé, un chant écorché/growlé/lourd/parlé et des riffs qui te tombent dessus de partout. Perso, c'est quand ça s'éclaircit davantage que je kiffe un peu plus, comme avec "Missive" où les contrastes sont plus marqués et l'aspect black "bourrin" s'efface.
Si tu apprécies l'histoire, la littérature et surtout le black, tu sais ce qu'il te reste à faire. Et Ecr.Linf.
Publié dans le Mag #61