Converge - All we love we leave behind Après des albums du calibre d'un Jane Doe (cultissime), You fail me (imparable) ou cet Axe to fall qui démontrait que le groupe n'avait toujours rien perdu de sa verve hardcore punk métallique et qu'il était plus en forme que jamais, voici maintenant All we love we leave behind. Un opus tout en douleur viscérale, en férocité frontale et abrasion émotionnelle : car Converge est la violence même quand il s'exprime par la mélancolie. Et tout chez le groupe respire ici ce sentiment de danger permanent, de guérilla intime, palpable et déchirante. Quasiment un affrontement intérieur réglé à coups de riffs de tueur.

Converge fait avec ce nouvel album ce qu'il sait faire de mieux. Soit du Converge. Pur et dur. Sans la moindre concession sur la forme ou le fond. Oui, on vous voit venir, car ce n'est pas tout à fait vrai : les Américains font mine d'aérer leur musique sur l'inaugural "Aimless arrow". Sauf que cela ne dure pas et dès la deuxième piste, ils reviennent avec le terrible "Trespasses" à leurs violents amours charnels, brutaux. Entre les deux, des cagettes entières de riffs assassins qui giclent aux quatre coins du studio, une production thermonucléaire et des plans de basse/batterie juste phénoménaux : si on a cru que les gaziers allaient se calmer avec l'âge on s'est méchamment trompé. Et il va donc falloir passer à la caisse notamment avec un "Tender abuse" littéralement écorché vif.

"Sadness comes home", "Empty on the inside", "Sparrow's fall", le groupe vomit ses tripes dans les amplis, All we love we leave behind transpire la haine, exhale le désespoir et marteau-pilonne les conduits auditifs en multipliant les assauts hardcore/rock/punk/metal jusqu'à ce que mort s'ensuive. Converge s'exprime dans la déflagration auditive, la démolition sensorielle trouvant son exutoire par le chaos, le démembrement sonore qui ne semble jamais vouloir s'arrêter dès lors que l'on a mis un pied dans l'album. Les morceaux se suivent, s'enchaînent, donnant un effet de démultiplication et de férocité pure ; et alors que l'on s'abandonne aux enchaînements effrénés d'"A glacial place", puis au groove fulgurant d'un "No light escapes", le groupe assène ses ultimes coups de boutoir.

Que ce soit avec le brutal "Vicious muse" ou le plus insidieux et retors "Veins and veils", Converge ne s'autorise aucune limite dans l'agression viscérale, aucune retenue dans l'expression d'émotions brutes qui ne demande qu'à jaillir de ses cordes surtendues (vocales ou instrumentales), le tout, sans jamais faiblir ou sembler renoncer à ses fondamentaux hardcore. On en prend une dernière fournée avec au hasard "Shame in the way" et on les laisse sagement nous faire la leçon. Non, en fait, la leçon on peut oublier tant cet album ressemble à une expédition punitive destinée à faire comprendre que quand les grands mamamushi du hardcore/punk métallisé planétaire envoient du riff : on écoute, on encaisse. Hard(core).