Dillinger Escape Plan - One of us is the killer One of us is the killer, joli name-dropping. Et déjà, rien que le titre annonce une belle fessée taille patron assénée par les empereurs de la scène mathcore planétaire. Et pour cause, en entrée de ce nouvel opus sorti via le propre label du groupe, Party Smasher Inc., en collaboration avec BMG et Sumerian Records selon les continents, The Dillinger Escape Plan passe à tabac l'assistance avec un "Prancer" gorgé de cette sève corrosive qui suinte par tous les riffs de cet album taillé pour faire brutalement mâl(e). Exit Season of Mist qui s'était chargé de sortir un Option paralysis qui avait eu quelques difficultés à faire oublier Ire works, cette fois, le groupe a tout pris en main et financé de sa propre poche. Une expérience salutaire.

"When I lost my bet" ironise avec son sujet, l'éponyme "One of us is the killer" confirme ce que l'on présentait : accélérations empreintes d'une frénésie incandescente, riffing sauvagement décharné, ruptures de rythmes brutalement terrassantes, DEP fait ce qu'il sait faire de mieux. En y mettant bruyamment les formes. Poussées de fièvres primales, passages jazz/pop/organiques parsemés ci et là façon Mike Patton avec Peeping Tom, micro variations stylistiques avec ce rock "reptilien" qui vient insidieusement prendre le contrôle des opérations, mélodies exhalant un magnétisme aliénant porté à ébullition par un contexte instrumental magnifique d'intensité mathcore (mais pas que), le groupe fait à peu près ce qu'il veut entre chacune de ses exécutions sonores parfaitement planifiées ("Hero of the soviet union"). En expérimentant, magnifiant l'intensité émotionnelle qu'exhalent les onze titres de ce One of us is the killer tout en respectant à la virgule près les codes de son math-core "à tiroirs" mais à l'efficacité redoutable, les américains donnent très exactement à l'auditeur ce que celui-ci était en droit d'attendre d'eux. Sauf qu'ils le font mieux encore.

Titres abrupts aux propriétés addictives effrayantes (sublime "Nothing's funny", "Paranoid shields"), boxon sonore rationnellement déstructuré, en témoigne l'explosif "Understanding decay", Dillinger Escape Plan a trouvé une énergie créative multi-stylistique (ce n'est pas la première fois mais sur ce nouvel opus, la mixture est plus aboutie que jamais) qu'il additionne à sa fougue mathcore athlétique que l'on qualifiera d'habituelle chez eux ("CH 375 268 277 ARS"). Et quand il s'agit plus simplement de mettre un peu de côté les fulgurances jazzy, tentatives pop et autres textures rock subversives, c'est pour expédier des brûlots purs et durs en travers de la platine. Façon sniper ("Magic that I held you prisoner" dont les lignes instrumentales inflammables ne calment pas les ardeurs mélodiques) ou en architectes du chaos sonore pour "Crossburner", ce avant que les riffs de "The threat posed by nuclear weapons" ne giclent en saccades discontinues sur les amplis, déversant leur féroce diatribe tout en décibels concassés et mettant en pièces détachés les dernières poches de résistance devant la tornade Dillinger Escape Plan.

Un disque âpre et sans concession, dopé par une inventivité et une maestria formelle sidérante. Mais plus que ça encore : un grand album.