... Après les 350 000 copies d'Images & words vendues à travers le monde, Dream Theater entre en studio en 1994 avec quelques kilotonnes de pression sur les épaules. Car les fans peuvent autant faire vivre un groupe qu'y mettre un terme. Le groupe brave l'épreuve et garde son intégrité en sortant en octobre de la même année un album tout à fait différent de son prédécesseur, moins technique et plus sombre.
Réveil matinal avec "6 : 00", sa descente de toms et une polyrythmie aux claviers. Tout de suite la voix de James Labrie chatouille l'oreille : le style propre d'Images & words est enterré et le canadien s'offre des lignes de chant plus énervées. Si cet album sonne plus sombre et plus "in your face", l'apparition d'une Ibanez 7 cordes dans les mains de John Petrucci en est en partie responsable. "Caught in a web" est ainsi une ode aux riffs profonds, alors que James Labrie continue d'aborder un style rugueux. "Innocence faded" marque un retour à plus de douceur, doublée d'une mélancolie prenante. Être l'inventeur du prog' métal n'empêche pas d'aborder des styles plus accessibles et le groupe ne s'en prive pas. À chaque album sa ballade ou son titre accrocheur et les compositeurs voient cela comme un pan assumé de leurs compositions. Titre accrocheur certes, mais pas dépourvu de technicité et de surprises. "A mind beside itself" est un des piliers de cet album. Titre tripartite comptant notamment l'instrumental "Erotomia", véritable démonstration de l'utilisation possible des chromatismes ascendants et descendants, cette suite se poursuit et se termine sur une pente descendante jusqu'au duo guitare acoustique / chant de "Silent man". Même si l'on n'est pas sur le même plan que le génial "Metropolis part 1", cette progression n'est est pas pour autant dénuée d'intérêt. Cette première demeurant néanmoins un cran en dessous de la suite de l'album.
"The mirror" remet le groupe sur les rails des riffs assassins, sur fond d'ambiance glauque servie par des orgues dissonants. Considéré par les fans comme un prologue de la série des AA, qui aborde les problèmes d'alcool de Mike Portnoy, c'est une véritable démonstration pour ce qui est des renversements de pulsation. Les aspects complexes et techniques sont relégués au second plan, mettant la plupart des titres accessibles aux premières écoutes, même si certaines références cachées au sein des compos demandent une attention particulière. Ainsi la suite d'accords de "Space Dye Vest" est introduite dans le corps de "The mirror". "Lie" continue sur un pur style heavy, un titre dont le clip permettra au groupe d'atteindre les grands médias musicaux, MTV en tête. Ambiant et minimaliste, "Liffting shadows off a dream" marque une pause dans cette seconde partie intense en tout point. Guitare proche de U2, accords tantôt mineurs, tantôt faussement majeurs, il met en retrait les claviers, créant ainsi un des titres les plus intéressants de ce troisième album. "Scarred" et son introduction jazzy dépasse de loin les dix minutes, se démarquant du reste de l'album. Malgré cela, quelques longueurs font de ce titre une composition mineure, bien qu'ayant totalement sa place parmi les autres titres. "Space dye vest" clôt magistralement Awake, exprimant toute l'ombre présente au long des dix précédents titres par une suite d'accords sensibles. La gravité et la tension de cette composition sont à l'image de l'état d'esprit du claviériste à ce moment de la carrière du groupe. En désaccord, il le quittera peu de temps après la sortie de l'album, marquant ainsi un nouveau coup d'arrêt pour le groupe. Appelé pour assuré les claviers pendant la tournée, Derek Sherinian fera son possible pour remplacer un membre encore aujourd'hui regretté par les fans.
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