Earthship Emmené par deux membres de The Ocean, Earthship reste par certains côtés, dans les mêmes eaux que le collectif postcore bien connu des lecteurs de ces pages, quand bien même il ne saurait être qu'un vague succédané. Post-hardcore-sludge tellurique [vs] prog-metal dynamique, quelque part entre un Mastodon très énervé, un Baroness période rouge (parce que le bleu hein, ça va cinq minutes) et un High on Fire qui aurait goûté, en compagnie de Zozobra, aux déferlantes émotionnelles de The Ocean (normal c'est en partie les mêmes hommes), le groupe ne peut donc faire autrement qu'envoyer du très lourd dans les conduits auditifs. "Caught in a storm", puis "Sea of peril" en attestent. Lestés d'un groove bien massif, les deux premiers titres donnent le La en envoyant des cargaisons de riffs bien velus à la face de l'auditeur. Techniquement c'est irréprochable, structuré au millimètre et fatalement, d'une efficacité redoutable quand bien même ça manque encore un brin de cette puissance incomparable et déflagratrice dont on les sent pourtant largement capables. Mais que l'on ne s'inquiète pas trop, ça va venir.
Et plus vite qu'on ne l'espérait puisque "Fever pitch" vient rapidement faire une petite mise au point. Earthship se met alors à saturer les tympans, la tension monte de deux ou trois crans et les guitares crachent les flammes sans discontinuer pendant que le mélange de growls/chant clair fait son oeuvre. La maîtrise formelle est ici absolue on l'a dit mais d'un point de vue rythmique, le résultat est quand même impressionnant de précision. Chirurgical, surtout quand il s'agit d'assommer l'auditeur avec le granitique, "A line divides", le groupe livre une belle démonstration de sludgecore éraillé et musculeux, taillé dans le marbre d'un postcore éruptif, avant de le mettre sous une chape de plomb à l'heure de lâcher "Born with a blister" dans les enceintes. Eléments progressifs volubiles, une batterie qui moissonne, un charisme vocal à toute épreuve que l'on retrouve notamment à plein volume sur "Bleak" et plus encore "A feast of vultures". Entre-temps, le groupe s'autorise une petite escapade acoustique avec un "Grace" assez anecdotique avant de retourner à ce qu'il sait faire de bien, soit un post-core-prog-metal qui bûcheronne sec ("Soul embedded") et le fait, certes, sans grande originalité, mais avec un savoir-faire irréprochable (normal en même temps ça vient de chez Pelagic Records - The Ocean, Abraham, Nebra, Kruger,...), pour un rendu final des plus honorables.