Compilation Falling Down A l'aube de poser enfin une oreille attentive sur cette (si attendue) compilation, on pouvait se dire que tout amateur se devait d'acquérir ledit objet. Après l'avoir fait, force est de constater que désormais, il y aura en ce monde deux catégorie d'individus, ceux qui possèdent leur exemplaires de Falling down... et les autres. 3 CD's, 40 groupes, 7 nations représentées, le tout pour plus de 3h30 de musique. Des titres déjà connus des puristes, des morceaux plus rares et une petite sélection d'inédits signés par quelques groupes et non des moindres puisqu'il s'agit entre autres de Kylesa ("Set the Controls") qui ouvre avec brio les hostilités, d'Amenra ("Terziele-Totteddood"), Knut ("Fast forward bastard"), Cortez (l'excellentissime "Idylle"), Year Of No Light (un "Cimmeria" joliment corrosif) et Dirge notamment avec "The Coiling". Là forcément vu l'affiche, ça calme. D'autant qu'il y a encore pas mal de monde qui se bouscule au portillon : du lourd... et du très lourd. Des têtes d'affiches du calibre d'un Pelican ou des petites pépites sorties de presque nulle part comme As it falls ou Maïno, les producteurs de la compile ont décidé de ne pas faire de différence et de ne prendre pour seul critère de sélection que la qualité de la musique proposée. Elément certes éminemment subjectif mais qui dans le cas de Falling down se révèle être une véritable réussite.

40 titres, évidemment l'auteur de ses quelques lignes a du s'obliger en expurger l'essentiel, faute de quoi le lecteur aurait eu droit à une thèse de doctorat explorant les tenants et aboutissants du mouvement post-rock/hardcore, en 338 pages et 53 chapitres... (potentiellement intéressant mais assurément rébarbatif). Au rayon des déceptions relatives, on citera notamment Tephra qui n'apporte pas grand chose au genre, Impure Wilhelmina qui cède à la grandiloquence et qui démontre que le groupe est sans doute un peu surestimé, ou Yog qui se fend d'un titre psychotique et dément de 40 petites secondes mais bien trop court pour réellement se faire un avis sur le groupe... Une fois passées ces quelques semi-déconvenues ; auxquelles on pourrait (éventuellement) ajouter l'inédit et éprouvant "Story of a thousand" livré par Zatokrev tellement écorché qu'il en déchire les membranes auditives ; Falling down nous réserve des moments de chaos sonore ou à l'inverse de crescendo émotionnels à fleur de peau. Si l'on évitera ici de s'attarder trop longtemps sur les groupes dont nous avons déjà parlé dans ces pages et les titres déjà chroniqués par ailleurs d'Aside from a Day, Einna, Kehlvin ou My Own Private Alaska et Callisto par exemple, (que l'on redévore pourtant avec appétit), ce sera pour s'attarder sur les confirmations et les découvertes de cette gargantuesque compilation. Notamment Rosetta qui avec "Departe" frappe fort et nous offre l'un des tous meilleurs titres de Falling down. En tous cas le plus vibrant. Au rayon petites surprises, on a droit à un live assez rock'in hardcore des toulousains d'I Pilot Daemon, des inédits signés par des groupes déjà bien installés sur la scène postcore avec notamment Dirge, Rorcal et son oppressant "Descend from wherever we shall ascend" ou Time to Burn qui fracasse les vertèbres à coup de "Candle in the wind".

Crescendo/descrescendo, abrasion émotionnelle, corrosion sensitive, les pépites méconnues sont également de la partie avec notamment les américains d'Ocoai qui donnent un petit aperçu de leur Breatherman avec le magistral "Manifestant", ou Maïno et Umealven qui se dévoilent ici sans même avoir encore sorti d'album. Mais pour eux, le futur réserve sans aucun doute de belles choses, quand bien même la qualité de la production est encore un peu "light". De futurs espoirs, mais également de belles confirmations dont Zero Absolu, qui après un premier album de grande classe et alors en pleine écriture du second, a trouvé le moyen d'apporter sa contribution à Falling down avec l'inédit "Sans ailes". Une flopée de titres tous plus corrodants les uns que les autres (General Lee, Llorah, Stuntman...), d'autres qui jouent sur les contrastes d'une douceur cotonneuse (un Eno toujours aussi magique depuis la découverte de Stea.alto, Ira, Ocoai étonnant et ténébreux) placée en opposition par rapport à la violence éruptive exsudée par les furieux Sullivan14 ou la peu gracieuse Madame de Montespan. Quelques perles encore inconnues (pour le moment...) disséminées sur les 3 disques que compte la compilation, un Another Moon fantasmagorique voguant sans fin à travers un labyrinthe de songes, As it falls lestant de plomb un titre oscillant en permanence entre ombre et lumières avant de nous guider à travers l'obscurité pour rejoindre les contrées musicales d'Inys à travers "L'ombre et le reflet". Des morceaux mélangeant les sonorités, une oeuvre confrontant habilement les styles (de la puissance hardcore d'Overmars à l'ambient apocalyptique bruitiste de l'énigmatique Kalvria en passant par les nancéiens de Caldera étiquetés "noise post-doom metal"). Une variété de styles qui peut surprendre au premier abord mais qui ne fait finalement que témoigner de l'esprit d'ouverture des géniteurs de cette compilation. Car non, Falling down n'est pas qu'une simple collection de titres estampillés postcore, c'est évidemment bien plus tant et si bien que les groupes présents ici délaissent souvent la violence brute du hardcore pour s'en aller naviguer vers les récifs plus hospitaliers du post-rock à haute teneur émotionnelle. Le tout harmonieusement réparti et parsemé d'éclairs de génie. Après ça... on peut mourir en paix (ou attendre un volume II...).

Les musts absolus : Amenra, Ocoai, Cortez, Callisto, Eno, General Lee, Pelican, Rosetta...